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La Bible face à la critique historique

Caméo intaglio (gravure en taille-douce) romain en onyx et or du IIII-Ve siècle représentant Adam et Ève exposé au British Museum.

Adam et Ève et le Jardin d'Éden

L'histoire d'Adam et Ève et du fameux Jardin d'Éden évoqués dans les quatre premiers chapitres du livre de la Genèse (et représentant environ 50 versets) méritent une attention particulière.

Jusqu'au XXe siècle, ce récit que tous les Juifs, les Chrétiens et les Musulmans connaissent par coeur pour l'avoir entendu ou lu à l'école primaire faisait partie de ces traditions doctrinales qui ne souffraient d'aucune digression, bien que certains croyants acceptaient déjà l'idée qu'il pouvait s'agir d'une légende. Mais personne ne pouvait affirmer que le récit relatait des évènements réels ou inspirés de faits réels pas plus que personne ne pouvait prouver qu'il fut inventé.

Les analyses littéraires du livre de la Genèse réalisées par l'exégète allemand Hermann Gunkel (cf. Israel and Babylon, 1902-1903 et Genesis, 1910) et le jésuite français Pierre Gibert (cf. Bible, mythes et récits de commencement, 1986) ont montré sans équivoque que les rédacteurs ont puisé dans des légendes sumériennes et mésopotamiennes.

Les auteurs de la Genèse présentent le Jardin d'Éden comme le lieu surnaturel où séjournaient Adam et Ève et donc où se situe les origines de l'humanité.

Selon les linguistes, "Éden" vient du mot akkadien "edinu" qui est lui-même dérivé du sumérien "e-din". Ce mot signifie "prairie" ou "steppe". Même chose pour le mot "Paradis" dérivé du grec "Paradaesa" pour lequel les Hébreux ont un synonyme "Gan eden" qu'on retrouve en vieux persan "Gah-e-fin" qui signifie "terrain de chasse délimité" ou "jardin clos". Dans un tel cadre bucolique, on devine aisément la suite de l'histoire.

Selon la tradition juive, le Jardin d'Éden comprend un fleuve qui se divise en quatre bras et précise que "le nom du troisième est Hiddékel; c'est celui qui coule à l'orient de l'Assyrie. Le quatrième fleuve, c'est l'Euphrate" (Genèse 2:14), ce qui situe clairement ce lieu en Mésopotamie.

Pour confirmer ce fait, la Genèse nous apprend qu'Adam fut créé quelque part à l'ouest de la Mésopotamie, puis fut conduit dans le Jardin d'Éden situé à l'est : "en Éden, du côté de l'orient, et il y mit l'homme qu'il avait modelé" (Genèse 2:8). On notera également qu'après avoir assassiné son frère Abel, Caïn, le fils aîné d'Adam et Ève fut maudit par Dieu qui l'envoya vivre "dans la terre de Nod, à l'orient d'Éden" (Genèse 4:16).

"L'Arbre de Vie" évoqué dans la Bible est également un emprunt sumérien généralement asssocié à Adam et Ève comme on le voit ci-dessus à droite.

Représentations de la mythologie sumérienne sur des sceaux-cylindres exposés au British Museum. A gauche, la Création de l'Homme sur le "sceau de Adda", un sceau akkadien découvert à Sippar datant de 2300 avant notre ère sur lequel sont représentés Ninurta, Ishtar, Shamas et Ea. A droite, représentation d'Adam et Ève autour de l'Arbre de la Vie sur le "sceau de la Tentation" datant d'environ 2200-2100 avant notre ère. Le sceau mesure 2.71 cm de hauteur pour 1.45-1.65 cm de diamètre. Il appartient soit à la culture akkadienne soit à la troisième dynastie d'Ur. Ces sceaux sont sculptés dans de la bowenite, surnommée la nouvelle jade, du groupe des serpentines (antigorite). Aujourd'hui, on utilise encore la bowenite pour confectionner des bijoux.

Comme l'explique le scientifique et démystificateur (débunker) américain Anton Parks dans son livre "Eden, la vérité sur nos origines" (2011), ces passages de la Bible ont été extraits de textes cunéiformes et d'illustrations gravés dans des tablettes d'argile plus de 1000 ans avant la rédaction des premiers récits bibliques et copiés lors de la captivité des Hébreux à Babylone (la première fois lors de l'exil en 722 avant notre ère puis en 597 et en 586 avant notre ère).

Notons que dans son livre "Adam & Ève" (2017), le critique littéraire et historien Stephen Greenblatt de l'Université d'Harvard relate l'histoire de ce mythe et de son interprétation de ses origines mésopotamiennes à aujourd'hui à travers le point de vue des ecclésiastiques (saint Augustin), des peintres (Dürer, Le Caravage, Rubens), de poètes (John Milton), d'écrivains (Voltaire), de scientifiques (Charles Darwin) ou encore de féministes (Alexandra Tarabotti, Mary Wollstonecraft) parmi d'autres personnages. Comme quoi on peut être juif Ashkenaze et ne pas croire tout ce qui est écrit dans la Bible !

L'interprétation chrétienne

Le mythe d'Adam et Ève ne s'est pas arrêté là. Nous savons que les chrétiens (et les musulmans) ont également réinterprété cette histoire à leur façon. Dès le début du christianisme, les théologiens et les philosophes se sont interrogés sur les raisons pour lesquelles Dieu créa l’homme et la femme pour ensuite les chasser du Paradis et les condamner à une vie de souffrance.

Les rabbins et les Pères de la Grand Église ont émis différentes opinions sur le sens de cette histoire. Certains la considéraient littéralement et donc authentique puisqu'elle avait a priori été écrite par Moïse (on y reviendra à propos des auteurs de la Torah), d'autres y voyaient une allégorie avec des éléments caractéristiques de la mythologie : un lieu hors du temps, un arbre magique, un serpent qui parle, etc. Les romains se moquaient de ce récit. En revanche, les érudits chrétiens ont défendu cette histoire sous l'argument qu'elle pouvait être interprétée de la même manière que les allégories de Platon.

A voir : La chapelle Sixtine, Rome Passion

Trois représentations du thème biblique d'Adam et Ève extrait du livre de la Genèse mais totalement en opposition. A gauche, les corps séduisants de style Renaissance peints par Albrecht Dürer en 1507. Il s'agit de deux huiles sur bois de pin de 209x81 cm chacune exposées au Musée du Prado à Madrid. L'oeuvre fut restaurée et représentée au public en 2010. Au centre, la fresque de Michel Ange (La tentation et Adam et Ève chassés du Paradis) peinte sur le plafond de la chapelle Sixtine du Vatican en 1508-1512. Selon la tradition catholique, l'arbre dont Adam cueille le fruit est également le bois dans lequel sera taillé la croix du Christ. Notez que dans cette allégorie, l'ange qui s'oppose au diable est un concept présent dès l'origine de l'humanité. A droite, gravure à l'eau-forte de Rembrandt réalisée en 1638. Très loin des canons classiques de l'idéalisation de la Renaissance, cette illustration est audacieuse par l'aspect des personnages. Elle scandalisa au XVIIe siècle et reste encore incomprise pour la majorité du public mais ne scandalise plus. Notez la présence de l'éléphant au pied de l'arbre. A l'époque, il était considéré comme un animal noble et qui joue ici le rôle d'anti-serpent, de symbole christique porteur d'espérance. Il représentait aussi une signification morale. Selon G.P. Valeriano (1556), l'éléphant possède "les attributs de la chasteté, de la mansuétude, de la munificence, de la pietas, de la religio et de la tempérance" et était aussi considéré par Pline comme "la beste la plus digne qui vive sur la terre et qui a le plus de sens". L'intrus dans la scène ajoute ainsi une leçon de psychologie conjugale doublée d’une discrète homélie sur la fidélité. Voici une analyse complète de ce tableau.

Aussi, au cours des siècles qui suivirent, pour différencier l'histoire d'Adam et Ève des hérésies comme l’"Apocalypse d’Adam" (IIe.s.) qui décrit un Dieu dépassé par son oeuvre où Ève prend l'ascendance sur Adam, le philosophe juif hellénisé Philon d’Alexandrie (-25 avant notre ère à 50 de notre ère) réinterpréta les textes bibliques selon ce qu'on appelle les "catégories" de la connaissance hellénistique et proposa de prendre ce récit biblique comme une allégorie.

Plus tard, saint Augustin (354-430) réinterpréta le mythe d'Adam et Ève et développa les raisons réelles pour lesquelles ils furent chassés du Paradis. Selon Augustin, c'est la culpabilité du péché originel qui frappa l'humanité et qui par la suite pesa lourdement tout au long de l’histoire du christianisme. En effet, avant Augustin personne n’avait accordé à ce mythe une importance doctrinale. Or, Augustin fut le premier qui accusa la femme d'avoir péché en succombant aux paroles du serpent et d'avoir séduit l'homme. Autrement dit, la misogynie de l'Église et son problème avec la sexualité sont nés avec saint Augustin qui fit de la transgression d'Ève une sorte de "tare biologique" qui expliquait tous les maux de l’existence que subissaient ses descendants.

Étonnemment, les révoltes sociales du XIVe siècle se sont emparées de l'histoire d'Adam et Eve pour en proposer une interprétation révolutionnaire. Ainsi, en 1381 le prêtre anglais John Ball lança son fameux mot d'ordre : "Quand Adam bêchait et Eve filait, où donc était le gentleman ?" Ball fut exécuté pour cette insolente critique envers l'autorité mais sa question refit jour au XVIIe siècle lorsque les révolutionnaires se battirent pour revendiquer l'égalité et la liberté d'avant la Chute, laquelle conduisit à la tyrannie des rois d'Angleterre. Dans l'esprit des révolutionnaires, le fruit défendu n'était pas la pomme mais la propriété privée, une autre pomme de discorde.

Il faudra attendre l'ouverture d'esprit et le génie des artistes de la Renaissance (XVe-XVIIe siècle) comme Dürer, Le Caravage ou Rubens pour rendre leur dignité à Adam et Ève et replacer ce récit à la place réelle qu'il n'aurait jamais dû quitter, celui d'un mythe, n'en déplaise aux Créationnistes et aux personnes sectaires notamment des Églises américaines qui interprètent encore littéralement le texte de la Genèse.

Enfin, c'est grâce au poète anglais John Milton auteur du "Paradis Perdu" (1667) que ce mythe de la création devint un conte épique exprimant la liberté fondamentale de l’homme de choisir et en particulier de désobéir aux interdits. Finalement, la lutte contre le sexisme se transforma en mouvement féministe dès la fin du XIXe siècle, un combat pour l'égalité des genres qui est toujours d'actualité.

A lire : Paradise Lost, John Milton, 1667, Project Gutenberg

Le fruit défendu était-il vraiment une pomme ?

Dans l'Ancien Testament ou la Torah, on évoque dans un verset du livre de la Genèse un arbre portant un fruit défendu : "Et l'Eternel dit : Qui t'a appris que tu es nu ? Est-ce que tu as mangé de l'arbre dont je t'avais défendu de manger ?" (Genèse 3:11). La scène se déroule peu de temps après que Dieu ait averti Adam de ne pas manger de "l'arbre de la connaissance" (Genèse 2:9). Cependant, le serpent rusé du jardin d'Éden leur dit qu'ils n'en mourraient point, ce qui convainquit Ève de prendre le fruit et d'en manger puis de le partager avec Adam (Genèse 3:6).

Le "fruit défendu" était-il vraiment une pomme comme l'affirme l'Église ? Rien ne permet de l'affirmer car la Genèse évoque simplement un "fruit" sans l'identifier. Et aucun autre livre biblique ne précise quel était ce fruit.

Reprenons le texte original de la Torah (Bereshit, section shlishi qui correspond aux versets de la Genèse 2:20 à 3:21). Le mot hébreu utilisé dans ces versets est "peri" (פרי), un mot générique pour fruit en hébreu biblique et moderne. Le mot hébreu moderne pour pomme est "tapuach" (טאפוח) mais il n'apparaît dans aucun des cinq premiers livres de la Bible hébraïque (mais il apparaît dans d'autres textes bibliques écrits par la suite). Si le "fruit défendu" n'était pas une pomme, de quoi peut-il s'agir ?

A gauche, la Torah ouverte sur Bereshit ("בראשית" signifiant "Au commencement"), c'est-à-dire le livre de la Genèse, complétée par des commentaires rabbiniques. Elle fut imprimée à Venise vers 1546-48 chez l'imprimeur Daniel Bomberg. Document de la collection biblique Elizabeth Perkins Prothro. Au centre, détails de "La Chute" de l'homme (ou La Chute de la Grâce) de Hugo van der Goes peinte après 1479. C'est le panneau de gauche du diptyque de "La Chute et de la Rédemption". Huile sur chêne de 33.8x23 cm exposée au Musée d'Histoire de l'Art de Vienne, en Autriche. A droite, illustration d'Adam et Ève réalisée par Giulio Clovio pour le Livre d'heures du cardinal Alessandro Farnese, achevé en 1546. L'ouvrage est exposé à la Pierpont Morgan Library de New York (réf. MS. 69, fol. 27).

Dans le Talmud de Babylone compilé par la Diaspora après l'Exode en Mésopotamie vers 500 avant notre ère et qui rassemble des lois juives (la Mishna), des commentaires de la Bible hébraïque (la Gémara), des enseignements rabbiniques et d'autres écrits, les rabbins ont noté plusieurs commentaires à propos de ce que serait ce fruit, mais.... la pomme n'en fait pas partie !

Au fil du temps et des discussions, les rabbins ont écrit que le fruit aurait pu être une figue, car dans la Genèse, Adam et Ève ont utilisé des feuilles de figuier pour se couvrir (Genèse 3:7). Ils ont aussi écrit que c'était du blé, parce que le mot hébreu pour blé, "chitah" (חיטה), est phonétiquement et orthographiquement proche du mot péché, "cheit" (חטא). Ils proposèrent également qu'il pourrait s'agir de raisins et même du vin de raisins.

Enfin, les rabbins ont écrit qu'il pourrait s'agir du cédrat ou "etrog" (אֶתרוֹג) en hébreu, un fruit aigre-doux ressemblant à un gros citron. Le cédratier (Citrus medica) est originaire des contreforts de l'Himalaya. Le cédrat fut exporté au Moyen-Orient (en Médie, la future Perse) vers le VIe siècle avant notre ère et vers l'Asie du Sud-Est et Orientale avant de séduire les Grecs et puis le reste du monde. Le cédrat était donc connu des Hébreux d'Israël en raison de leur commerce avec les Perses et les Assyriens.

Un cédratier (Citrus medica) du Jardin Botanique de Karlsruhe, en Allemagne, portant des cédrats ou etrogs en hébreu. Document H.Zell.

Le cédrat est utilisé pendant la fête juive de Souccot (ou fête des Tentes qui remonte à l'Exode et qui se célèbre en automne à partir du 15 tishri). Mais cette interprétation ne provient probablement pas de la tradition juive. En effet, dans le Lévitique on trouve une liste de quatre espèces de plantes qu'il faut consommer en l'honneur de la fête de Souccot : "Vous prendrez le premier jour un fruit de l'arbre de hadar, des branches de dattier, des rameaux de myrte et des saules de rivière" (Lévitique ou Vayikra 23:40). Par tradition, les juifs considèrent que "le fruit de l'arbre de hadar" désigne le cédrat. Mais d'un point de vue judaïque, l'usage de ce fruit est très restrictive car selon la Loi seul le cédrat, à l'exclusion de tout autre agrume, peut être employé lors de la mitsva (l'application des ordonnances et prescriptions juives). Ce n'est donc pas le fruit qu'on cherche.

La pomme est originaire du Kazakhstan (cf. N.Duan et al., 2017) et on trouve encore des pommiers sauvages (Malus sieversii) en Asie centrale dans les quelques rares bois indigènes qui subsistent, en particulier dans les montagnes du Tian Shan situées au nord-ouest du bassin du Tarim où se trouve le désert du Taklamakan. C'est l'hybridation de cette espèce très ancienne qui existait déjà il y a 80 millions d'années qui donna les quelques 11000 variétés de pommes mais dont une centaine de variétés sont encore cultivées. Le pommier est domestiqué depuis 4000 à 10000 ans. Les pommes furent exportées vers l'Europe il y plus de 2000 ans grâce à la Route de la Soie, ce qui permit son hybridation et son introgression avec des variétés de Sibérie, du Caucase et d'Europe.

Mais comment la pomme qui n'est même pas originaire du Moyen-Orient est-elle devenue l'interprétation dominante du "fruit défendu" ?

Si l'explication ne se trouve pas dans le texte hébreu original, examinons ses traductions.

En 382 de notre ère, le pape Damase demanda à Jérôme de Sidron de traduire la Bible en latin (cf. La Transmission de la Bible). Dans la bible "Vulgate", Jérôme traduisit le mot hébreu "peri" par le mot latin "malum" (Genesis 3:5). Jérôme a probablement choisi le mot "malum" car il peut aussi signifier le mal (c'est d'ailleurs sa première traduction en français) qu'on retrouve dans l'expression biblique "bonum et malum" (le bien et le mal) de la Genèse. Quelques versets plus loin, conformément au texte original Jérome utilise les mots "ex ligno" c'est-à-dire "[le fruit] de l'arbre". Jérome a donc fait un jeu de mots habile, faisant référence au fruit associé à la première "grosse erreur" de l'humanité à travers le mot "malum" à double sens.

Sur le plan éthymologique, en français, le mot "pomme" a le sens qu'on lui connaît aujourd'hui au moins depuis l'an 1100 (cf. CNRTL). C'est seulement au XIVe siècle qu'on associe la pomme au fruit défendu dans les récits religieux (cf. Robert Grosseteste, "Château d'Amour", 1355; Personnages, "Miracles de Nostre Dame", éd. G.Paris et U.Robert, XVI, 819, 1876).

Dans les versions anglaises de la Vulgate, dans la traduction jugée hérétique de John Wycliffe (c.1329-1384) et par conséquent les nombreux lecteurs anglo-saxons des siècles suivants, "fructus arboris pulcherrimae" signifiait en vieil anglais "fruytis of the faireste tree" (le fruit du plus bel arbre), un superlatif que certains juifs ont également repris indépendamment.

En vieil anglais "apple" signifie "n'importe quel fruit, le fruit en général". C'est un mot emprunté aux langues proto-germaniques "ap(a)laz" et au vieux haut allemand "apfel". Selon les linguistiques, "En moyen anglais et jusqu'au 17e siècle, c'était un terme générique pour tous les fruits autres que les baies, y compris les noix [...]. D'où sa greffe sur le "fruit de l'arbre défendu" sans nom dans la Genèse" (cf. Online Etymology Dictionnary).

Par la suite, les artistes ont contribué à renforcer cette symbolique en utilisant la pomme pour représenter le fruit défendu qui n'est plus du tout un fruit générique qui de toute façon ne serait pas représentable. Il existe cependant quelques peintures classiques représentants d'autres fruits.

A gauche, le "Retable de Gand" réalisé par Jan van Eyck (et peut-être Hubert van Eyck) en 1432 montre Ève tenant un cédrat. Au centre, un agrandissement. Voici la version large (18.4 MB). Le retable est un polytypique composé de 24 parties peintes sur 10 panneaux en bois de chêne. Ouvert, il mesure 3.40x5.20 m. Il est exposé dans cathédrale de Saint Bavon à Gand, en Belgique. C'est une huile sur toile améliorée par van Eyck en ajoutant de l'essence de térébenthine pour donner plus de transparence à sa peinture. A droite, le tableau "Ève Tentée par le Serpent" réalisé par Defendente Ferrari en 1520-25 montre Ève tenant un abricot. Tempera sur bois de 36.7x35.7 cm. Il est exposé au Musée d'Art de l'Université du Michigan.

Le "Retable de Gand" réalisé par Hubert et Jan van Eyck en 1432 montre Ève tenant un cédrat dans sa main gauche. Le tableau "Ève Tentée par le Serpent" réalisé par Defendente Ferrari en 1520-25 montre un abricot tandis que "La Chute de l'Homme" de Pierre Paul Rubens peinte en 1628-29 montre une grenade.

Pourtant, au XVIe siècle, la pomme faisait déjà partie de la coupe des fruits proverbiale. En 1504 par exemple, une gravure d'Albrecht Dürer et une peinture de Lucas Cranach l'Ancien de 1533 représentaient le "fruit défendu" comme une pomme. Enfin, dans son poème épique "Le Paradis perdu" publié en 1667, John Milton utilise le mot "pomme" à deux reprises pour désigner le fruit défendu (Livre II v.349 et Livre X v.387).

Si seulement c'était le fameux "Franken-tree" ou "arbre de Franken", un arbre greffé moderne planté à Newton, dans le Massachusetts, portant 40 types de fruits imaginé par Sam Van Aken, professeur à l'Université de Syracuse et artiste. L'arbre fructifia pour la première fois en 2015. Mais il n'existait évidemment pas à l'époque biblique, mais c'était le cas, cela aurait pu répondre à notre question qui reste donc à jamais ouverte.

Le Déluge et l'Arche de Noé

Le Déluge et l'Arche de Noé relatés dans le livre de la Genèse aux chapitres 6 à 9 sont un autre exemple d'histoire détournée au profit du judaïsme. Pour ne pas alourdir cet article, on reviendra en détails sur le sujet qui attise toujours les passions dans l'article suivant.

A lire : Le Déluge et l'Arche de Noé

Sodome et Gomorrhe

Un autre récit encore plus étrange est celui de la Genèse décrivant la destruction des ville de Sodome et Gomorrhe situées le long de la mer Morte. Selon la tradition, Yahvé punit son peuple pour ne pas avoir respecté la plus sacrée de toutes les lois orientales, celle de l'hospitalité : "Yahvé fit pleuvoir sur Sodome et Gomorrhe du soufre et du feu" (Genèse 19:24).

Dans plusieurs sites archéologiques pouvant correspondre à la description biblique situés tant au nord qu'au sud de la mer Morte, les archéologues ont trouvé d'importantes couches de cendres, des fragments d'os ou des débris calcinés, des tessons et du sable vitrifiés comme si une forte chaleur s'était abattue sur la région. De toute évidence, ces traces ne peuvent pas être le résultat d'une bataille.

Vu la complexité du sujet, nous prendrons le temps d'analyser séparément cette "manifestation du courroux divin" qui sort vraiment de l'ordinaire et tenterons de l'expliquer par la science.

A lire : Sodome et Gomorrhe

En résumé, dans les récits de la Genèse il n'a jamais fallu d'intervention divine pour les expliquer. Mais tout bien considéré, s'il faut bâtir une belle histoire, les premiers rédacteurs de la Torah avaient tout intérêt à inventer et tout au mieux à embellir et détourner des mythes et quelques faits historiques restés dans la mémoire collective pour construire leur nouvelle théologie. On y reviendra.

Quant aux miracles et autres mystères relatés dans l'Ancien Testament, les exégètes et les scientifiques reconnaissent que les textes bibliques peuvent aussi être interprétés à plusieurs niveaux. Tous ceux qui ont étudié la Bible savent que dans l'Antiquité, dans tout le Proche-Orient le "miracle" était considéré comme une figure de style plutôt qu'une réalité, comme aujourd'hui la métaphore ou l'analogie peut éclairer son sujet. On reviendra sur le sujet à propos des prophéties et des miracles et des apparitions attribués à Jésus.

A lire : Les patriarches et l'Exode

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