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L'origine et l'avenir de l'Homme

Vue générale de l'entrée de la grotte de Dénisova dans l'Altaï. Document IAET/SBRAS, branche sibérienne de l'Académie des Sciences de Russie.

L'Homo denisova : 280000 - 29200 ans (XIV)

Durant l'été 2008, un groupe de chercheurs russes découvrit dans la grotte de Dénisova, un fémur humain presque complet. En l'espace de quatre ans, les checheurs découvrirent un crâne avec pratiquement toutes ses dents, la phalange d'un petit doigt, des pierres taillées de type Acheuléen et un bracelet de pierres vertes. La grotte se situe dans le sud-est de la Sibérie, dans l'Altaï, à quelques dizaines de mètres de la rivière Irtysh, près du village de Ust'-Ishim.

La datation au radiocarbone indiqua que le fémur était âgé de 45000 ans. D'autres ossements remontaient à environ 30000 ans. Une étude génétique fut immédiatement entreprise sous la direction de Svante Pääbo de l'Institut Max Planck d'Anthropologie Évolutionnaire (MPG/EVA) en Allemagne.

L'équipe crut d'abord qu'il s'agissait de fragments d'hommes de Néandertal du fait qu'ils laissèrent derrière eux d'innombrables outils dans les cavernes entre 48000 et 30000 ans d'ici. Les ossements n'avaient a priori rien d'extraordinaires. Mais l'analyse génétique révéla un autre profil.

Selon le paléoanthropologue Bence Viola du MPI/EVA qui participa aux analyses génétiques, les séquences d'ADN extraites du fémur ne correspondaient pas à celle des Néandertaliens. Elles appartiennent à un individu membre de l'une des plus vieilles espèces d'hommes modernes ; c'est le représentant d'une population humaine éteinte qui migra d'Afrique longtemps avant nos ancêtres directs et dont certains descendants indirects vivent encore aujourd'hui en Sibérie notamment.

Après les analyses et conclusions d'usage, la découverte fut annoncée dans la revue "Nature" le 24 mars 2010. La découverte fut très applaudie mais les scientifiques restaient réservés sur les conclusions. En effet, bien que les résultats dépassèrent toutes les espérances, il était anticipé de conclure sur base de cette seule analyse qu'il s'agissait d'une nouvelle espèce d'homininé.

Le gisement

La grotte de Dénisova est située sur la rive droite de la rivière Irtysh, près de sa source, à 28 mètres de hauteur. Elle comprend plusieurs petites galeries s'étendant à partir d'une chambre centrale mesurant 9x11 m et présentant un plafond en forme d'arche. La totalité de la grotte couvre environ 270 m2.

La grotte de Dénisova est connue de longue date pour avoir abrité des hommes de Néandertal. Sur le plan stratigraphique, les travaux d'excavations dans la chambre centrale ont révélé 13 occupations différentes durant le Pléistocène moyen et supérieur (781000 à 11700 ans). La datation des couches fut établie grâce à la radiothermoluminescence des sédiments (RTL) et au radiocarbone des fossiles.

A gauche et au centre, l'entrée de la grotte de Dénisova située dans le massif de l'Altaï, dans le sud-est de la Sibérie. A droite, des travaux d'excavations dans la grotte. Documents Max Planck Institute EVA/Bence Viola.

Les couches les plus anciennes remontent entre ~240000 et ~170000 ans. L'équipe de Katerina Douka mit à jour près de 4000 fragments d'os qui furent ensuite analysés. La couche supérieure remonte entre 170000 et 75000 ans. La couche suivante remonte au Paléolithique et a moins de 75000 ans. Elle révéla des pierres taillées de style Moustérien et Levallois âgés entre 155000 et 46000 ans. La couche la plus récente remonte au Moustérien de l'Altaï qui se développa entre 48650 et 29200 ans (cf. E.I. Zavala et al., 2021; S.Condemi et al., 2021).

Cependant, il y a trop peu de fossiles pour permettre la reconstruction détaillée du calendrier et de la séquence d'occupation de la grotte par les homininés. De plus, deux fossiles de Dénisoviens (Denisova 3 et Denisova 4) - mais sans reste humain moderne - ont été récupérés dans les couches initiales du Paléolithique supérieur (< 45000 ans).

Si de toute évidence des Dénisoviens et des Néandertaliens ont vécu ensemble dans la grotte, on peut aussi imaginer qu'ils ont croisé des Homo sapiens ou que les trois espèces ont vécu un certain temps ensemble.

A gauche, une pierre taillée de type Acheuléen (> 350000 ans) comptent parmi les nombreux objets préhistoriques découverts dans la grotte de Dénisova entre 2008 et 2012. Au centre, séquences stratigraphiques de la grotte de Dénisova montrant les emplacements des échantillons de sédiments collectés pour l'analyse de l'ADNmt et les résultats obtenus pour les anciens homininés. Consultez l'article scientifique pour les détails. A droite, chronologie de la présence des hominidés et de l'ADNmt faunique, des phases archéologiques et des enregistrements environnementaux dans la grotte de Dénisova. Documents Max Planck Institute EVA/Bence Viola et E.I. Zavala et al. (2021).

Sur les plans géologique et stratigraphique, la grotte de Dénisova s'est formée dans du grès Silurien remontant au Paléozoïque (époque du continent Gondwana, il y a environ 420 millions d'années). 

L'analyse des pollens et des fossiles du biotope indiquent que les plus anciens occupants vivaient dans une région forestière contenant des bouleaux et des sapins, avec ci et là, dans les zones élevées des étendues dépourvues d'arbres. La période la plus froide s'est manifestée à la fin du maximum de l'Âge glaciaire, il y a environ 30000 ans, époque où la steppe envahit la région.

Morphologie et génétique

Bien que nous ne possédions que de petits fragments d'une dizaine de squelettes de Dénisoviens, des méthodes scientifiques très élaborées ont permis d'en savoir un peu plus sur cette nouvelle population humaine.

Les analyses des ossements des Dénisoviens indiquent qu'il s'agit d'une population mixte d'hommes et de femmes. Parmi leurs particularités, ils possèdent une grosse tête avec volume endocrânien atteignant le record de 1800 cm3 (contre 1300 à 1400 cm3 chez l'Homo sapiens moderne), leurs molaires (Denisova 4) présentent 7 cupsides ou éminences (contre 4 chez l'Homo sapiens moderne) et 3 racines (généralement 2 racines chez l'Homo sapiens moderne et 3 racines sur la molaire m3).

Pour en savoir plus sur la nature des Dénisoviens, l'équipe de Svante Pääbo analysa l'ADN mitochondrien d'autres ossements de Dénisoviens afin de préciser sa cartographie génétique et déterminer s'il s'agissait ou non d'une nouvelle espèce humaine.

Les travaux complémentaires sur l'ADN mitochondrien confirmèrent les conclusions initiales. Au total, 3800 fragments d'os ne dépassant pas 4 cm de longueur qui étaient auparavant considérés comme taxonomiquement non identifiables furent examinés par la technique de l'empreinte peptidique ou ZooMS (Zooarchéologie par spectroscopie de masse). La doctorante Samanta Brown identifia cinq os dont le collagène correspondait au profil peptidique des humains.

Des analyses ultérieures confirmèrent que trois fragments d'os possédaient de l'ADN mitochondrien d'une nouvelle espèce humaine appelée les Dénisoviens et un fragment contenait de l'ADN mitochondrien de Néandertalien. C'était la première fois qu'une espèce éteinte était formellement identifiée grâce à une analyse ADN. Les résultats et les conclusions de l'étude furent publiés dans la revue "Nature" du 8 avril 2010.

A gauche, une molaire d'Homo denisova. Au centre, des pendentifs fabriqués par des Dénisoviens. A droite, quelques centaines de fragments d'os découverts dans la grotte de Dénisova. Au total les spécialistes ont analysé 3800 fragments d'os mesurant moins de 4 mm de longueur dont 5 contenaient encore du collagène exploitable pour une analyse ADN. A ce jour, les archéologues n'ont toujours pas découvert de squelette entier ni même un crâne d'Homo denisova. Documents Max Planck Institute EVA/Bence Viola et K.Douka et al. (2019).

Au cours des recherches ultérieures, de l'ADN mitochondrien et de l'ADN nucléaire furent récupérés sur 8 fossiles d'homininés, permettant d'en attribuer quatre à des Dénisoviens (Denisova 2, Denisova 3, Denisova 4 et Denisova 8), trois à des Néandertaliens (Denisova 5, Denisova 9 et Denisova 15) et un provient d'une jeune fille de 13 ans surnommée "Denny" née du métissage entre un Néandertalien et un Dénisovien (Denisova 11).

Finalement, les chercheurs ont pu établir que les Dénisoviens se sont séparés des Néandertaliens il y a environ 800000 ans.

A ce jour, sur le plan strictement scientifique, en particulier taxinomique, si on se base sur les données squelettiques, on ne peut pas certifier que les Dénisoviens appartiennent à une nouvelle espèce humaine (Homo denisovensis) car il nous manque une grande partie de leur squelette pour l'affirmer. En effet, si on peut sans hésiter qualifier d'Homo sapiens un crâne d'humain présentant un menton osseux - la seule espèce présentant cette caractéristique -, nous n'avons pas découvert ce type de preuve chez les Dénisoviens. On ne peut donc rien affirmer sans preuves. Néanmoins, sur bases génétiques (comparaison des profils de méthylation de l'ADN des espèces humaines connues)  il est commun de la considérer comme telle et de l'appeler l'Homo denisova.

Ces découvertes suggèrent que les humains de l'âge glaciaire étaient plus diversifiés qu'on l'imaginait. En effet, au cours du XIXe sièce, les chercheurs savaient que deux espèces humaines - l'Homo neanderthalensis et l'Homo sapiens - avaient coexisté à la fin de l'âge glaciaire. Il fallut attendre 2003 pour découvrir une troisième espèce humaine, l'Homo floresiensis, qui vécut sur l'île de Florès, en Indonésie, sur laquelle nous reviendrons. Cette nouvelle découverte faite en Sibérie confirme que plusieurs espèces humaines ont vécu en Eurasie, chevauchant l'émergence de l'Homo sapiens (en fait depuis les derniers 315000 ans, 10 espèces humaines ont foulé la Terre et toutes ont croisé l'Homo sapiens).

L'Homo denisova de Xiahe

En 2019, une équipe de paléoanthropologues dirigée par Jean-Jacques Hublin de l'Institut d'anthropologie évolutionniste de Leipzig (EVA-MPG) et Dongju Zhang de l'Université de Lanzhou, en Chine découvrit une demi-mandibule dans la grotte karstique de Baishiya située dans le nord-est du plateau tibétain. L'analyse des protéines (protéome) contenues dans ce fragment d'os suggère qu'il appartient à un Dénisovien. Cette découverte fit l'objet d'un article publié dans la revue "Science" en 2020.

Avec cette "mandibule de Xiahe", les paléoanthropologues tenaient enfin un premier fossile dénisovien en dehors de la grotte de Dénisova. Toutefois, l'identification par les protéines laissait planer certains doutes car la méthode était nouvelle. Dongju Zhang et ses collègues se sont donc lancés à la recherche d'ADN dénisovien dans la grotte de Baishiya. Et ils en ont trouvé !

Pour traquer de l'ADN dans les sédiments de la grotte, les chercheurs ont exploité une méthode dont l'efficacité a été démontrée en 2017 par Viviane Slon de l'EVA-MPG. Ils ont d'abord extrait les fragments d'ADN mitochondrial conservés dans les échantillons de sédiments à l'aide de sondes chimiques spécifiques. Une fois ces fragments multipliés puis séparés de l'ADN récent dû à la contamination, les chercheurs les ont comparés à des bases de génomes mitochondriaux des Sapiens, des Néandertaliens et des Dénisoviens. Résultat : il s'agit bien d'ADN dénisovien. Une fois ces fragments d'ADN remis dans leurs contextes stratigraphique et chronologique, il s'avère que des Dénisoviens ont occupé la grotte de Baishiya de façon discontinue entre 100000 ans et 45000 ans.

A gauche, la demi-mandibule de Xiahe découverte dans la grotte de Baishiya. Ses protéines (protéome) attestent qu'elle appartient à un Homo denisova qui vécut il y a 160000 ans. A droite, la grotte de Baishiya se trouve dans l’extrême nord-est du plateau tibétain, à 3280 mètres d’altitude. Documents D.Thang et al. (2020)

Par ailleurs, la datation par la méthode de l'uranium-thorium de la calcite fixée sur la demi-mandibule indique un âge de 160000 ans. Il est donc désormais certain que les Dénisoviens vivaient sur le plateau tibétain depuis longtemps, et qu'ils étaient donc adaptés aux hautes altitudes (le plateau tibétain s’étend entre 1500-5000 m d'altitude; la grotte de Baishiya étant située à 3280 m).

De précédentes études avaient par ailleurs montré que les Tibétains actuels résistent au mal des montagnes grâce à une variante du gène EPAS1 qui réduit les effets du manque d’oxygène. Or cette variante est également portée par les Dénisoviens. Ces derniers l’auraient transmis aux Tibétains au gré des métissages avec des populations d'Homo sapiens. On y reviendra.

Si des Dénisoviens vivaient déjà sur le plateau tibétain il y a 160000 ans, c'était certainement aussi le cas aux altitudes plus clémentes du reste de l’Asie septentrionale. Cette hypothèse vient d'être confirmée par l'équipe de Diyendo Massilani de l'EVA-MPG et ses collègues. Ils ont analysé l'ADN contenu dans une calotte crânienne humaine datant de 34000 ans découverte dans la vallée de Salkhit, au nord-est de la Mongolie, ainsi que celui d’un individu mort il y a 40000 ans à Tianyuan, près de Pékin. Il s'avère que ces deux individus possédaient aussi de l'ADN dénisovien provenant d'un métissage entre les ancêtres des populations actuelles de l’Extrême-Orient et des Dénisoviens déjà métissés avec des Néandertaliens, comme le sont les individus de la grotte de Dénisova. Nul doute que les traces de ces Dénisoviens septentrionaux vont continuer à se multiplier dans toute l'Asie orientale.

A quoi ressemblait l'Homo denisova ? Physiquement parlant et malgré la reconstruction de son ADN, on sait peu de choses sur l'Homo denisova. Bien que Pääbo et ses collègues soient parvenus à établir un lien génétique avec d'autres sous-espèces humaines, on ne peut pas encore extraire d'indications sur l'aspect physique des Dénisoviens avec la même précision qu'avec la phalange de son petit doigt.

En revanche, on sait que trois gènes déterminent la couleur de la peau. Les chercheurs estiment que les Dénisoviens avaient probablement la peau sombre. Ils ont également remarqué que leurs allèles (les variantes des gènes pouvant donner naissance à des caractéristiques individuelles) sont "compatibles" avec l'expression des cheveux bruns et des yeux bruns. Selon le biologiste évolutionniste Rasmus Nielsen de l'Université de Californie à Berkeley, les Dénisoviens étaient probablement costauds, plus résistants et avaient probablement la peau et les cheveux sombres et les yeux marrons.

Hybridation chez les Dénosoviens

Plusieurs questions se posent concernant la place de l'Homo denisova  dans l'arbre phylogénique : est-il l'ancêtre direct de l'Homo sapiens d'Eurasie et, sinon, quel lien de parenté a-t-il avec l'homme moderne et ses ancêtres et à quelle époque s'est-il différencié des autres espèces ?

A l'exception des hommes de Néandertal, dont les séquences ADN de nombreux individus ont été déterminées, le nombre et les filiations génétiques des lignes d'homininés sont largement inconnues. La découverte de l'Homo denisova et de ses descendants jusqu'en Indonésie allait apporter de nouvelles informations.

Pour ne pas alourdir cet article, nous aborderons la question de l'hybridation des Dénisoviens dans l'article consacré au métissage entre les premiers humains.

Extinction des Dénisoviens et expansion des Homo sapiens

Janet Kelso qui participa également à l'analyse génétique de l'Homo denisova, compara la longueur des séquences d'ADN entre les différentes espèces et estima que l'ancêtre commun des Dénisoviens et des Néandertaliens vivait approximativement 7000 à 13000 ans avant leur séparation génétique soit il y a environ 60000 à 50000 ans, ce qui est proche de l'époque à laquelle on observe la principale expansion des hommes modernes en dehors de l'Afrique et du Moyen-Orient. Curieusement, on observe une diminution de la population des Dénisoviens à l'époque où les populations d'hommes modernes commencent à s'étendre comme le montre la carte ci-dessous.

Routes de dispersion des Homo sapiens. Document C.Bae et al. adapté par l'auteur.

A ce sujet, les dernières analyses ADN indiquent que les Dénisoviens présentent une faible diversité génétique : 26 à 33% de la diversité génétique observée dans les populations européennes et asiatiques. Il semble que la population des Dénisoviens ait été réduite pendant des centaines de milliers d'années, ce qui expliquerait leur faible diversité génétique tout au long de leur histoire, avant qu'elle ne s'éteigne sous la pression des Homo sapiens (voir plus bas).

Pääbo et son équipe ont essayé de déterminer les facteurs ayant conduit à la disparition des Dénisoviens. Outre la faible diversité génétique, les principaux indicateurs sont le développement du cerveau et des connexions synaptiques. Selon Pääbo, puisque l'homme de Néandertal présentait un cerveau dont les proportions sont similaires au nôtre mais que son espèce disparut, plus que la capacité endocrânienne, ce sont peut-être les différences neurologiques qui expliqueraient pourquoi l'Homo sapiens s'est répandu au détriment de toutes les autres espèces humaines. Toutefois, nous n'avons pas suffisamment de preuves pour étayer cette hypothèse.

Durant la même période, dans l'Asie du Sud-Est, une petite population isolée subit l'influence de son environnement et vit sa taille diminuer ainsi que nous l'avons expliqué précédemment avec la découverte à notre plus grande surprise des fossiles de l'Homo floresiensis qui vécut sur l'île de Florès, en Indonésie, à la fin du Pléistocène supérieur (au Tarentien qui se termina voici 11700 ans). C'est également à la même époque que vécut brièvement l'Homo luzonensis sur l'île de Luzon aux Philippines.

Le Peuple du Cerf Rouge : 14300 - 11500 ans

En 1979, un géologue découvrit dans une grotte située près du village de Longlin, dans la province de Guangxi située dans le sud-ouest de la Chine, un squelette fossilisé âgé d'environ 14000 ans. Il comprend un crâne presque complet ainsi que ses dents, quelques côtes et les os des membres.

Trois autres squelettes furent découverts en 1989 dans la grotte du Cerf Rouge située dans la région de Maludong, près de la ville de Mengzu, dans la province du Yunnan. Ils comprennent plus de 30 ossements, y compris trois crânes fragmentés, deux mandibules avec quelques dents, des côtes et des fragments des membres.

Le crâne découvert dans la grotte de Longlin en Chine et daté d'environ 14000 ans. Document Darren Curnoe.

Ce n'est qu'à partir de 2008 que les chercheurs ont commencé à étuder ces fossiles. Ceux découverts en 1979 sont restés prisonniers de leur gange minérale jusqu'en 2009 où les chercheurs les ont nettoyés et ont reconstruit le squelette. L'ensemble des fossiles est daté entre 14300 et 11500 ans.

Selon les paléoanthropologues chinois et australiens ayant participé à ces études, ces spécimens n'appartiennent à aucune espèce connue. Ce sont les premiers fossiles humains découverts dans la partie continentale de l'est de l'Asie. De ce fait, ils apportent de nouvelles données et ouvrent de nouvelles perspectives sur le peuplement des hommes en Asie.

Les chercheurs ont appelé cette population d'origine inconnue le "Peuple du Cerf Rouge" par référence à la grotte dans laquelle ils furent découverts. Les résultats de leurs études furent publiés dans la revue "PLoS’One" en 2012.

L'analyse des squelettes révèle que les quatre individus sont très similaires et appartiennent probablement à la même population. Ils présentent tous des caractéristiques homogènes mais différentes de celles de l'Homo sapiens et de ses ancêtres.

Comme c'est souvent le cas en paléoanthropologie, ce sont les crânes qui ont apporté le plus d'indications significatives. Les os crâniens sont assez épais et l'arcade sourcilière est très apparente, des traits typiquement primitifs. En revanche, la face est assez courte et plate comme celle des hommes modernes mais le nez est large et le menton est absent.

L'analyse tomographique des cavités endocrâniennes indique que le lobe frontal ressemble à celui des hommes modernes mais le lobe pariétal rappelle une forme archaïque. Les molaires sont également assez larges.

Selon le paléoanthropologue australien Darren Curnoe de l'Université de New South Wales (UNSW), le spécimen de Longlin est unique dans toute l'histoire humaine. Son crâne présente une mosaïque inhabituelle de caractéristiques archaïques comme celles observées chez nos ancêtres africains il y a 150000 ans, tout en montrant quelques traits modernes.

Bref, les hommes du Cerf Rouge sont différents des autres populations humaines vivant à cette époque, ce qui soulève la question de leurs origines. Plusieurs hypothèses ont été proposées.

La première considère que le Peuple du Cerf Rouge est une nouvelle espèce d'homininé asiatique qui vécut séparément des autres lignées jusqu'à une époque assez récente. Toutefois, les chercheurs veulent être prudents avant de l'assigner à une nouveau taxon.

Illustration d'un homme du Peuple du Cerf Rouge.

La seconde hypothèse proposée par Ji Xueping de l'Institut d'Archéologie et des Reliques Culturelles du Yunnan et par Darren Curnoe de l'UNSW, considère qu'il s'agit des descendants d'une population primitive émigrée d’Afrique plusieurs dizaines de milliers d’années auparavant (80-100000 ans) et qui s'est éteinte. Un métissage génétique avec l'Homo denisova qui vécut également en Asie, est tout à fait envisageable.

Enfin, selon la troisième hypothèse proposée par des chercheurs qui n'ont pas été impliqué dans ces recherches considère qu'il s'agirait d'individus hybrides. Dans ce cas, selon la paléoanthropologue Isabelle De Groote du Musée d'Histoire Naturelle de Londres, il pourrait s'agir d'un métissage interracial entre des humains modernes ou avec des humains archaïques.

Parmi les autres options, également possibles selon De Groote, est qu'ils ont évolué isolément à partir de traits primitifs en raison d'une divergence génétique ou d'une spéciation, ou encore en réponse à la pression de l'environnement, tel que le climat.

Actuellement, seule l'analyse de leur ADN pourrait préciser leur degré de parenté et de métissage éventuel avec les autres espèces d'homininés.

Dans tous les cas, la découverte du Peuple du Cerf Rouge apporte d'importantes informations sur la manière dont la Chine fut peuplée à la fin de la dernière glaciation et à la fin de l'Âge de la pierre, à l'époque épipaléolithique (12500-10000 ans).

Précisons que non loin de Longlin, plusieurs sites archéologiques ont mis à jour les preuves d'une occupation de l'est de l'Asie par des humains à l'époque Epipaléolithique (vestiges de céramique, greniers, etc), indiquant clairement que ces populations étaient dans une période de transition vers l'agriculture.

Les paléoanthropologues continuent à prospecter l'est et le sud-est de l'Asie afin de compléter l'image encore très peu claire que nous avons du peuplement de cette région du monde.

Si nous continuons maintenant notre voyage vers le sud-est asiatique et l'Océanie, nous rencontrons la dernière population ayant atteint l'Australie et la Tasmanie avant l'exploration moderne : les Aborigènes.

La migration vers l'Australie (Sahul)

Comment l'Australie fut-elle colonisée ? L'équipe de Michael Bird de l'Université James Cook en collaboration avec des experts en biodiversité du Centre d'excellence ARC pour la Biodiversité et l'Héritage Australien (CABAH) publièrent dans la revue "Nature" en 2019 les résultats d'une analyse numérique des plus anciennes migrations vers la région de Sahul. Leurs résultats révèlent que les premiers Australiens sont arrivés au cours d'une spectaculaire migration planifiée de plus de 1300 personnes, taille minimum nécessaire pour que la première population arrive bien à destination, survive et prospère dans ce qui est aujourd'hui l'Australie.

Selon les chercheurs, ce n’était pas une migration accidentelle, car leur travail montre que les premiers arrivants devaient avoir planifié leur voyage. En effet, les données suggèrent que les ancêtres des peuples aborigènes, des insulaires du Détroit de Torres et des Mélanésiens se sont rendus en Australie dans le cadre d'une migration organisée et technologiquement avancée pour commencer une nouvelle vie.

Le premier peuplement de Sahul (Australie, Nouvelle-Guinée et les îles Aru réunies au niveau de la mer le plus bas) par des hommes anatomiquement modernes nécessita de multiples passages maritimes à travers la Wallacea, dont au moins une approche à 100 km du continent. Comme dans le cas de Florès, on ignore si ces passages furent accidentels ou intentionnels.

Exemples de résultats de modélisation de la dérive des océans combinées à des projections démographiques de la migration vers l'Océanie pour des sites des routes du nord (gauche) et du sud (droite) vers Sahul. En raison du chevauchement entre les sites, seuls trois résultats aléatoires sont affichés. Le pourcentage d'arrivées réussies est également indiqué pour chaque site et scénario. Documents M.Bird et al. (2019).

En utilisant l’analyse côtière et la modélisation de la dérive des océans combinées à des projections démographiques, les chercheurs ont montré que la probabilité d'atteindre Sahul au hasard par n'importe quelle route est inférieure à 5% jusqu'à ce que 40 adultes ou plus arrivent d'une île au moins une fois tous les 20 ans. Ensuite, le choix de l'époque et la planification du voyage augmentent considérablement les chances d'arriver à destination.

Selon les chercheurs, la probabilité de survie était plus élevée si les migrants arrivaient par petites vagues successives, avec une moyenne d'au moins 130 personnes tous les 70 ans environ sur une période de ~700 ans soit durant environ 30 générations.

Bien que la modélisation de la dérive démontre l'existence de passages "à goulets d’étranglement" sur toutes les routes, les routes du nord (par Bornéo et les Célèbes) est plus probable que la route du sud passant par l'arc volcanique du nord-ouest de l'Australie (cf. cette carte).

Les chercheurs en déduisent que des humains anatomiquement modernes avaient la capacité de planifier et de faire des voyages en haute mer de plusieurs jours il y a au moins 50000 ans.

Les Mélanésiens blonds

Longtemps on a cru que les cheveux blonds n'existaient que chez les Blancs européens, c'est-à-dire chez les peuples à la peau claire supposés originaires du Caucase. Or, en 1568 quand l'explorateur espagnol Alvaro de Mendaña débarqua en Mélanésie située à 1800 km au nord-est de l'Australie, entre la Papouasie et le Vanuatu, il découvrit qu'une partie de la population indigène avait les cheveux blonds.

L'origine de ce trait caractéristique unique au monde est longtemps restée inconnue. Plusieurs théories furent proposées : l'effet d'une décoloration par le Soleil et le sel, l'ingestion de grande quantité de poissons ou encore un métissage avec des migrants Européens ou Américains. En réalité, toutes ces théories ne s'appliquent pas aux Mélanésiens.

Jusqu'à 10% de la population de Mélanésie a les cheveux blonds avec localement des pics de 26%. Photo prise en 1987. D.R.

Une quatrième théorie suggère que les Mélanésiens seraient les descendants de certains migrants venus d'Asie du Sud-Est. Selon des documents archéologiques et linguistiques, la migration se serait produite en deux vagues. Tout d'abord, les descendants de langue papoue sont arrivés sur les côtes de l'actuelle de la Mélanésie. Plusieurs années plus tard, les Austronésiens (les populations malayo-plynésiennes qui s'étendent de Taïwan à la Nouvelle-Zélande et de Madagascar à l'île de Pâques, en excluant l'Australie et une partie de la Nouvelle-Guinée) ont rejoint la population de langue papoue et ont colonisé les parties intérieures des îles.

Enfin, une cinquième théorie suggère une origine générique et on le prouva. Dans une étude publiée dans la revue "Science" en 2012 (donc voici le résumé), l'équipe du généticien Sean Myles du Collège Agricole de la Nouvelle-Écosse (NSCA) qui dépend de l'Université de Dalhouie (DAL) au Canada réalisa une analyse génétique sur des échantillons de salive et de cheveux de 1209 résidents mélanésiens des îles Salomon.

En comparant 43 insulaires blonds et 42 insulaires bruns, les chercheurs découvrirent que les blonds portaient deux copies d'un gène mutant présent chez 26% de la population de l'île. Les Mélanésiens possèdent un gène natif TYRP1 sur le 9e chromosome qui est en partie responsable (46.4%) des cheveux blonds et de la mélanine, et qui est totalement distinct de celui des Caucasiens appelé MCR1 car ce dernier n'existe pas chez les Mélanésiens blonds. En effet, les chercheurs n'ont pas trouvé la mutation de TYRP1 dans les échantillons d'ADN de 941 individus de 52 autres populations à travers le monde, y compris dans les pays européens. Selon Myles, "C'est un excellent exemple d'évolution convergente, où le même résultat est obtenu par des moyens complètement différents."

TYRP1 est un gène récessif - l'enfant l'hérite des deux parents - qui s'exprime plus fréquemment chez les enfants que chez les adultes, les cheveux ayant tendance à s'assombrir à mesure que l'individu vieillit.

Selon les auteurs, cette mutation qui n'a pas d'avantages évidents, est probablement apparue par hasard chez un individu et atteignit une fréquence élevée aux îles Salomon parce que la population d'origine était petite et son cadre de vie limité. En effet, tout l'archipel semble avoir été peuplé par de très petites communautés, le moindre changement génétique significatif ayant des conséquences importantes chez leurs descendants.

Selon Myles, ces résultats aident à déconstruire une vision eurocentrique du monde à propos de l'origine des cheveux blonds. Cet effet génétique et bien d'autres (cf. la pigmentation) démontrent une fois de plus que les Noirs africains étaient les premiers Homo sapiens et que tous les humains sont issus d'une population noire africaine.

Rappelons que chez les Caucasiens, le gène MCR1 muta il y a environ 11000 ans, pendant la dernière période glaciaire. Le premier blond caucasien remonte donc au plus tôt à cette époque.

Les Aborigènes d'Australie (depuis 65000 ans)

Longtemps les Occidentaux ont imaginé que les Aborigènes d'Australie étaient un peuple de sauvages frustres, sous-entendant sans culture et juste capables de cueillir des fruits et de chasser des kangourous et des reptiles.

A leur charge il faut bien dire que les premiers explorateurs hollandais du XVIIe siècle (1606) furent reçus à coup de sagaies (ils avaient kidnappé une jeune fille qui devait leur servir d'interprète et de guide), ce qui leur valut cette réputation de "sauvages" vivants dans un territoire sans eau ni ressources à convoiter... Ils ne revirent plus d'hommes blancs avant plusieurs générations.

Ce n'est qu'en 1770 que James Cook accompagné de Joseph Banks débarquèrent à Botany Bay et prirent possession de l'Australie au nom du roi George III d'Angleterre, jugeant que ces terres n'appartenaient à personne. Ici également les Anglais furent reçus à coups de sagaies (plus par curiosité que par esprit belliqueux).

Ces préjugés vis-à-vis des Aborigènes persisteront jusqu'au jour où les ethnologues et les archéologues s'intéressèrent à ces populations et que les avocats défendirent leurs droits. On y reviendra.

Arrivée des Aborigènes en Australie

A quelle époque les premiers Aborigènes sont-ils arrivés en Australie ? La question est toujours débattue mais plusieurs études exploitant des techniques de datation plus performantes et complémentaires au carbone-14 ont permis de fixer des dates relativement précises.

Selon une étude génétique publiée en 2011 dans la revue "Science" par Morten Rasmussen de l'Université de Copenhagen et son équipe, les premiers habitants seraient arrivés en Australie (Sahul) par le mer via le sud-est de l'Asie il y a environ 62000 à 75000 ans (donc 25000 à 38000 ans plus tôt que la séparation des peuples asiatiques modernes). Comme d'autres explorateurs, ils sont partis à l'aventure sans avoir la certitude de trouver une terre viable et hospitalière.

A gauche, une vue générale de l'abri sous roche de Madjedbebe situé dans le Parc National de Kakadu, dans le nord de l'Australie lors de la campagne de fouilles organisée par l'équipe de Chris Clarkson de l'Université de Queensland. A droite, le paléoanthropologue Ben Marwick (en chemise claire) de l'Université de Washington dans la fosse creusée à la base de l'abri où les archéologues et les étudiants ont découvert plus de 10000 artefacts en pierre datant entre 35000 et 65000 ans. Documents Gundjeihmi Aboriginal Corporation/ Dominic O'Brien.

Jusqu'à présent, les plus anciennes traces humaines d'occupation de l'Australie dataient d'environ 47000 à 50000 ans. C'est en 1989 que le paléoanthropologue et géochimiste Richard Roberts de l'Université de Wollongong et ses collègues découvrirent un gisement dans le nord de l'Australie, à Majedbebe, dans le Parc National de Kakadu. Mais à l'époque, les artefacts datés par thermoluminescence ne permirent pas de remonter plus loin dans le temps.

Comme l'expliqua l'archéologue Chris Clarkson de l'Université de Queensland et son équipe dans un article publié dans la revue "Nature" en 2017, le gisement fut à nouveau propecté en 2012 et 2015. Le site est un abri sous roche contenant des dépôts sédimentaires dans lesquels les archéologues ont découvert des "crayons" d'ocre servant à fabriquer des pigments et d'innombrables outils en pierres taillées dont quelques-uns sont présentés à droite dont des pierres d'affûtage (grinding stones) et des têtes bisautées servant par exemple à confectionner des hachettes, un outil qu'on ne retrouvera qu'environ 20000 ans plus tard dans d'autres cultures.

A gauche, le paléoanthropologue Ben Marwick (en chemise claire) de l'Université de Washington et d'autres membres de l'équipe de Chris Clarkson de l'Université de Queensland fouillant les parties les plus basses d'une fosse située à la base de l'abri sous roche de Madjedbebe situé dans le Parc National de Kakadu, dans le nord de l'Australie. Au centre, Chris Clarkson en compagnie de May Nango, la gardienne du site de Madjedbebe, dans la fosse de Majedbebe. A droite, des pointes de haches brutes et des meules datant entre 35000 et 65000 ans découvertes dans l'abri sous roche de Majedbebe. Documents Gundjeihmi Aboriginal Corporation/Dominic O'Brien et Chris Clarkson et al.

Au total, les archéologues ont découvert (et numérisés en 3D par laser) plus de 10000 artefacts en pierre remontant à 35000, 40000 et 65000 ans. La datation fut réalisée par radiocarbone pour les éléments organiques et une technique complémentaire appelée la luminescence optiquement simulée (OSL) pour les matières minérales (cf. les techniques de recherches paléontologiques). Cela recule de 18000 ans (voire de 10000 ans car toutes les analyses ne sont pas terminées) l'apparition des premières sociétés Aborigènes en Australie.

Modélisation des routes empruntées par les premiers Australiens

Du fait que les preuves archéologiques de l'arrivée des humains à Sahul sont rares, des chercheurs se sont tournés vers l'informatique pour compléter leurs connaisances. Ils ont utilisé des données modernes sur les migrations des personnes à longue distance, la survie humaine, les taux de fertilité et le risque de catastrophes naturelles, en combinaison avec des données anthropologiques, écologiques et environnementales pour construire une modélisation des routes empruntées par les premiers Australiens. Les résultats de cette simulation ont fait l'objet de deux articles publiés dans la revue "Nature" en 2021 (cf. Corey J.A. Bradshaw et al., 2021 et Stefani A. Crabtree et al., 2021).

Cartographie des grandes routes autochtones de l'ancienne Australie. Document Megan H. Davidson/Sandia National Laboratories, Zoe Taylor, CABAH, adapté par l'auteur.

La majorité des spécialistes estime aujourd'hui que les migrants sont arrivés à Sahul entre 50000 et 75000 ans et sa population pourrait avoir atteint 6.5 millions d'habitants.

Afin de clarifier les routes empruntées par les premiers Australiens à travers le continent, l'équipe multidisciplinaire comprenant des archéologues, des paléontologues, des géographes, des écologistes, des généticiens, des géologues et des informaticiens a construit le modèle d'élévation numérique le plus complet jamais élaboré pour l'Australie, comprenant également des zones aujourd'hui sous-marines, notamment celles situées dans le nord de l'Australie.

Le modèle a également permis aux chercheurs de se faire une idée du paysage que ces premiers peuples auraient vu, telles que des caractéristiques foncières proéminentes comme les montagnes du nord-ouest, du centre et de l'est entourées d'un paysage relativement plat.

Selon Stefani Crabtree, archéologue et informaticien spécialiste des sciences sociales à l'Université de l'État d'Utah et auteur principal de cette étude, "Si c'est un nouveau paysage et que nous n'avons pas de carte, nous voudrions savoir comment nous déplacer efficacement dans cet espace, où trouver de l'eau et où camper - et nous nous orienterons en conséquence."

Grâce à l'analyse informatique, les chercheurs ont testé plus de 125 milliards de routes possibles, en comparant ces voies avec les plus anciens sites archéologiques connus du continent.

Comme illustré ci-dessus, les modèles qui ont émergé suggèrent qu'il y avait de grandes routes distinctes - de véritables autoroutes - à travers le paysage ainsi que des routes secondaires moins fréquentées. Plusieurs grandes routes font écho aux routes commerciales aborigènes documentées qui traversent le pays, y compris du commerce du pituri (le tabac indigène) de Cape York à l'Australie du sud via Birdsville.

Selon Sean Ulm de l'Université James Cook et directeur adjoint du CABAH, "Dans de nombreuses sociétés autochtones australiennes, on pense que les caractéristiques du paysage ont été créées par des ancêtres au Temps du Rêve. Chaque ligne de crête, colline, rivière, plage et source d'eau est nommée, racontée et inscrite dans le tissu même des sociétés, mettant l'accent sur la relation intime entre les gens et le lieu. Le paysage est littéralement tissé dans la vie des peuples et dans leur histoire. Il semble que ces relations entre les peuples et le pays remontent probablement au premier peuplement du continent."

Les chercheurs suggèrent qu'à l'avenir, le modèle pourrait être utilisé pour cartographier d'autres migrations épiques, telles que les premières vagues de migrations hors d'Afrique, ou pour prévoir les futurs mouvements de populations humaines dus aux perturbations climatiques et à l'élévation du niveau de la mer.

Qui sont les premiers Australiens ?

Les Aborigènes d'Australie nous disent depuis longtemps que leurs ancêtres vivaient sur ce continent et s'en occupaient depuis des temps immémoriaux. Entravée par des idées fausses bien ancrées et des programmes de recherche désuets, ce n’est qu’au cours des dernières décennies - avec les découvertes de Mungo Man et Mungo Lady - que la science commença à rattraper son retard.

Comment prouver que les Aborigènes sont les premiers Australiens ? Sur le plan génétique, Anna-Sapfo Malaspinas de l'Université de Berne et ses collègues ont réalisé des études génomiques sur 83 Aborigènes d'Australie et 25 Papous des montagnes de Nouvelle-Guinée dont les résultats furent publiés dans la revue "Nature" en 2016.

Leur étude montre que ces populations sont originaires d'Afrique et ont quitté leur berceau africain au cours d'un seul exode il y a 75000 ans. Ensuite ce groupe de colons atteignit le sud-est de l'Asie au terme d'une migration qui dura plusieurs milliers d'années au cours de laquelle il fut notamment en contact avec d'autres espèces humaines.

Comme nous l'avons évoqué, les Aborigènes d'Australie ont hérité jusqu'à 6% de l'ADN des Dénisoviens (48000-29200 ans) dont les squelettes furent découverts dans l'Altaï dans le sud de la Sibérie. Les ancêtres des Aborigènes ont divergé des Eurasiens il y a environ 57000 ans. C'est à cette époque et même dix mille ans plus tôt que les premiers ancêtres des Aborigènes auraient quitté le continent pour explorer l'Océanie et s'installer en Australie. Examinons cette période en détails.

A ce jour, le plus ancien squelette humain découvert en Australie date de 42000 ans et appartient à un humain de morphologie gracile, très différente de la morphologie robuste des Aborigènes actuels. Comme on le voit ci-dessous, le crâne fossilisé fut découvert en 1974 près du lac Mungo, un lac asséché situé dans la région des lacs de Willandra dans le Parc National de Mungo à l'ouest de la Nouvelle-Galles du Sud (NSW, le territoire de Sydney).

Dans un article publié dans les "PNAS" en 2001, le biologiste et généticien Gregory Adcock aujourd'hui à l'Université de Canberra et son équipe déclaraient sur base de l'analyse du peu d'ADN mitochondrien retrouvé sur "Mungo Man" qu'il ne s'agissait pas d'un ancêtre des Aborigènes mais celui d'un représentant d'une lignée humaine éteinte. Plusieurs chercheurs ont réfuté cette hypothèse car l'échantillon analysé semblait contaminé. Depuis cette date, l'échantillon d'ADN concerné n'a plus jamais été étudié et fut écarté du champ de recherche pendant près de quinze ans.

A gauche, le crâne du plus ancien Australien découvert en 1974 près du lac asséché de Mungo (à droite) en NSW et nommé "Mungo Man". Il est âgé d'environ 42000 ans. Malgré l'analyse de quelques fragment d'ADN, les généticiens ne peuvent pas affirmer ni infirmer qu'il s'agit d'un ancêtre des Aborigènes. Documents Wilfred Shawcross et David Lambert.

Dans un article publié dans les "PNAS" en 2016, le biologiste et généticien David Lambert de l'Université Griffith et son équipe ont réanalysé l'échantillon de "Mungo Man" ainsi que ceux de 20 autres squelettes découverts dans la région des lacs de Willandra. A l'époque, Adcock avait séquencé l'ADN au moyen d'une technique appelée la réaction en chaîne par polymérase (PCR) mais elle ne permet d'amplifier que très courtes séquences d'ADN. Le problème est qu'elle permet aussi de facilement copier des séquences qui n'appartiennent pas à l'échantillon mais proviennent d'une contamination externe (une manipulation des fragments). Une nouvelle méthode a donc été développée permettant d'amplifier tout l'ADN de l'échantillon. On peut donc aisément identifier les séquences humaines, virales et bactériennes et avoir une meilleure idée des parties endogènes et exogènes d'ADN.

Grâce à cette nouvelle méthode, Lambert et son équipe ont séquencé le génome complet de l'ADN mitochondrial des os d'un homme excavé à Willandra mais l'âge de son squelette n'a pas encore été déterminé avec précision. En revanche, ils ont constaté que le génome de "Mungo Man" est très inhabituel et ne correspond pas à celui des Aborigènes ni à leurs ancêtres. L'échantillon de "Mungo Man" contient les séquences génétiques de cinq différents peuples européens, suggérant qu'il a été contaminé, confirmant les conclusions publiées en 2001.

Ignorant que les échantillons furent contaminés, Adcock conclut que le peuple Aborigène n'était pas le premier peuple ayant conquis l'Australie et qu'antérieurement il existait un groupe que les Aborigènes ont déplacé. Ce groupe appartenait à une ligne éteinte d'humains qui occupait l'Australie avant l'arrivée des Aborigènes. Mais depuis que l'on sait que l'échantillon fut contaminé, cette théorie est caduque. Dans une interview accordée en 2016 au webzine australien "ABC News", Lambert conclut qu'en utilisant une meilleure technologie, affirmer comme le fit l'étude initiale que "le peuple Aborigène n'était pas les premiers Australiens est sans fondement." Affaire à suivre.

Quel que soit le verdict, les Aborigènes ont survécu, y compris à des changements climatiques majeurs comme la dernière glaciation et à la montée des eaux (jusqu'à 135 mètres) survenue entre 18000 et 3000 ans qui sépara l'Australie du Sud-Est de l'Asie et de la Tasmanie ainsi qu'au réchauffement du climat survenu il y a environ 12000 ans qui décima une grande partie de la faune et de la flore.

Après avoir conquis l'Australie, il y a 35000 ans les Aborigènes colonisèrent les îles d'Océanie jusqu'en Tasmanie.

Puis, il y a moins de 2900 ans, suite au réchauffement global de la planète et la montée des eaux, les premiers Polynésiens ont débarqué dans les archipels du détroit de Torrès situé au nord de l'Australie, apportant aux Aborigènes les pirogues, les poteries et leurs techniques agricoles, créant dans la région un véritable réseau commercial maritime. Finalement, des Polynésiens s'installèrent en Nouvelle Zélande vers 1050 de notre ère.

L'histoire cachée dans la mémoire collective du "Temps du Rêve"

De nos jours certains récits du "Temps du Rêve" relatent encore des histoires d'inondations survenues il y a une centaine de générations ayant tué de nombreux ancêtres des Aborigènes actuels. Certains récits sont même bien plus anciens et racontent des inondations catastrophiques survenues il y a environ 18000 ans suite à la fonte de la calotte polaire australe (cf. The Great Flood). C'est très intéressant, car cela permet d'affirmer que la mémoire collective peut conserver le souvenir d'évènements très anciens dont ne subsiste aucune trace physique reconnaissable dans le paysage.

Autrement dit, des peuples isolés peuvent continuer à entretenir des traditions et raconter des histoires que les ethnologues assimilent à des légendes (imaginées pour comprendre) ou des mythes (imaginés pour croire) mais dont certains reposent sans doute sur des faits réels. On peut citer des exemples chez les peuples autochtones d'Alaska (dont les légendes décrivent de grandes vagues destructrices), les légendes et mythes africains et peut-être les histoires de yétis au Tibet, sans oublier les mythes religieux, en particulier ceux décrits dans la Bible.

La culture et l'art Aborigène

Concernant l'art et la culture Aborigène, le site de Nawarla Gabarnmang situé à l'extrémité nord des Territoires du Nord est le plus ancien lieu de culte aborigène sous roche. Excavé à la force des bras, il date de 43000 ans soit 40000 ans avant Stonehenge et comprend parmi les plus anciennes peintures pariétales.

C'est au nord-ouest de l'Australie, dans l'archipel Dampier et la péninsule de Burrup qu'on retrouve la plus grande concentration d'art pariétal au monde. On estime que cette région contient 1 million de pétroglyphes (cf. Pillans et Fifield, 2013). On y a notamment découvert les premiers pétroglyphes représentant un visage humain. Les pierres dans lesquelles ils furent gravés peuvent résister à l'érosion durant 60000 ans. Mais sur base du style des pétroglyphes et des effets de l'érosion (atmosphérique et cosmique), les scientifiques estiment que certaines gravures pourraient avoir 30000 ans dont celle présentée ci-dessous à gauche.

A gauche, un pétroglyphe remontant à environ 30000 ans caractérisé par de grands yeux ronds pourrait être la plus ancienne représentation d'un visage humain. Il fut découvert dans la péninsule de Burrup, à l'ouest de l'Australie. Document Ken Mulvaney. A droite, une peinture aborigène moderne des peuples habitants la région centre-ouest de l'Autralie similaire en tout point à celles que peignaient leurs ancêtres. Dans cette peinture relative au culte du serpent qui est toujours très vivace, les cercles concentriques représentent un point d'eau et les traits en v des traces de kangourous. Le jaune est une couleur sacrée et la couleur du Soleil, le rouge est la couleur de la terre et du sang, le blanc celle de l'esprit (fumée, vent, éclairs) et le noir celle du peuple Aborigène et de la nuit. En combinant ces symboles et des dizaines d'autres de manière complexes, les Aborigènes tracent des cartes ou racontent des histoires (spirituelles, du quotidien, des voyages, etc).

En revanche, les peintures rupestres sont difficiles à dater car les Aborigènes ont utilisé des colorants minéraux qu'il est impossible de dater au carbone-14. Si les Aborigènes avaient utilisé des colorants organiques comme le charbon de bois, la datation aurait été aisée.

Les plus anciennes peintures rupestres découvertes en Australie remontent à 28000 ans et représentent des scènes de guerres, des danses, des personnages en mouvement, des représentations des ancêtres, les mythes des origines et d'autres concepts d'une rare beauté et dont le style varie selon les cultures. Pour toutes ces raisons, les ethnologues considèrent que l'art paritéal occidental est froid et peu nuancé comparé à celui des Aborigènes qui est "chaud", polychrome, vivant et bien plus élaboré, lui apportant une dimension spirituelle, sociale et culturelle qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Malgré les distances qui séparent parfois les tribus, le sentiment d'appartenir à un même peuple est si fort que les Aborigènes visitant ces lieux sont encore émus aujourd'hui du fait qu'ils retrouvent dans ces peintures les images de leurs ancêtres envers lesquels ils conservent un très fort attachement.

C'est également en Australie qu'on a découvert la plus ancienne carte gravée dans la pierre remontant à 6800 ans. Elle indique des points d'eau et des sources représentés par des cercles de différentes formes reliés par des lignes.

On a également découvert dans les régions sèches d'Australie des empreintes de pieds et notamment celles de trois chasseurs dont un unijambiste portant vraisemblablement une béquille dont les coéquipiers couraient après un kangourou. Sur base des 30 cm que mesuraient ses empreintes plantaires, on a estimé que l'un des hommes mesurait 1.93 m et courait à 34 km/h derrière l'animal, soit pratiquement aussi vite qu'un sprinter moderne !

Les Aborigènes n'étaient pas seulement un peuple de chasseurs-cueilleurs, un mode de survie auquel ils furent contraints suite au réchauffement climatique et l'assèchement de leur territoire - mais ils ont également tiré profit de la montée des eaux pour construire des canaux et des lacs artificiels pour élever des anguilles, donnant naissance à l'ancêtre de l'aquaculture.

Alors qu'en Europe on chassait encore à la lance, il y a 9000 ans les Aborigènes avaient inventé le boomerang, le "bâton qui revient". Son invention est extraordinaire car les Aborigènes ont compris qu'une forme convexe et gyroscopique (arquée) permettait au bâton de revenir après un vol pouvant aller jusqu'à 300 mètres. Servant à la fois de leurre pour rabattre les oiseaux et les piéger dans des filets tendus entre les arbres, c'était aussi une arme de défense et un jouet.

A voir : Ancient Australian Aboriginal Art

Northern Territory For Everyone

L'art pariétal Aborigène. A gauche, les plus anciennes peintures rupestres d'Australie furent découvertes en 2012 à Nawarla Gabarnmang par l'archéologue Bryce Barker de l'Université de Southern Queensland. La datation au carbone-14 indiquent qu'elles remontent à 28000 ans tandis que la roche fut creusée il y a 43000 ans. Au centre, des représentations de danseurs. A droite, les peintures dites de style "rayons X" de Nourlangie, dans le massif du Mt Brockman. Ces peintures sont bien plus élaborées que celles de l'homme de Cro-Magnon.

Les ethnologues ont recensé plus de 200 cultures aborigènes distinctes et plus de 120 outils différents y compris des armes comme des sagaies, des haches, des propulseurs et autres lances qu'on retrouve sur des peintures rupestres à Durnham remontant à 6000 ans.

Ces tribus peuplaient toute l'Australie, y compris le désert et entretenaient cet immense territoire aussi bien que des agriculteurs ou des gardes forestiers, s'assurant que chaque espèce avait sa terre et des moyens de subsistance durables, brûlant les mauvaises herbes pour fertiliser les sols et taillant des clairières pour faciliter la chasse aux kangourous. Cette pratique était encore couramment utilisée jusqu'au milieu du XXe siècle. Avec le recul, on peut même dire que le bush était mieux entretenu dans le passé qu'aujourd'hui ! Vu le laisser-aller général, dans certaines provinces le gouvernement australien a décidé de réappliquer ces techniques ancestrales pour entretenir les terres retournées à l'état sauvage.

Quand les premiers colonisateurs ont débarqué en Tasmanie au XVIIIe siècle, ils ont découvert une petite population isolée vivant heureuse, qui ne manquait de rien, en bonne santé, vivant en harmonie avec la nature alors qu'elle ne disposait que d'une poignée d'outils (on n'en dénombra que 22 soit 5 fois moins que sur le continent) et avait peu de contacts avec les autres cultures.

Voyant la vie heureuse de ces populations, encore aujourd'hui les scientifiques se demandent sérieusement si le progrès tel qu'on l'image en Occident où il est synonyme de technologie alliée au pouvoir de l'argent et une vie active stressante est plus enviable que la vie simple et paisible de ces tribus qu'on juge un peu vite primitives.

Contrairement aux sociétés modernes où les individus ne se connaissent plus et conduisent leur vie au pas de course, les Aborigènes avaient pris le temps de vivre, de profiter du temps et de développer une culture propre, avec ses traditions et ses rites mystiques. C'est le seul peuple au monde qui peut revendiquer une culture de 50000 ans !

L'avenir des Aborigènes

Au XVIIIe siècle on estime qu'il y avait 1 million d'Aborigènes en Australie répartis dans plus de 500 tribus. Aujourd'hui, ils ne sont plus qu'environ 366000. Leur population fut décimée par les maladies apportées par les Blancs et des guerres dont le génocide des Aborigènes de Tasmanie (cf. les controverses au sujet de l'historiographie australienne, ce que les historiens australiens appellent the "History wars").

Notre regard sur l'Australie et les Aborigènes a changé le jour où les géologues ont découvert des diamants dans la région de Kimberley (NO) et des minerais y compris de l'uranium dans ce vaste continent a priori sans intérêt et inhospitalier. Autrement dit, ce sont les richesses du pays qui ont opposé l'homme Blanc aux Aborigènes.

Aborigènes jouant du didgeridoo. Document Framepool.

Les Anglais ont colonisé l'Australie et pillé ses richesses. Malheureusement les Aborigènes n'ont jamais revendiqué leurs terres ni aucun droit, estimant que cela allait de soi puisqu'ils étaient les premiers arrivés.

Comme les Américains et les Canadiens l'ont fait avec leurs populations autochtones, au XIXe siècle les colons anglais repoussèrent les Aborigènes dans des missions et des réserves. Au total, pour un pays qui s'étend sur 7.69 millions de km2, les réserves aborigènes représentent ~19% du territoire pour seulement 3 habitants au km2. Mais c'est un simulacre d'accord car bien souvent les réserves ne sont pas situées sur les terres des ancêtres. De plus, la majorité des Aborigènes vit dans la misère.

Après avoir longtemps lutté pour leurs droits, ce n'est qu'en 1967 qu'un référendum accorda aux Aborigènes le droit de vote et il fallut attendre 1992 pour qu'on leur accorde enfin le droit de revendiquer leurs terres, moyennant toutefois certaines preuves.

Dans ces conditions, on comprendra que les Aborigènes ressentent encore une forte animosité envers les Blancs. Certaines réserves aborigènes sont d'ailleurs interdites aux étrangers et l'accès uniquement autorisé aux détenteurs d'un permis. Les contrevenants risquent la prison.

Après avoir été méprisés pendant plus de deux siècles par les Blancs, aujourd'hui les jeunes Aborigènes doivent encore lutter pour leurs droits, pour préserver leur culture et leur patrimoine ancestraux face à la vague déferlante des touristes sans scrupules et surtout face aux désirs d'expansion des industriels dont les usines sont parfois installées en lisière des réserves ou à quelques centaines de mètres seulement de sites archéologiques de grandes valeurs. C'est un combat au quotidien.

Pour préserver leur culture et leur patrimoine, les jeunes Aborigènes écoutent les Anciens raconter les récits du "Temps du Rêve", ils étudient les peintures rupestres, les totems et reproduisent les motifs peints sur les écorces et sur toile par leurs ancêtres. Ils apprennent les danses et leurs traditions. La littérature abonde aussi d'ouvrages sur leur culture et les scientifiques comme les journalistes ont pour ainsi dire établi leur campement en Australie tellement le sujet est vaste et passionnant.

Malheureusement, seuls les Aborigènes les plus vieux se rappellent encore des légendes du "Temps du Rêve" que leurs grands-parents leur ont transmis de bouche à oreille et de la signification des pétroglyphes dessinés par leurs ancêtres. Seuls les Anciens peuvent encore lire les traces laissées sur le sol par les animaux, chasser le kangourou à la lance et entretenir les zones en friche. En d'autre terme, la culture Aborigène est menacée.

Pour que la culture Aborigène survive il faut que les jeunes Aborigènes continuent à vivre sur leurs terres, pratiquent leur langue natale, préservent leur patrimoine et entretiennent leur culture. S'ils s'intègrent à la civilisation occidentale, leur civilisation multimillénaire disparaîtra.

Comme d'autres minorités à travers le monde et notamment les Bushmen de Namibie dont l'avenir est tout aussi précaire, les Aborigènes représentent l'un de nos derniers liens avec notre passé et les origines de l'humanité. Leur culture doit absolument être préservée. Si elle disparaît, l'humanité perdra non seulement ses racines mais également son âme, l'envoûtant son du didgeridoo ne faisant plus écho aux battements de son coeur que la civilisation aura réduit au silence.

A voir et à écouter : Aboriginal Music by Richard Walley

Indigenous People aboriginal music

Au cours des 10000 dernières années, l'homme conquit finalement le monde avec le succès que l'on sait, bâtissant des temples à la hauteur de sa puissance et des chemins à l'infini vers la Connaissance.

 Rappelons que depuis 2012, sur le plan stratigraphique (cf. ICS) la série de l'Holocène a été divisée en trois âges : Greenlandien (11700-8200 ans), Northgrippien (8200-4200 ans) et Meghalayen (depuis 4200 ans).

Décrivons cette époque ou série la plus récente, l'Holocène (depuis ~12000 ans) qui vit la sédentarisation des peuples et la naissance de l'écriture.

Prochain chapitre

La révolution néolithique

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