Le
problème OVNI
L'influence
scientifique (VI)
L'astronomie
Depuis
l'avènement de l'astronautique, à plusieurs reprises des
scientifiques de renom ont proposé certaines hypothèses hardies et
saugrenues que des chroniqueurs peu scrupuleux traduisirent dans leur
journaux sans trop savoir ce qu'ils écrivaient.
On ne peut
ignorer l'influence des fameux "canaux" martiens
soi-disant découverts par Schiaparelli et Lowell au tournant du
siècle dernier, remis au goût du jour par les clichés de la NASA montrant des lits
de cours d'eau asséchés et des dépôts d'alluvions.
Certains
astronomes contemporains, tels M.Walter, D.Des Marais,
R.Hoagland ou R.Burns n'hésitèrent pas en voyant les premiers
clichés, à faire l'hypothèse qu'il existe des fossiles, des
analogies terrestres ou des monuments artificiels sur Mars,
autant de structures apparentes liées à la mauvaise
résolution des caméras envoyées en éclaireurs sur la
planète Rouge. Grâce à la sonde d’exploration spatiale
Mars Global Surveyor, des images en haute résolution du
fameux "visage de Mars", Cydonia, ont été prises en 1998
qui démontrent qu'il s'agit bien d'une montagne isolée
érodée par les vents de sables.
Comparant les anciennes et les nouvelles
images, le commentaire de la NASA est explicite à ce
propos : "les images parlent d'elles-mêmes".
Jusqu'en
1948 environ, tous les vulgarisateurs se demandaient si Mars était
habitée, illustrant leurs propos de naïfs petits hommes verts
sortis tout droit de la littérature anglo-saxonne, en particulier
des romans de H.G. Wells qui furent traduits dans toutes les langues.
L'Union soviétique se démarquera jusqu'à la fin des années 1950,
époque à laquelle l'astronome Tikhov
était toujours persuadé de reconnaître les traces d'une vie végétale
dans les spectrogrammes de la planète Rouge.
A
la même époque, l'astrophysicien soviétique Iosef Shklovsky
pensait également que les satellites de Mars étaient creux, donc artificiels, et
construits par une civilisation très avancée, seule hypothèse
pouvant expliquer le mouvement séculaire des deux satellites. La découverte
de Cydonia par la sonde Viking Orbiter sur laquelle se
dessinait un visage allait aussi dans le sens que Mars avait pu
abriter une civilisation technique fort évoluée.
La
NASA s'intéressa également aux phénomènes lunaires transitoires
(LTP) qui, depuis 2000 ans, provoquent temporairement des
changements de couleurs et des flashes brillants en certains
endroits bien précis de la surface de la Lune.
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L'un des dix satellites UFO qui furent lancés entre 1995 et 1999. |
Certains équipages des missions Mercury, Gemini et Apollo observèrent également
ces manifestations - de même, selon le Dr Hynek
l’équipage d’Apollo 11 qui observa "un objet étrange non pas en
parking autour de la Lune, mais en vol, au-devant d'eux",
si bien que le public pouvait aisément croire que les
officiels de la NASA "nous cachait quelque chose"
comme le disent les ufologues.
Quelques institutions
scientifiques ont également filmé des OVNI, tel
l'Observatoire du Smithsonian (SAO) et des témoins proches
des bases américaines d'essais nucléaires (Los Alamos).
Rappelons enfin qu'entre 1995 et 1999 la NASA lança dix
satellites de communication militaires baptisés UFO (UHF
Follow-On), pour remplacer la constellation des satellites
FLTSATCOM et Leasat. Juste l'acronyme qu'il fallait pour
brouiller encore un peu plus les pistes dans les rapports et
les transmissions radios !
L'idée
d'une vie extraterrestre s'est enfin renforcée par la bioastronomie,
cette nouvelle branche de l'astronomie qui étudie les possibilités
de vie dans l'Univers en se fondant sur nos connaissances en cosmologie,
en astronautique, en radioastronomie et
en exobiologie (biologie en dehors de l'environnement terrestre).
Aujourd'hui le système d'écoute le plus performant est le fameux
projet BETA, un scanner radioastronomique couplé à un système
informatique capable d'écouter des centaines de millions de
fréquences simultanément.
En 1973, le médiatique Carl Sagan, auteur de la
série télévisée "Cosmos" parlait d'une possibilité de
"Contact" avec des êtres intelligents extraterrestres
(CETI). Mais devant le peu de résultats probant des programmes
d'écoute, il reconnut peu après qu'il n'était plus question de
contact mais plutôt de "recherche d'intelligences
extraterrestres", SETI, quoique sous-entende son dernier
film “Contact”.
Mais
entendons-nous bien, à l'heure d'aujourd'hui ces potentiels "êtres intelligents" sont réduits à des systèmes
de raies, représentant quelques nuages interstellaires de molécules
d'hydrogène ou organiques, mais rien de plus évolué. Les seuls endroits où les
biochimistes espèrent trouver des traces abiotiques ou des formes
de vie plus évoluées restent les atmosphères planétaires riches
en composés organiques (Titan ou Jupiter par exemple). Mais ne vous
attendez pas à y trouver des poissons ou quoi que ce soit d'autre;
ce sera tout au plus des pseudo-bactéries, des algues uni ou
pluricellulaires, voire des bases azotées ou même de simples molécules
polymérisées.
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Protégé
par une jaquette en or, les sondes
spatiales Voyager 1 et 2 lancées en 1977 contiennent un
message encyclopédique de l'humanité. |
Messages
aux extraterrestres
Côté
médiatique, dès 1972 Sagan réussit à placer une petite plaque schématisant
l'homme et le système solaire sur les sondes spatiales Pioneer 10
et 11. Il parvint également à convaincre la NASA de placer un
disque encyclopédique à bord de chacune des sondes Voyager 1 et 2
qui, quelques années plus tard devaient quitter le système
solaire.
En 1986, sous l'initiative de
l'astrophysicien Hubert Reeves, les amateurs ont pu envoyer des
messages radios dans l'espace, renouvelant la fameuse émission
d'Arecibo.
En
1999, un message similaire mais plus élaboré fut conçu par les physiciens
canadiens Yvan Dutil et Stéphane Dumas. Il fut envoyé vers quatre
étoiles similaires au Soleil dans le cadre du projet Cosmic Call.
Plus
récemment, en 2006, en collaboration avec Jean-Jacques Beineix,
réalisateur et producteur de Cargo films, le CNES diffusa simultanément
sur les ondes de la chaîne TV ARTE et dans un radiotélescope installé
à Aussaguel (Toulouse) une émission télévisée intitulée "Cosmic
Connexion". D'une durée de 2h50, le message télévisé présenté
à une heure de grande écoute fut envoyé en temps réel à destination
de l'étoile Errai, γ Cephei, une sous-géante rouge âgée de 6.6 milliards
d'années et située à 45 années-lumière autour de laquelle gravite en 903
jours une exoplanète 1.6 fois plus massive que Jupiter. En fait Errai fut
choisie symboliquement parce que suite à la précession des équinoxes, elle sera
notre étoile Polaire dans 25 siècles, en l'an 4500.
En
effet, il ne faut pas considérer ces actions comme des tentatives de conquête,
d'une soif de reconnaissance ou d'une mégalomanie. Elles visent
simplement une recherche intellectuelle, une saine curiosité dans
le désir qu'éprouve chacun à communiquer avec autrui. Ces
tentatives sans prétentions n'ont qu'une valeur symbolique mais
reflètent bien l'esprit actuel du public devant l'une des plus
grandes énigmes de notre temps.
Il faut bien le
souligner, le fait d’envoyer ces messages dans le cosmos comme on
enverrait une bouteille à la mer, ne signifie pas que les astronomes
s’attendent à ce qu’ils soient captés là-haut quelque part
par une civilisation extraterrestre, à l’inverse de toutes les
actions scientifiques qui ont en général un objectif concret.
Celui-ci est purement symbolique. Bien sûr, si l’un d’eux est
capté et si on nous répond, nous en serons les premiers étonnés
et probablement incrédules. Mais cette probabilité de rencontre
est quasi nulle, même à l’échelle de la vie d’une civilisation.
Une
fois encore, si certains arguments ont des relents d'anthropocentrisme,
il ne s'agit toujours que d'hypothèses. Dans ces domaines, rien, aucune
preuve ne fait étayer l'hypothèse extraterrestre.
Le public peu critique prend bien souvent ces
annonces et ces tentatives symboliques au pied de la lettre et fait
vite l'amalgame entre toutes ces idées, se forgeant une conception
bien particulière, mais erronée, de la vie extraterrestre.
Les
énigmes archéologiques
Dans
leur fameux livre "Le matin des magiciens" publié en 1960, les
journalistes français Louis Pauwels et Jacques Bergier,
réconfortés par les explications de certains chercheurs, "confirmèrent"
à leur façon les traces de visites d'extraterrestres sur Terre.
Plus récemment, en 2009 la série
TV américaine "Alien
Theory" (Ancien Aliens) de Kevin Burns reprit ce sujet
pseudoscientifique qu'elle développa en 240 épisodes d'une manière
tellement persuasive - mais sans preuve - que certains téléspectateurs mal
informés y ont cru. Mais les scientifiques s'interrogent sur la vraisemblance
de ces soi-disant "preuves" et restent très réticents à reconnaître le passage
d'éventuels ambassadeurs de l'espace sans preuves tangibles.
Parmi
les "preuves" évoquées, les "pistes de Nazca" au Pérou inaugurèrent un large débat dans les
années 1970. Le célèbre "National Geographic", les magazines
d'ufologie, d'archéologie et d'astronomie s'en firent même l'écho.
Ces géoglyphes couvrent environ 450 km2
d'une région aujourd'hui désertique couverte de cailloux. Soit-disant uniquement visibles
du ciel (c'est faux car la plupart peuvent être vue depuis une colline
proche), ces tracés parfois longs de plusieurs kilomètres ne pouvaient
pas a priori avoir de significations pour une civilisation contrainte de
rester au sol.
Des étude détaillées
(mais incomplètes) conduites par les archéologues Paul Kosock
et Maria Reiche
conclurent qu'il s'agissait des traces de relevés en relation avec un calendrier
astronomique ou des messages symboliques à l'intention des dieux, à l'image
des symboles que les Celtes ont tracé en Irlande. Au début des années 2000, Donald
Proulx et Stephen Mabee, respectivement paléontologue et hydrogéologue à l'Université du Massachussetts,
ont suggéré qu'il s'agit de tracés marquant "les sources et le flux des
aquifères souterrains qui transportent l'eau en diagonale à travers les affluents
du drainage du Rio Grande sur la côte sud du Pérou". D'autres chercheurs
ont proposé que les tracés sont en relation avec les anciens lits
de rivières qu'ils recouvrent et la vie sociale des Nazcas.
Mais aucune preuve, aucun artefact, n'a jamais soutenu ces
hypothèses qui finalement furent écartées.
A
partir de 2015, l'archéologue péruvien Markus Reindel
découvrit de nouveaux indices et réfuta ces théories. D'abord,
Reindel et son équipe découvrirent que les géoglyphes sont
formés d'une seule ligne tracée dans le sol. On peut par exemple
commencer par le bec du colibri, suivre le tracé le long de son
aile droite, puis descendre le long son corps et de sa queue pour
remonter vers son aile gauche jusqu'au bec et sortir du motif. Dans
d'autres géoglyphes, on rentre d'un côté, on parcourt tout le
motif en spirale et on ressort du côté opposé.
Ensuite, Reindel et
son équipe découvrirent sur les photos aériennes des sites, des
tumuli placés aux extrémités de plusieurs dizaines de géoglyphes,
notamment des zones en forme de trapèze ou de longues bandes. Sur
ces sites, ils découvrirent des coquilles de spondyles, des bivalves
marins connus pour symboliser l'eau chez certains peuples. Sous les
tumuli de pierre se trouvent des tables d'offrandes en pierre
d'environ 1 mètre de haut. Les chercheurs ont mis à jour des
restes d'offrandes et notamment des pinces de crabe et des tessons
de poterie. Des sondages magnétométriques dans les pistes tracées
au sol indiquent également que leur surface fut damée et est beaucoup
plus tassée que les zones extérieures. Les chercheurs découvrirent
également dans les couches sédimentaires de la région des preuves
qu'une longue période de sécheresse sévit au VIe siècle.
Reindel en déduit que les géoglyphes sont des tracés en relation avec le culte
de l'eau. Au cours des périodes de sécheresse, les Nazcas auraient organisé
des cérémonies pour invoquer le dieu de la pluie et marchaient en procession
dans les géoglyphes. Supportée par les artefacts et les données recueillies
sur le terrain, cette hypothèse est beaucoup plus convaincante que les
précédentes et balaye évidemment l'hypothèse extraterrestre à laquelle
aucune personne sérieuse n'a jamais cru.
Notons
qu'en 2022, grâce à des photographies prises par des drones et aidé
par l'intelligence artificielle, une équipe de chercheurs dirigée par
Masato Sakai de l'Université de Yamagata au Japon annonça la découverte
de 168 nouveaux géoglyphes de grande taille à Nazca dont beaucoup dans
la région d'Aja située au centre de Nazca. Afin de préserver les géoglyphes,
cette zone fut déclarée parc archéologique en 2017. Environ 50% des nouveaux
géoglyphes représentent des figures ressemblant à des humains. A ce jour,
358 géoglyphes ont été découverts mais il en existerait beaucoup plus.
En effet, certains spécialistes estiment que nous n'avons découvert que 5%
des géoglyphes de Nazca (cf. U.Yamagata,
2022; Asahi Shimbun, 2022).
Rappelons
que des géoglyphes du même genre mais plus petits existent également
dans les montagnes désertiques de Bolivie. Leur signification reste inconnue.
A
lire : Le cadre géologique des lignes, dessins et autres géoglyphes de Nazca, Pérou,
P.Thomas/ENS Lyon
Il
en est de même pour les pierres monumentales de Baalbeck, les statues de l'île
de Pâques ou les pyramides d'Egypte : rien à voir avec les
"soucoupes volantes" ou des "cosmodromes" chèrs aux défenseurs de la "théorie des Aliens"...
Mais certains rétorquent comment un peuple primitif aurait-il été
capable de soulever ces pierres sans aide extérieure, comment
ont-ils pu réunir les blocs formant les pyramides avec autant de
précision ?... Des simulations sur le terrain ont prouvé qu'avec
une technique simple et moyennant suffisamment d'hommes, de telles
pierres pouvaient être érigées. Cependant il reste des énigmes, notamment
l'écriture rongorongo découverte sur des tablettes en bois sur l'île de Pâques.
On
peut aussi rappeler certaines fresques et tapisseries médiévales
tout aussi "énigmatiques". Dans un coin, derrière certains
personnages, on distingue des symboles isolés, des sortes de vaisseaux
volants à bord desquels se trouvent des personnages. Sur d'autres continents,
sur certaines fresques des aborigènes australiens ou précolombiennes,
certaines figurines humaines semblent porter un scaphandre. A Palenque,
au Mexique, une dalle de 8 m2
sculptée par les Maya semble représenter un pilote aux commandes de son
vaisseau... Ces indices sont-ils l'interprétation artistique d'une
expression ou les preuves d'une visite extraterrestre ?
Notre inconscient peut ici se révéler notre ennemi. L'étude
scientifique (ethnologique, historique, artistique, théologique,
etc.), objective et réaliste n'apporte parfois que des fragments de
réponse, laissant les chercheurs dans l'expectative. Ce
n'est souvent qu'au bout de plusieurs années ou décennies
de recherches qu'on découvre la véritable explication qui n'a rien
d'extraordinaire au sens scientifique ni de surnaturelle.
L'explication
se fait d'autant plus attendre que le sujet n'intéresse parfois
qu'un couple de spécialistes qui consacre toute sa vie au sujet
(Maria Reiche et Paul Kosoc à propos des pistes de Nasca, Griaule
et Dieterlen à propos des Dogon, etc). Soit ils sont les seuls
experts et leurs collègues se désintéressent de leurs travaux
soit les découvertes et les études sont insuffisantes pour avancer
une explication.
Mais
si la rumeur persiste alors qu'il existe un réel objet d'étude,
une équipe de scientifiques finira par se dévouer pour étudier
systématiquement le sujet et tenter d'apporter toute la lumière sur cette
énigme. Et c'est de cette manière que la plupart des énigmes archéologiques
ont été résolues et que des canulars ont été dénoncés,
souvent plusieurs décennies voire plusieurs siècles après la
découverte. Entre-temps les médias et les ufologues ont eu tout
le temps d'imaginer les histoires les plus fantastiques et de
semer le doute dans l'esprit du public en invoquant la désinformation
ou la conspiration à défaut d'idées constructives.
A
voir : Puma punku mystery solved, ancient aliens debunked
ou
quand des amateurs et des pseudoscientifiques se prennent pour des experts
Comme
l'explique l'astronome Emmanuel Davoust
astronome émérite de l'Observatoire Midi-Pyrénées de Toulouse à propos des conclusions
des ufologues, "toutes ces révélations [à propos des énigmes
archéologiques] sont à prendre avec beaucoup de scepticisme, sinon avec
une complète incrédulité". Sans preuves d'une influence extraterrestre,
nous pouvons effectivement partager son point de vue. Mais avouer
son scepticisme et son incrédulité face à de la pseudoscience
n'était pas un jugement très sévère de sa part. Il aurait été
plus clair de dire que les conclusions extravagantes de ces
ufologues relevent du fantasme et du folklore ! Par ailleurs, en 1988
Davoust disait encore : "un seul cas mérite un examen approfondi, celui
de l'astronomie des dogons".
Rappelons
que les travaux de Marcel Griaule et Germaine Dieterlen sur la cosmogonie
Dogon furent publiés à partir de 1948 et faisaient ostensiblement
référence à un savoir scientifique que les Dogon ne pouvaient pas posséder
en propre. Ils parlaient par exemple des caractéristiques du système de Sirius
et notamment de l'existence d'une étoile naine ainsi que de la forme
spirale de la Voie Lactée, des découvertes que les astronomes venaient
à peine de faire. Or les Dogon n'ont jamais eu le moindre télescope...
Depuis la publication des travaux de Griaule et
Dieterlen, les astronomes avaient donc la quasi certitude qu'il y
avait méprise et que le travail d'investigation à la source avait été
incomplet. Davoust concluait tout de même : "Mais
comme pour les OVNI, nous refusons d'invoquer une intervention
extraterrestre à défaut de trouver d'autres explications
satisfaisantes". Ouf ! La démarche scientifique était
préservée. En effet, il apparut que les Dogon subirent une imprégnation
culturelle étrangère durant plusieurs décennies, notamment de la
part des coloniaux et autres touristes européens de passage dans la
région de Bandiagara ainsi que très probablement de la part de
Griaule lui-même. Ainsi, en prenant connaissance des
découvertes de l'astronomie à travers la lecture ou la narration
d'articles de vulgarisation, l'un ou l'autre Hogon (chef spirituel)
a pu habillement détourner ce savoir de son contexte et donner naissance
à une cosmogonie originale dont, près d'un siècle plus tard, nous avons
presque perdu les origines historiques.
La même situation s'était présentée jusqu'au milieu du XXe
siècle avec certaines peintures rupestres d'Australie que certains auteurs
- des ufologues - ont interprété comme représentant des scaphandres voire
des extraterrestres. Aujourd'hui les ethnologes y compris ceux d'origine
aborigène reconnaissent qu'il s'agit de la représentation chamanique du
dieu du tonnerre tenant des marteaux. Du temps des OVNI nous sommes passé
au "temps du rêve". Pour celui qui connaît la culture aborigène,
cette explication est bien plus réaliste !
Le poète
africain Amadou Hampâté Bâ avec lequel travailla Marcel Griaule faisait remarquer que lorsque
qu'"un homme meurt c'est une bibliothèque qui brûle".
Nous devons nous empresser de recueillir les contes enseignés par
les vieux sages d’Afrique et d’ailleurs car sans preuves
indubitables sur l'origine de leur savoir, leurs commentaires
resteront des anecdotes qui raviveront les palabres. Le risque est
alors grand de voir la rumeur faire acte de foi de ces témoignages
et qu'ils soient déformés avec insouciance, bafouant la science et
le respect du lecteur.
L'attitude rationnelle d'Emmanuel Davoust
et des enquêteurs qui se sont penchés
sur la cosmogonie Dogon doit attirer notre réflexion. S'il y
a des personnes plus enclines à considérer les observations des
journalistes comme matière classée, ces derniers ne considèrent
pas apporter de solutions, mais uniquement des faits plus ou moins
objectivés.
C'est ici que les scientifiques doivent rester objectifs,
sans interpréter les faits ni influencer les réponses de l'environnement
qu'ils étudient. La difficulté est qu'il n'existe pas de séparation
nette entre théorie et croyance. Dans le cas présent, les
scientifiques ont pour vocation d'objectiver les comptes-rendus
qu'ils ont récoltés ou rapportés par des
reporters et de dévoiler les éventuelles supercheries ou erreurs
d'interprétation. Inversement, parfois il est nécessaire que les
scientifiques rectifient les interprétations abusives des
journalistes ou des témoins. Encore faut-il qu'ils n'aient pas de préjugés ou
une attitude équivoque quant à la destination de leurs
recherches. Nous détaillerons ces tâches lorsque nous
aborderons la philosophie des
sciences.
La
science est une école de patience qui repose sur des lois cohérentes
et étayées où l'intuition n'est pas très appréciée quoiqu'en
dise Einstein. Mais la science n'aurait aucun avenir si elle ne faisait pas
d'hypothèses et Newton pourrait nous le confirmer.
A travers des protocoles rigoureux, le chercheur essayera
d'expliquer la nature. Si un phénomène sort des normes, son rôle
sera de l'expliquer avec de nouvelles lois, c'est-à-dire qu'en
partant des faits il cherchera une explication, mais jamais
l'inverse. Si la tâche de chacun est respectée nous comprendrons
peut-être des phénomènes qui aujourd'hui restent incompris et
nous expliquerons bien des énigmes.
Mais
à côté des scientifiques qui influencent volontairement ou non
les passionnés d'ufologie, il a des scientifiques et de soi-disant
"experts" qui émettent des avis critiques a priori objectivés
et documentés mais qui cachent en réalité des pseudoscientifiques
et des mythomanes. Cette influence pseudoscientifique porte un lourd
préjudice à la crédibilité de l'ufologie. Voyons quelques exemples.
Prochain
chapitre
L'influence
pseudoscientifique |