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Les sondages du ciel profond
Aux frontières de l'Univers (II) Le programme CLASH A partir de 2011 et durant 3 ans, les astrophysiciens ont disposé du programme CLASH (Cluster Lensing And Supernova survey with Hubble) pour identifier les galaxies les plus lointaines mais pas uniquement. Ce sondage allie la puissance du Télescope Spatial Hubble à l'effet amplificateur des lentilles gravitationnelles présentes dans les 25 amas de galaxies les plus massifs. CLASH accomplit ses quatre principaux objectifs scientifiques : - Cartographier la distribution de la matière sombre dans les amas de galaxies en utilisant des lentilles gravitationnelles fortes et faibles - Détecter les supernovae de Type Ia jusqu'au décalage vers le rouge z ~ 2 afin de mesurer le rôle de l'énergie noire au fil du temps et de rechercher d'éventuels effets évolutifs dans les supernovae elles-mêmes - Détecter et caractériser les galaxies lointaines à z > 7, lorsque l'Univers avait moins de 800 millions d'années - Étudier la structure interne et l'évolution des galaxies dans et derrière ces amas. Le programme CLASH s'est vu attribuer un total de 525 orbites de temps sur le HST pour effectuer ses observations. Les observations de ces 25 amas se sont déroulées sur une période de 2.7 ans entre novembre 2010 et juillet 2013. Cette méthode de recherche a rapidement porté ses fruits. C'est ainsi qu'on découvrit en 2011 la galaxie MACS0647-JD à z = 10.8. Les images des amas de galaxies furent acquises à l'aide de la caméra ACS et des canaux UVIS et IR de la caméra à champ large WFC3 du HST. Toutes ses données sont aujourd'hui disponibles dans les archives MAST. A voir :
Einstein's Rings and the Fabric of Space Le programme Frontier Fields En 2012, un groupe d'astronomes comprenant des membres du STScI exploitant le Télescope Spatial Hubble (HST) et de divers instituts scientifiques (NASA, NOAO, Yale, INAF, etc) proposa une nouvelle méthode d'investigation pour sonder les frontières de l'univers inaccessibles au HST. En effet, comme nous l'avons expliqué à propos de GOODS, au-delà de z ~ 9.3 soit une distance propre d'environ 13.2 milliards d'années-lumière, en raison de son diamètre et de son spectre limités, le HST est incapable d'observer des galaxies plus pâles, même s'il augmente le temps d'intégration d'un million de minutes pour augmenter la qualité du signal. De ce fait, certains objets lointains apparaissent soit comme un pixel pâle sur les photos du HST qui est incapable d'en révéler les détails soit il ne les enregistre tout simplement pas. En revanche, le télescope spatial Spitzer travaillant jusqu'en infrarouge lointain peut pénétrer plus profondément dans l'univers et observer ces galaxies très lointaines avec une meilleure résolution. Il peut le cas échéant en obtenir un spectre exploitable afin de calculer la distance de l'objet. Mais depuis cette époque, le JWST offre des performances largement supérieures. Le projet du STScI auquel participe l'Europe s'est concrétisé en 2014 par le programme Frontier Fields (Les Champs Frontières). Ce programme qui comprend 840 orbites du HST répartis sur 3 ans a pour but de permettre aux astronomes d'étudier les amas de galaxies lointains et de découvrir dans la continuité du programme CLASH de nouvelles galaxies primitives et d'autres quasars grâce à l'effet amplificateur des lentilles gravitationnelles. Grâce à Frontier Fields, aujourd'hui les astronomes peuvent étudier le ciel ultra profond (Ultra Deep Field ou UDF) en haute résolution sans être limités par les contraintes spectrales dans toutes les longueurs d'ondes comprises entre 200 nm (UV) et 50000 nm ou 50 microns (IR lointain) ainsi que les rayons X grâce à trois télescopes travaillant de manière complémentaire : - En optique (visible et infrarouge) dite lumière blanche grâce au HST dont le miroir primaire mesure 2.40 m de diamètre et offrant une résolution de 0.1". Depuis 2009, il est équipé de plusieurs caméras rassemblées dans deux systèmes, WFC3 et ACS couvrant le spectre entre 200 et 1000 nm ainsi que le proche infrarouge entre 800 et 1700 nm. Le HST dispose également d'un imageur et d'un spectromètre (NICMOS, STIS) sensibles au proche infrarouge et à l'ultraviolet (COS). Concernant l'étude spectrale, l'un des systèmes de raies les plus faciles à détecter à grande distance est la série de Lyman de l'hydrogène. Sur Terre (référentiel statique), la raie Lyman α par exemple se trouve dans la partie UV du spectre, à 121.56 nm. Lorsque les galaxies présentent un décalage Doppler z > 8, cette raie d'émission est décalée au-delà de 1160 nm, dans le proche infrarouge ! La série de raies de Lyman est très importante car elle représente la signature caractéristique d'un gaz d'hydrogène chauffé par le rayonnement UV des jeunes étoiles présentes dans les galaxies évoluant dans cet Univers primitif mais aussi par la fusion de petites galaxies naines situées sur la ligne de visée. On y reviendra. - En rayonnement infrarouge grâce au télescope spatial Spitzer dont le miroir primaire mesure 85 cm de diamètre. Il est couplé à un imageur photométrique sensible au proche et moyen infrarouges (3-8 microns), un spectroscope infrarouge (5-40 microns) et un spectrophotomètre sensible à l'infrarouge lointain (50-160 microns). Grâce à sa sensibilité en infrarouge, il complète le HST lorsque celui-ci arrive à ses limites (photographiques ou spectrales). - En rayonnement X grâce au satellite Chandra destiné à étudier les émissions des sources les plus chaudes ou les plus violentes du cosmos et indirectement de tracer le gaz chaud intra-amas et la matière sombre en collaboration avec le HST. A consulter : Frontier Fields.org Rappelons que le HST n'est plus entretenu depuis 2013 et est à court de liquide de refroidissement pour les capteurs photosensibles notamment. Il continue donc de fonctionner au mieux en mode "chaud". A partir de juillet 2022, il fut progressivement remplacé par le télescope spatial James Webb (JWST). Depuis 2010, grâce à ses capteurs infrarouges, le HST est capable de sonder l'Univers primitif jusqu'au-delà de z = 11 soit plus de 13.4 milliards d'années-lumière ou environ 400 millions d'années après le Big Bang. Par comparaison, le JWST de 6.5 m de diamètre lancé le 25 décembre 2021 est capable de sonder l'univers profond jusqu'à des redshifts z ~ 20 à 30 ou environ 200 millions d'années après le Big Bang. Il devra notamment confirmer tous les redshifts les plus élevés ainsi que les redshifts photométriques et spectroscopiques à basse résolution des objets du ciel profond. Le sondage RELICS Construit sur les bases des sondages CLASH et Frontier Fields précités, le sondage RELICS (Hubble's Reionization Lensing Cluster Survey) fut proposé en 2017 par le STScI (Space Telescope Science Institute), un institut fondé par la NASA dans le but d'exploiter les grands télescopes spatiaux. RELICS combine les performances du Télescope Spatial Hubble pour la partie visible et de Spitzer pour l'infrarouge. Ce sondage vise à étudier les galaxies lointaines grâce à l'effet de lentille gravitationnelle produit par les amas de galaxies situés dans la ligne de visée. RELICS fut le premier sondage qui détecta les plus brillantes galaxies connues ayant existé durant le premier milliard d'années de l'Univers vers z ~ 6 (cf. B.Salmon et al., 2017). On lui doit aussi la découverte de la galaxie la plus lointaine déformée par l'effet d'une lentille gravitationnelle à z ~ 10, soit 500 millions d'années après le Big Bang (cf. B.Salmon et al., 2018). Ces objets sont des objectifs prioritaires pour le télescope spatial James Webb et le réseau radioastronomique ALMA.
Comme GOODS, CANDELS, CLASH et Frontier Fields, RELICS nous a livré des images extraordinaires des amas de galaxies et des jeunes galaxies évoluant dans l'univers profond (cf. RXC J0142.9+4438, SPT0615-JD et les amas de galaxies présentés ci-dessus). Les premières publications basées sur les données du sondage RELICS datent de 2018. Le sondage DECaLS Le sondage DECaLS (Dark Energy Camera Legacy Survey) fut proposé en 2013 et est opérationnel depuis 2016 (cf. Coll. DES, 2016). Il exploite la caméra à énergie sombre DECam de 570 mégapixels fabriquée par le Ministère de l'Énergie américain, montée sur le télescope Víctor Blanco de 4 m de la NSF installé à l'Observatoire Interaméricain de Cerro Tololo (CTIO) au Chili. En raison de la combinaison d'un large champ et d'une sensibilité spectrale élevée entre 400 et 1000 nm, la DECam est également un outil très performant pour la photométrie dans les bandes g à 486 nm, r à 621 nm et z à 868 nm. L'objectif de DECaLS est de produire un modèle d'inférence du ciel extragalactique dans l'optique et l'infrarouge, c'est-à-dire une reconstruction statistique et analytique de la distribution des galaxies et des structures cosmiques à partir des observations effectuées dans différentes bandes spectrales. Les sondages Legacy Surveys originaux (MzLS, DECaLS et BASS) ont réalisé des observations dédiées d'environ 14000 deg2 de ciel extragalactique visible depuis l'hémisphère nord dans trois bandes optiques (g, r, z), qui ont été complétées par quatre bandes infrarouges prises par le télescope spatial NEOWISE. Un premier programme "The DECam Legacy Survey of the SDSS Equatorial Sky" bénéficia de 64 nuits sur trois ans à partir de 2014 pour photographier uniquement la zone équatoriale existante du sondage SDSS-III. La DECam a fourni les images pour le ciblage de 75% de la zone couverte par l'instrument DESI (The Dark Energy Spectroscopic Instrument), couvrant à la fois la région du pôle nord galactique nord jusqu'à ~32° de déclinaison et la région du pôle sud galactique sud jusqu'à ~-34° de déclinaison. Le programme d'imagerie fut complété par un total de 157 nuits pour élargir les données à la zone équatoriale complète de DESI. Ce programme s'acheva en mars 2019. Le programme DECaLS utilise également d'autres données de la DECam pour couvrir la zone d'étude de DESI. Les plus importantes proviennent du sondage DES (Dark Energy Survey) opérationnel entre 2013 et 2019, qui comprend une zone contiguë de 5000 degrés degrés dans la région du pôle sud galactique. En 2025, DECaLS avait publié sa dixième distribution (DR10). Le sondage DESI Le sondage DESI Legacy Imaging Survey (Dark Energy Spectroscopic Instrument) utilisa initialement le télescope Nicholas U. Mayall de 4 m de diamètre de l'Observatoire National du Kitt Peak (KPNO) installé en Arizona. Il s'agit d'une collaboration internationale. DESI est opérationnel depuis 2019. Au cours de son exploitation, DESI (The Dark Energy Spectroscopic Instrument) a produit un catalogue du ciel extragalactique optique (visible et IR) visible depuis l'hémisphère nord dans trois bandes optiques (g à 486 nm, r à 621 nm et z à 868 nm) et quatre bandes infrarouges. La couverture du ciel est comprise entre les déclinaisons de -18° à +84° (|b| > 15° en coordonnées Galactiques). La neuvième et dernière publication (DR9) des données fut publiée en 2021. Le résultat est la création de la plus grande carte bidimensionnelle du ciel en termes de couverture du ciel, de sensibilité et du nombre total de galaxies cartographiées. La carte couvre la moitié du ciel et comprend plus de 1.6 milliard de galaxies et plusieurs millions de quasars. A voir : DESI Legacy Imaging Survey (DR9, jan 2021) (carte contenant plus d'un milliard de galaxies)
La nouvelle carte est le résultat d'un projet ambitieux qui dura 6 ans impliquant 1405 nuits d'observations au foyer de trois grands télescopes, des années de données enregistrées par les télescopes spatiaux et la collaboration de 150 observateurs et 50 autres chercheurs du monde entier. La carte totalise 4.3 millions d'images qui représentent 1 pétabyte de données (1015 octets) et 100 millions d'heures de processeur sur le superordinateur "Cori", un Cray XC-40 d'environ 30 PFLOPS exploité depuis 2017 par le Centre National de Calcul Scientifique de Recherche Energétique (NERSC) du Berkeley Lab. La carte fut réalisée en compilant des images optiques prises par la caméra Mosaic3 du télescope Mayall de 4 m précité et par la caméra DECam du télescope Victor M. Blanco de 4 m de l'Observatoire Interaméricain de Cerro Tololo (CTIO), complétées par des images IR du télescope spatiale WISE (Wide-field Infrared Survey Explorer) de la NASA. La carte contient également les données du sondage BASS (Beijing-Arizona Sky Survey) réalisé avec la caméra 90Prime installée sur le télescope Bok de 2.3 m du KNPO de l'Université de l'Arizona. Les données furent réduites au centre NERSC du Berkeley Lab. Le programme fut codirigé par Arjun Dey du projet DESI dans le cadre du programme NOIRLab (National Optical-Infrared Astronomy Research Laboratory) de la NSF. Mais les astronomes ne se sont pas arrêtés à ce résultat et ont déjà lancé un nouveau projet de cartographie 3D du ciel profond. Les astronomes de la collaboration DESI ont sélectionné 35 millions de galaxies et 2.4 millions de quasars jusqu'à z ~ 4 soit environ 1.6 milliard d'années après le Big Bang pour une étude plus approfondie avec DESI afin de construire la plus grande carte 3D jamais réalisée grâce au superordinateur du NERSC. DESI prendra également le spectre de chaque objet céleste. L'enregistrement de ces spectres est un autre défi pour lequel les spécialistes ont fait appel à un réseau de 5000 robots automatisés pivotants, chacun portant une fibre optique pointant sur une galaxies individuelle afin d'enregistrer en une seule exposition le spectre de 5000 galaxies. Le nouveau projet est dirigé par le KPNO. Il débuta le 15 mai 2021 et durera 5 ans. Les chercheurs espèrent que les résultats fourniront de nouvelles informations sur la mystérieuse énergie sombre qui semble à l'origine de l'expansion accélérée de l'Univers. Selon Adam Bolton, directeur du Community Science and Data Center de NOIRLab, "Pour résoudre certains des plus grands mystères de la physique fondamentale, aujourd'hui nous sommes poussés à créer d'énormes bases de données d'étoiles et de galaxies, qui à leur tour permettent une nouvelle approche de l'exploration de données et de faire de nouvelles découvertes astronomiques." Ensuite, après avoir constaté à quel point le Télescope Spatial Hubble (HST) mis en orbite en 1990 était performant (après avoir corrigé sa myopie), dans les années 2000 de nombreuses équipes d'astronomes ont voulu mener leurs propres recherches au moyen de ce télescope et d'autres mis en orbite, ce qui conduisit au lancement de nombreux sondages, avec pour ainsi dire pratiquement un sondage par sujet d'étude et autant de catalogues spécifiques qui se comptent aujourd'hui à plus d'une centaine pour les objets du ciel profond, sans compter les catalogues stellaires ou propres à la Voie Lactée. On y reviendra. Le sondage UNCOVER Après le lancement du JWST fin 2021 débuta le sondage UNCOVER (Ultradeep Nirspec and NIRCam ObserVations before the Epoch of Reionization). Il fait partie des sondages du cycle 1 du JWST qui permet d'obtenir une imagerie multibande NIRCam approfondie et une spectroscopie NIRSpec/PRISM ultra-profonde à basse résolution du champ de l'amas de galaxies de Pandore, Abell 2744, préalablement sondé par les équipes du programme "Frontier Fields" du HST précité. La mission de UNCOVER vise 5 objectifs dont deux principaux : 1. Identifier les premières galaxies à z > 10 2. Caractériser les galaxies à très faible luminosité qui conduisent à la réionisation à z ~ 6-7 dont la fonction de luminosité UV vers z ~ 6 qui fait débat. Ensuite viennent des études complémentaires : 3. Des études complètes de la masse stellaire jusqu'à z ~ 10 ou une distance propre de 13.2 milliards d'années-lumière 4. Sonder le rôle de la poussière aux redshifts élevés (dans les galaxies DOG et autres DSFG) jusqu'à z = 9 5. Etudier les différentes voies de la formation des étoiles jusqu'aux premiers temps. C'est notamment grâce à ce sondage qu'on découvrit en 2023 le trou noir supermassif le plus éloigné situé à z ~10.3 ou une distance propre de ~13.26 milliards d'années-lumière au coeur du quasar UHZ1 situé loin derrière l'amas de Pandore. On y reviendra. Le sondage GLASS Le sondage GLASS (Grism Lens-Amplified Survey from Space) démarra en 2022 et est conçu pour atteindre les objectifs des programmes ERS (Early Release Science) du JWST. Son objectif est de répondre à deux questions scientifiques clés, à savoir : - Quelles sources ont ionisé l'Univers et quand ? - Comment les baryons parcourent-ils les galaxies ? tout en permettant également une grande variété d'investigations scientifiques de premier plan. GLASS exploite la spectroscopie NIRISS et NIRSpec du JWST pour analyser les galaxies de l'amas de Pandore, Abell 2744, situé dans la constellation du Sculpteur préalablement sondées dans le cadre du programme Frontier Fields du HST. En parallèle, il utilise la NIRCam du JWST pour observer deux champs décalés par rapport au centre de l'amas, où l'effet amplificateur de la lentille gravitationnelle est négligeable, et qui peuvent donc être effectivement considérés comme des champs vides (cf. T.Treu et al., T.Treu et al., 2022). Le sondage CEERS Le sondage CEERS (Cosmic Evolution Early Release Science) fut proposé en 2017 (cf. S.L. Finkelstein et al., 2017). Depuis juillet 2022, il utilise le JWST et cible certains champs de données multi-longueurs d'ondes du programme CANDELS du HST dans la constellation du Bouvier. CEERS couvre 100 minutes d'arc2 et exploite les systèmes d'imagerie NIRCam et MIRI ainsi que les moyens spectroscopiques (NIRSpec R~100 et R~1000 et le grism sans fente NIRCam (R~1500) du JWST. CEERS est conçu pour atteindre les objectifs des programmes ERS (Early Release Science). Il a pour mission d'utiliser le JWST pour explorer l'époque de la première lumière et de la réionisation de l'Univers ainsi que la formation et le regroupement des galaxies, ce qui comprend les objectifs suivants : 1. La découverte de 20-80 galaxies à z ~ 9-13 et déterminer leur abondance et leur nature physique. 2. Enregistrer des spectres en haute résolution de plus de 400 galaxies à z > 3, dont 40 candidates connues à 6 < z < 9 afin de définir des contraintes sur les conditions physiques de formation d'étoiles et la croissance des trous noirs supermassifs. 3. Quantifier les premières structures galactiques (renflement central et disque des galaxies) à z > 3. 4. Caractériser l'émission IR moyen des galaxies pour étudier la formation des étoiles obscurcies par la poussière et la croissance des trous noirs supermassifs à z ~ 1-3. Les données du CEERS sont accessibles au public qui peut donc apporter sa modeste contribution à la découverte de galaxies primitives. Le sondage JADES (JWST Advanced Deep Extragalactic Survey) fut imaginé en 2015 par les membres ce qui deviendra la collaboration JADES avec l'objectif d'exploiter le JWST. Il représente l'un des plus principaux et des plus vastes programmes scientifiques mis en place durant le Cycle 1 du JWST (cf. D.J. Eisenstein et al., 2023). Selon Marcia Rieke de l'Université de l'Arizona à Tucson, co-responsable du programme JADES, "avec JADES, nous voulons répondre à de nombreuses questions, comme : Comment se sont assemblées les premières galaxies ? À quelle vitesse ont-elles formé des étoiles ? Pourquoi certaines galaxies cessent-elles de former des étoiles ?"
JADES va consacrer 770 heures soit environ 32 jours du cycle 1 du JWST pour explorer en infrarouge et par spectroscopie les champs profonds GOODS-S et GOODS-N afin d'étudier l'évolution des galaxies à haut redshift (z > 10) jusqu'au "Midi Cosmique", une époque située vers z = 1.7 remontant à 10 milliards d'années et espérer découvrir et caractériser des galaxies lointaines et peu lumineuses. Dans la zone du ciel GOODS-S explorée précédemment par le HST dans le cadre du programme Hubble Ultra Deep Field (HUDF) et du Chandra Deep Field South (CDFS), JADES enregistrera des images du ciel profond couvrant un champ d'environ 45 minutes d'arc2 à travers 9 filtres avec un temps d'intégration moyen total de 130 heures. Il enregistrera égalements des images des zones GOODS-S et GOODS-N avec l'instrument NIRCam mais cette foisavec un champ étendu d'environ 175 minutes d'arc2 avec un temps d'intégration moyen total de 20 heures sous 8 à 10 filtres. Dans les deux zones du ciel, les astronomes réaliseront également une spectroscopie multi-objets détaillée au moyen de l'instrument NIRSpec, avec des temps d'intégration de 4, 12 et 55 heures, ciblant plus de 5000 sources faibles détectées par le HST et le JWST. Enfin, JADES exploitera l'instrument infrarouge moyen MIRI et couvrira un champ d'environ 9 minutes d'arc2 avec des temps d'intégration de 43 heures à 7.7 microns et deux fois la superficie de cette zone exposée entre 2 et 6.5 heures à 12.8 microns. Bien que les données continuent d'affluer, JADES révolutionne déjà ce que nous savons des galaxies et de la formation des étoiles dans l'Univers primitif. Grâce à JADES, les astronomes ont déjà découvert des centaines de galaxies évoluant à z > 10, dans un Univers âgé d'à peine 480 millions d'années, c'est-à-dire en pleine ère de réonisation. L'équipe a également identifié des galaxies Startbursts ultra lumineuses contenant une multitude d'étoiles jeunes et chaudes. Mieux encore, en 2022 les astronomes découvrirent une galaxie appelée JADES-GS-z13-0 à z = 13.20, évoluant dans un Univers âgé de 325 millions d'années. On y reviendra. En complément, mais les mesures devront être vérifiées, grâce aux redshifts photométriques, en 2023 les astronomes avaient déjà identifié plus de 700 galaxies candidates évoluant entre 7.9 < z < 12.5 dans un Univers âgé entre 650 et 370 millions d'années. Selon Kevin Hainline de l'Université de l'Arizona à Tucson qui utilise la caméra NIRCam (Near-Infrared Camera) du JWST pour obtenir les redshifts photométriques, "Auparavant (avec le HST), les premières galaxies que nous pouvions voir ressemblaient à de petites taches. Et pourtant, ces taches représentent des millions, voire des milliards d'étoiles au début de l'Univers. Maintenant, nous pouvons voir que certains d'entre elles sont en fait des objets étendus avec une structure visible. Nous pouvons voir des groupements d'étoiles naître seulement quelques centaines de millions d'années après le début des temps." A consulter : General Observer Programs in Cycle 1 (JWST), STScI Le sondage NGDEEP Le sondage NGDEEP (The Next Generation Deep Extragalactic Exploratory Public survey) ou sondage public d'exploration extragalactique profonde de nouvelle génération, fut proposé en 2022 par l'équipe de Micaela B. Bagley et Steven L. Finkelstein du Département d'astronomie de l'Université du Texas à Austin dans le cadre du Cycle 1 du JWST (cf. Webtelescope, 2022 et M.B. Bagley et al., 2024). Il s'agit d'un programme "de spectroscopie et d'imagerie conçu pour contraindre les mécanismes de rétroaction dans les galaxies de faible masse à travers le temps cosmique." Que cherchent les astronomes ? Certaines des premières galaxies. Selon Finkelstein, "Hubble nous donne de très bonnes indications sur la présence de galaxies à une époque remontant à 400 millions d'années après le Big Bang. Celles que nous voyons avec Hubble sont assez grandes et très brillantes. Il est très probable qu'il existe des galaxies plus petites et plus faibles qui se sont formées encore plus tôt et qui attendent d’être découvertes." NGDEEP
cible le champ ultra profond du HST (HUDF) situé dans la constellation du Fourneau avec une
méthode de spectroscopie sans fente NIRISS (Near-Infrared Imager and Slitless Spectrograph)
afin de mesurer les métallicités et les taux de formation d'étoiles (SFR) de plus de 1000 galaxies de faible
masse (log M/M
Sur
le plan astrophysique, ces données permettront d'affiner les modèles en établissant des contraintes
robustes sur l'extrémité de faible masse de la relation masse-métallicité et de contraindre
la formation d'étoiles stochastique en sondant les taux de formation d'étoiles basés sur
la raie H-alpha à 0.1 M En parallèle, NGDEEP cible le champ HUDF-Par2 avec l'instrument NIRCam du JWST (magnitude limite de 30.6 à 30.9) dans le but de découvrir des galaxies jusqu'à z > 12. Pour rappel, le champ HUDF-Par2 est proche du champ principal HUDF mais ne le chevauche pas directement. Il a été observé pour enrichir la couverture de données et pour ajouter plus de profondeur au sens propre à certaines études (par exemple, la distribution des galaxies à différentes époques cosmiques). NGDEEP chevauche les images optiques les plus profondes du ciel prises avec la caméra ACS du HST sous filtre F435W (bleu-vert) dans le champ HUDF (magnitude limite de 29.6) et sous filtre F814W (rouge-proche IR) dans le champ HUDF-Par2 (magnitude limite de 30), ce qui en fait un champ profond HST+JWST de premier ordre. Pour l'imagerie au moyen de la NIRCam, les chercheurs disposent de plus de 125 heures d'observation. Ce programme n'utilise qu'environ 30% du temps que Hubble a consacré jusqu'à présent à des recherches similaires. L'une des raisons est que les instruments du JWST furent conçus pour capturer le rayonnement infrarouge in accessible à Hubble. Les données du sondage NGDEEP sont immédiatement rendues publiques pour le bénéfice de tous les chercheurs ainsi que les catalogues associés dans l'esprit des précédentes initiatives. Le sondage Wide GTO (NIRSpec Wide) Le spectrographe proche infrarouge NIRSpec du JWST est particulièrement adapté à l'étude des galaxies de l'Univers primitif grâce à sa combinaison de capacités multi-objets et sa grande sensibilité sur une large plage de longueurs d'ondes (0.6 à 5.3 microns). En 2023, l'équipe de Michael V. Maseda de l'Université de Wisconsin-Madison (cf. M.V. Maseda et al., 2024) proposa le sondage "NIRSpec Wide" renommé depuis "Wide GTO". Ce sondage fait partie des Observations à Temps Garanti (GTO) de l'équipe scientifique de l'instrument NIRSpec qui a pour objectif d'obtenir les spectres de plus de 3200 galaxies à z > 1 à la fois à basse et haute résolution (R ≈ 100 et 2700) pour un total de 105 heures d'observation. Cela représente 31 pointages couvrant environ 320 minutes d'arc2 sur les cinq champs du sondage CANDELS avec une photométrie auxiliaire par le Télescope Spatial Hubble. Selon les chercheurs, "NIRSpec Wide représente un moyen rapide et efficace de sonder les galaxies de l'Univers primitif. Les centres de pointage sont déterminés pour maximiser l'observabilité des sources les plus rares et de grande valeur." Par la suite, d'autres configurations seront utilisées dont les microshutters du NIRSpec (des micro-volets peuvent être ouverts ou fermés individuellement pour laisser passer ou bloquer la lumière provenant d'une source particulière) pour observer le nombre maximum de galaxies d'intérêt ainsi que les grisms associés à la NIRCam pour obtenir des redshifts photométriques et estimer le flux Hα prédit afin de tracer la majeure partie de la population des galaxies à l'époque du "Midi cosmique" (z ~ 2.0). Le sondage ZTF (Zwicky Transient Facility) du Caltech exploite une caméra CDD robotique et cryogénique de 606 mégapixels (en fait une mosaïque de 16 plaques CCD de 6x6k chacune) installée depuis 2017 sur la chambre Schmidt du télescope Samuel Oschin de 1.22 m (48") de l'Observatoire du Mont Palomar, en Californie. Grâce à un champ photographique hors norme d'environ 47 deg2 (239 fois le diamètre apparent de la Lune), la caméra ZTF scanne tout le ciel boréal en seulement deux nuits dans trois bandes optiques (g, r et i) jusqu'à la profondeur ou magnitude 20.5 avec une résolution de 1.0"/pixel. Son grand champ et sa sensibilité permettent au ZTF de détecter presque toutes les supernovae à moins de 1.5 milliard d'années-lumière de la Terre ou z ~ 0.115. Le programme proprement dit de recherche des SN Ia, qui inclut la classification spectroscopique, débuta en mars 2018 (cf. S.Dhawan et al., 2021). Ces détections ont à leur tour conduit à la classification spectroscopique et à la confirmation de plus de 10000 supernovae, faisant du ZTF la plus grande étude des supernovae à ce jour (cf. Caltech).
A la cadence où les images sont enregistrées - 700 images brutes à traiter chaque nuit y compris ~50000 frames individuelles à soustraire des bruts -, les chercheurs du ZTF utilisent l'apprentissage automatique (machine learning) et l'apprentissage profond, (deep learning), des techniques ou méthodes d'intelligence artificielle pour isoler les transitoires (les SNe Ia) des faux positifs (satellites artificiels, astéroïdes, aigrettes stellaires, rayons cosmiques, image fantôme, artefacts instrumentaux, etc) et améliorer l'efficacité de la détection et du traitement des données. Sans ces outils d'IA, ce projet n'aurait pas pu voir le jour. En effet, avec l'augmentation massive du volume de données produit par ce type de sondage, une classification automatisée et fiable est indispensable. Les mêmes techniques sont utilisées pour le sondage Bright Transient Survey (BTS) du ZTF dédié aux transitoires et supernovae lumineuses (Mabs < -18) et au sondage Legacy Survey of Space and Time (LSST) exploitant le télescope Vera C. Rubin de 8.42 m qui scanne le ciel de l'hémisphère austral à la recherche de transitoires (dont les supernovae à z > 1), des objets mobiles (astéroïdes, exoplanètes, etc) et d'éventuelles traces de la matière sombre. NB. Cette liste de sondages n'est pas exhaustive. En fait, rien que le programme GTO du STScI pour le JWST comprend plus de 200 sondages, certains limités à 4 heures de temps d'observation d'autres comprenant plusieurs centaines d'heures d'observation. De plus, de nouveaux sondages sont proposés régulièrement par les chercheurs dont certains font l'objet d'une prépublication sur le serveur arXiv. Rappelons que toutes les données enregistrées par certains de ces télescopes (principalement américains) sont de nos jours disponibles dans les archives MAST (The Mikulski Archive for Space Telescopes) gérées par le STScI. Elles reprennent les données astronomiques des missions suivantes : JWST, HST, TESS, Kepler, K2, SwiftUVOT, XMM-OM, IUE, FUSE, EUVE, Copernicus, GALEX, EPOCh, et bientôt Roman, plusieurs missions réalisées à bord des navettes spatiales, des sondage réalisés au sol tels que Pan-STARRS, VLA-FIRST et SDSS et divers catalogues stellaires dont celui de Gaia. Citons également les bases de données Simbad et VizieR (cf. Eurêka !). Pour plus d'informations Les galaxies les plus lointaines (dont les Petits Points Rouges) Les amas de galaxies (et le Groupe Local).
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