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La colonisation de l'espace

"Signal Lost". Document T.Lombry.

Gérer les risques (VI)

Malgré le coût et les risques que représente l'exploration de l'espace, après avoir conquis la Lune, Mars et quelques astéroïdes, la curiosité des hommes les conduira un jour ou l'autre à explorer les étoiles et en particulier les exoplanètes proches habitables. Si on ne découvre pas le moyen de voyager à des vitesses relativistes, à "recourber" l'espace-temps (Warp drive), à exploiter les trous de ver ou si on ne parvient pas à mettre au point une technologie fiable d'hibernation, quatre utopies pour certains, les voyages interstellaires risquent d'être très très longs et rendent cette perspective irréaliste.

En effet, les défis technologiques ne sont pas les seules préoccupations ou problèmes que devront résoudre les ingénieurs au long cours galactique. Car en admettant que tous les systèmes fonctionnent (propulsion, navigation, systèmes de support, etc) et que la survie du personnel soit garantie, qu'en est-il du risque d'accident, de l'épuisement des ressources, du risque sanitaire et de l'équilibre psychologique du personnel parmi d'autres questions clés ? Nous allons voir que ces questions n'ont pas de réponses simples ou au contraire que l'équation est très facile à résoudre mais risque de tempérer l'envie de colonisation de nos descendants s'ils ne parviennent pas mettre au point la technologie adéquate.

Pour ne pas surcharger cet article, nous verrons dans celui consacré au vaisseau générationnel : réflexions et simulations, que de nombreux chercheurs ont déjà une idée précise des moyens à mettre en oeuvre pour éviter qu'échoue un projet ausi ambitieux. Les plus engagés concluent même sur base de simulations numériques qu'une telle entreprise est tout à fait réalisable à condition bien sûr d'accepter les risques et les conséquences d'une telle aventure.

Pour notre part nous allons prendre un exemple concret. Mettons-nous dans la situation la plus contraignante, celle d'un projet de mission spatiale à bord d'un vaisseau interstellaire générationnel propulsé par un moteur non relativiste ou sans Warp drive - disons à l'antimatière vu qu'il s'agit de toute façon d'un projet futuriste - et embarquant des milliers de personnes à destination d'une exoplanète jumelle de la Terre située à quelques centaines d'années-lumière, les problèmes potentiels ne faisant que s'amplifier à mesure que la distance augmente. Fixons la durée du voyage à 100 ans, c'est-à-dire que dans tous les cas le personnel qui embarque n'arrivera pas vivant à destination et au moins une génération naîtra dans le vaissseau et n'aura jamais connu la Terre. Nous fixons ces contraintes pour bien comprendre les risques d'une telle aventure et par conséquent ce qu'il faut absolument maîtriser ou ne surtout pas faire.

Le risque d'accident

Comme le dit l'adage, "les accidents n'arrivent qu'aux autres", si ce n'est que dans un vaisseau interstellaire habité qu'il soit ou non générationnel et animé de n'importe quelle vitesse, tout le monde est logé à la même enseigne et mis à part un coup de chance, tout le monde risque de subir les aléas d'un éventuel accident majeur.

Réparation d'un vaisseau interstellaire de classe Daedalus endommagé par une météorite. Illustration pour la couverture d"Analog", July 1976.

Nos descendants attendront-ils passivement que l'accident ou la catastrophe survienne pour réagir où vont-ils tout mettre en oeuvre pour l'anticiper et réduire ou éviter le risque ? Nous savons que tous les risques ne sont pas gérables du fait qu'il y a des impondérables, "l'imprévu pas prévu", des catastrophes imprévisibles ou face auxquelles nous n'avons soit aucun moyen de défense soit aucune échappatoire. Une autre raison souvent mise en avant est qu'il est parfois trop onéreux d'investir dans une protection adéquate contre un risque qui selon toute probabilité à peu de chance de se produire. Malheureusement, ce risque n'est jamais nul et il suffit donc d'une occurrence pour en subir les conséquences. A part les impondérables contre lesquels le personnel et le constructeur peuvent juste souscrire une assurance, comment faut-il gérer les situations à risque ?

Nous connaissons tous les problèmes rencontrés par les expéditions de Christophe Colomb, de Magellan et du Bounty qui ont en partie virées au drame et dont une fraction seulement de l'équipage est revenue à bon port.

Plus près de nous, nous connaissons la mésaventure de l'équipage d'Apollo XIII qui manqua de ne jamais revenir sur Terre en 1970 suite à l'explosion du réservoir d'oxygène. Nous avons également connu de petits accidents d'amarrage à bord de la station Mir et des incidents mineurs à bord de la station ISS qui ont parfois privé l'équipage d'électricité, affecté la qualité de l'air ambiant ou contraint l'équipage à vivre parmi les déchets à évacuer. Citons également les impacts des débris produits au cours du lancement des navettes spatiales et les micrométéoroïdes qui ont criblé les navettes de centaines d'impacts variant entre 1-2.5 mm de diamètre (cf. ce graphique), y compris les hublots, mais sans occasionner de dommages significatifs, à l'exception de l'accident de Challenger provoqué par une fissure dans l'aile qui provoqua la mort des sept membres d'équipage lors de leur retour de mission en 2003.

Imaginons un accident majeur dans un vaisseau interstellaire ayant dépassé le point de non retour et perdu dans l'univers au milieu de nulle part. Il peut d'abord s'agir d'un évènement extérieur imprévisible ou non détecté comme la collision avec un astéroïde de quelques décimètres qui perça la coque du vaisseau à un endroit vital. Plus rare dans l'environnement du Soleil, le vaisseau peut aussi être balayé par un bouffée de rayons gamma issus d'une supernova, la fusion de deux étoiles à neutrons ou par le jet bipolaire d'un trou noir (en quelques secondes, l'astre émet autant d'énergie que le Soleil en 10 milliards d'années !). Si la source gamma est située à moins de ~10 années-lumière, l'irradiation risque malheureusement d'être fatale.

Ensuite il y a l'accident survenant suite à une mauvaise manipulation, un défaut de maintenance ou un défaut de construction. Il est en général réparable avec le matériel de bord mais peut compromettre la vie à bord pendant quelques jours.

Explosions à proximité du vaisseau "The Expanse", une série diffusée sur la chaîne Syfy en 2017. La série TV ainsi que le jeu vidéo sont dérivés des romans de science-fiction de James S.A. Corey, nom de plume du duo d'écrivains Ty Frank et Daniel Abraham.

Un vaisseau spatial aussi futuriste soit-il se dégrade par la force des choses et sa maintenance doit être assurée régulièrement au risque de subir des pannes allant jusqu'à l'arrêt de systèmes vitaux (alimentation en oxygène, eau, électricité). Déjà sur Terre, aucune station orbitale ni aucun vaisseau spatial n'a tenu plus de 30 ans. Seuls quelques avions de type C-130 ont volé durant 50 ans mais ils ont tous été révisés en temps et heure. Leur longévité reste une exception.

Quant aux matériaux utilisés, comme expliqué précédemment (page 3), si les alliages d'aluminium ou la céramique réfractaire est légère et résistante, on voit mal ce matériau fragile appliqué sur un vaisseau interstellaire. Mieux vaut envisager d'utiliser de nouveaux alliages, notamment à base de graphène.

Envisager la maintenance d'un vaisseau interstellaire pendant 100 ans est un défi que devront résoudre nos descendants d'autant que pendant le voyage il n'est pas question d'arrêter le vaisseau, de le réviser dans une station spatiale et de débarquer tout le personnel le temps de la maintenance. Bref, si on peut réviser une partie du vaisseau interstellaire en cours de mission, il y a des éléments mécaniques qui ne pourront jamais être révisés sans mettre l'installation à l'arrêt, voire sans la décontaminer et sans démontage. A moins d'utiliser des systèmes redondants et modulables mais ce n'est pas toujours possible, pour des voyages aussi longs ce problème n'a pas encore trouvé de solution.

Si les risques d'accidents et de pannes peuvent être évalués et même anticipés par des systèmes experts dotés d'intelligence artificielle (par exemple le risque de panne d'un composant électronique, l'approche d'un nuage d'astéroïdes, etc), un accident comme une explosion importante dans le module de propulsion, de survie ou de pilotage peut mettre en danger toute la mission et la survie du personnel.

Se pose alors la question de la gestion de crise : comment gérer une contamination de l'eau potable, une épidémie, un attentat ou une prise d'otage dans un environnement confiné où les locaux vacants et les endroits isolés sont comptés ? Que faire en cas de crime ? Cela pose la question de la maintenance du vaisseau spatial, de l'hygiène, de la disponibilité ou non à bord de produits explosifs ou d'armes par exemple, du maintien de l'ordre, de la justice et des procédures à suivre. Du point de vue des ressources humaines, faut-il créer des postes dédiés à la sécurité du vaisseau et du personnel ? Qui décide des actions à prendre : le responsable du département ou le commandant de bord ? Un humain ou un système artificiel ? En cas de jugement, qui arbitre et qui décide ? Faut-il élire un juge ou le commandant de bord assure également cette fonction ? Les autorités comme le juge et le commandant de bord assurent-ils leur fonction "à vie" ou pour la durée d'un mandat ? Si un crime a été commis, faut-il neutraliser ou placer le coupable en isolement durant sa détention ? Faut-il créer une prison ? Qui va la gérer ? Si la technologie existe, faut-il envisager de cryogéniser un prisonnier dangereux pour la durée de sa détention ? Voilà autant de questions et bien d'autres auxquelles des experts devront répondre. En corollaire, cela sous-entend qu'il y aura autant de métiers que de domaines d'expertises à pourvoir sur ce genre de vaisseau interstellaire. On y reviendra.

L'épuisement des réserves

Dans un vaisseau interstellaire ou chez soi, si on consomme de la nourriture, il faut la renouveler. Mais dans un vaisseau interstellaire ce n'est possible qu'à condition qu'il y ait du stock à bord, autrement dit que les ressources ou les réserves soient disponibles (fermes d'élevages, serres agricoles, piscicultures, stock, etc), ce qui ne nécessite pas d'infrastructures très complexes à l'exception des systèmes de contrôle informatisés.

Même chose pour le matériel d'usage courant, le mobilier et la décoration dont le stock de pièces de rechange et les moyens de fabrication doit être compatibles avec la durée du voyage et adaptés à la demande du personnel.

A gauche, le concept de vaisseau interstellaire "XCV-330 USS Enterprise" à propulsion sans distorsion (époque pré-Warp drive) imaginé par le designer Mark Rademaker qui a collaboré aux illustrations de "Star Trek" et qui présente également ses oeuvres sur Flickr. Maquette mise en scène par T.Lombry. A droite, extrait du jeu vidéo "Mass Effect: Andromeda" développé par BioWare pour Electronic Arts. Le jeu consiste à prendre la tête d'une équipe de colons armés dans le but d'explorer la galaxie d'Andromède afin de savoir s'il est possible d'y établir des avant-postes. Mais nous ne sommes pas seuls dans l'Univers...

En revanche, le matériel s'use, se casse ou ne fonctionne plus et il faudra soit le réparer soit le remplacer. Mais si le stock de matière première ou de pièces de rechange est épuisé, comment remplacer une carte-mémoire, un processeur, un ordinateur, un appareil de radiographie, un laser ou tout autre objet manufacturé ? S'il faut évidemment prévoir des stocks en suffisance et des experts pour maintenir les appareils en bon état, faut-il également prévoir une équipe d'ingénieurs spécialisés capable de fabriquer des appareils sophistiqués ? Est-il envisageable de disposer de plusieurs ateliers et laboratoires scientifiques à bord d'un tel vaisseau ? Un seul atelier ou labo étant déjà peu probable compte tenu de son coût, il sera difficile d'assurer la maintenance de tels appareils sur place et impossible de les fabriquer sans transformer une partie du vaisseau en usine.

Jusqu'à présent un appareil installé à bord de la station ISS est conçu de manière à être transportable et en cas de panne, à moins qu'elle soit simple à réparer, l'appareil est démonté et confié à des spécialistes au sol. Ce fut notamment le cas du robonaute. Quant aux grosses pièces comme un panneau solaire, s'il tombe en panne l'équipage essaye soit de le réparer soit il ne s'en sert plus et trouve une solution alternative en concertation avec les équipes support au sol. Si vraiment l'appareil est vital et la panne met la vie de l'équipage en danger, soit l'équipe au sol à le temps de planifier une mission de secours pour remplacer l'appareil défecteux soit il y a urgence et l'équipage évacue la station par la prochaine navette.

Concept de vaisseau interstellaire propulsé grâce à de l'antimatière. Document NASA corrigé par l'auteur.

Dans un vaisseau interstellaire, il n'est pas question d'évacuer le personnel. Si la place est disponible, on peut juste déplacer le personnel dans une autre section du vaisseau, condamner certains modules le temps que l'incident soit résolu et en convertir d'autres à un autre usage. Le stock de pièces de rechange est limité tandis que les ateliers de réparation ont également des capacités limitées, ce qui à long terme peut s'avérer problématique et compromettre la mission. On peut se dire qu'il faudra donc faire un choix entre utiliser des appareils de haute technologie mais difficilement réparables sans compétences et moyens appropriés ou des appareils moins perfectionnés mais faciles à réparer. En pratique, il sera difficile de se passer des dernières technologies. Quant aux appareils et instruments moins sophistiqués, ils finiront de toute manière par tomber en panne, s'user ou se casser, c'est une question de temps. Il faut donc gérer ce risque inévitable en évitant que le problème se pose, c'est-à-dire en anticipant le risque, en ayant à bord toutes les ressources nécessaires pour maintenir les objets et appareils en bon état et idéalement pour en fabriquer de nouveaux à partir des stocks disponibles.

Malheureusement, l'épuisement des ressources et l'usure des pièces sont des risques inévitables face auxquels le personnel sera confronté. La seule manière de les éviter est de ne pas franchir les seuils limites, c'est-à-dire d'écourter le voyage afin de rester dans une zone de confort et dans les limites des stocks disponibles. Autrement dit, la durée du voyage interstellaire doit être compatible avec la gestion des stocks, le cycle de vie des appareils et bien entendu avec la vie humaine. C'est le maillon le plus faible de la chaîne de production ou d'approvisionnement qui dictera la durée du voyage et donc la distance maximale autorisée sans mettre en danger le personnel. Finalement, dans un vaisseau interstellaire, le maillon le plus faible ne sera peut-être pas d'ordre matériel mais plutôt le facteur humain.

Enfin, les réserves risquent de ne pas suffire dans un vaisseau générationnel, où on peut s'attendre à une croissance exponentielle de la population. Des simulations ont toutefois montré que dans un tel cas, il faudrait imposer un contrôle des naissances afin que la population reste stable, toute surpopulation dans un système ayant des réserves limitées conduisant par nature à une issue fatale (cf. F.Marin, 2017).

Le risque sanitaire

En vivant et travaillant à bord d'un vaisseau interstellaire générationnel, il y aura nécessairement des blessés, des soins à prodiguer, des maladies et des décès. Déjà au cours des missions de longue durée à bord de la station Mir ou ISS certains membres d'équipages ont vomi en raison de la désorientation, la plupart eurent temporairement le "mal de l'espace" en raison d'un afflux de sang dans la tête et l'un d'eux eut même une arithmie cardiaque. Mais grâce à des contrôles médicaux et une mise en quarantaine avant le vol aucun astronaute n'est tombé malade.

Document WallpaperCave.

Les champignons comme l'Aspergillus flavus sont parmi les micro-organismes qui s'adaptent le plus facilement dans les environnements chauds et humides comme des espaces confinés. Si beaucoup de champignons et virus sont inoffensifs pour l'homme, certains sont toxiques et même mortels. Si les virus ne se propagent pas entre deux espèces, nous savons que dans des situations de stress, par manque d'hygiène ou de contrôle sanitaire, un foyer peut se déclarer et contaminer la nourriture ou directement infecter les humains.

Du fait qu'il y aura des animaux à bord et parfois du personnel malade, si une maladie virale contagieuse se propage et si les patients ne sont pas rapidement isolés, à travers le système d'aération ou simplement par contact, c'est une grande partie du personnel qui risque d'être contaminée et indisponible avec un impact direct sur la bonne marche du vaisseau. La bonne santé du personnel sera donc une préoccupation majeure du personnel médical au même titre que la sécurité du personnel et celle du vaisseau.

De même, le personnel va forcément vieillir. Avec l'âge, le corps va s'affaiblir et réagira plus lentement ou plus du tout aux diverses sollicitations. Statistiquement, il y aura des malades et peut-être des situations graves. Il y a un moment où la médecine ne suffira plus et les patients devront vivre avec la maladie ou un handicap. Il faut donc prévoir des infrastructures médicales, un bloc opératoire, des caissons d'isolement, une pharmacie et du personnel spécialisé proportionnellement à l'âge de la population embarquée. Ces situations n'ont jamais été envisagées dans un vaisseau spatial où par contrat tout le personnel doit être en bonne santé ou n'embarque pas.

La bonne nouvelle est que plus le personnel est jeune et en bonne santé plus le risque sanitaire est faible. De même, plus le vol spatial est court plus on a de chances d'éviter le risque sanitaire. L'idéal est donc d'éviter les voyages interstellaires qui durent plusieurs années et certainement plus d'une décennie. Encore une fois, un vol non relativiste ou sans technologie Warp échappe à cette règle et n'est donc pas une solution envisageable.

L'équilibre psychologique

Au cours d'un voyage interstellaire, la question de l'équilibre psychologique du personnel embarqué est peut être la plus importante et la plus difficile à gérer, comme elle l'est déjà à bord des vaisseaux et des stations spatiales de nos jours. Avant même d'embarquer dans cette aventure, le personnel doit être sensibilisé aux risques psychologiques qu'il encourt, la liste n'étant probablement pas exhaustive.

Le vaisseau de Enzmann illustré par Alex Storer.

Si la planète convoitée est à 100 années de la Terre, le personnel n'aura pas l'opportunité de faire escale sur un astéroïde, une planète ou une lune située sur sa route pour apprécier le dépaysement et pourquoi pas pour se ravitailler ou même s'y installer. Le personnel sait donc d'avance qu'une fois qu'il aura embarqué et que la porte du vaisseau sera fermée derrière lui, elle restera fermée pratiquement pour toujours. On peut imaginer que certains seront pris d'angoisse, de panique et ne supporteront pas cette idée. Heureusement, le commandant de bord à conserver les clés ! Tant que le vaisseau est arrimé à son dock spatial, ceux qui le désirent peuvent encore abandonner la mission et retourner sur Terre. Ensuite, ce sera le décollage et le grand saut vers l'inconnu.

Un vaisseau interstellaire aussi vaste et confortable soit-il est un environnement clos et autonome se déplaçant dans un milieu hostile. Autrement dit, en cas de problème le personnel ne peut compter que sur lui-même. A l'inverse des humains vivant sur la Terre, le personnel embarqué dans un voyage interstellaire non relativiste sait qu'il ne reviendra jamais dans son pays natal ni même sur la Terre. Il sait qu'il n'aura plus aucun repère terrestre et devra oublier l'idée de revoir physiquement les habitants de la Terre et même cette jolie planète bleu qui le vit naître. Il sait qu'il cotoyera durant des années et des décennies les mêmes personnes et devra supporter leur caractère. Il sait que son avenir et son horizon s'arrêtent aux parois du vaisseau. Il sait qu'il mourra dans le vaisseau comme tous ces collègues et amis et que la nouvelle génération naîtra également dans le vaisseau et donc sans avoir connu la Terre, leurs petits-enfants n'ayant peut-être jamais connu de colons Terriens de la première génération.

Rien que cette perspective de n'être qu'un maillon de la chaîne et de savoir qu'on n'assistera pas à l'accomplissement de la mission n'est déjà pas très motivante ni encourageante. Par conséquent, ce genre de mission sans retour est avant tout réservé à des personnes stables sachant très bien gérer leurs émotions, des volontaires célibataires ou des couples sans liens familiaux épris d'aventure dont l'absence ne risque pas de trop perturber l'entourage.

Mais cela serait-il moralement acceptable ? Sachant qu'on ne peut obliger aucune personne libre ni même aucun animal à vivre toute sa vie entre quatre murs, peut-on l'accepter d'un équipage, même composé de volontaires ? Et qui pense à l'avenir des futurs enfants de l'équipage ? Ce sont des question éthiques importantes auxquelles il faudra répondre. Nous y reviendrons (voir plus bas).

Mais il y a encore d'autres problèmes. Nous allons voir que la situation se complique dans un vaisseau interstellaire quand on prend en considération les métiers à exercer, l'éducation et le temps libre.

Les contraintes de la vie dans un vaisseau interstellaire

Pour garantir la survie du personnel embarqué dans un voyage interstellaire dans des conditions optimales, la seule solution est de construire un ou plusieurs grands vaisseaux spatiaux capables d'abriter des milliers de personnes et les infrastructures nécessaires à leurs activités.

Le vaisseau interstellaire "LDSS Nauvoo" (renommé "OPAS Behemoth" et finalement "Medina Station") de la série "The Expanse". Il mesure 2460 m de longueur, 960 m de diamètre et peut embarquer entre 4000 et 7000 personnes. Il est propulsé par un réacteur à fusion et peut atteindre 11000 km/s.

Mais en embarquant dans cette aventure, le personnel sait aussi qu'étant donné l'environnement confiné il y a des loisirs et des métiers qu'il ne pourra jamais exercer. Il sait qu'il ne pourra jamais voyager, visiter des pays comme on le fait sur Terre. Avoir ou non de l'argent est sans intérêt puisque chacun peut utiliser gratuitement tout ce qui est à bord tandis que ce qui est usé est recyclé. Monnayer un service, vendre ou acheter un article ne deviendra intéressant que dans un vaisseau spatial rapide assurant par exemple la navette entre des colonies.

Quel métier exercer dans un vaissseau interstellaire sachant que le personnel restera confiné à bord toute sa vie et que les générations suivantes y resteront 25, 50 ou 70 ans avant d'arriver à destination ? Faut-il que tout le monde soit formé aux seuls métiers utiles dans le vaisseau ou laisser le personnel libre de se former dans les disciplines de son choix ? Probablement les deux car il faudra renouveller les métiers en pénurie tout en offrant un minimum de libertés au personnel au risque d'être rapidement confronté à des conflits interpersonnels, des désobéissances, des grèves ou des rébellions.

Sachant que le personnel est isolé et que le voyage durera des décennies, quel sera l'intérêt d'apprendre l'histoire, de passer son permis de conduire, d'avoir une licence de pilote ou d'avoir un diplome dans un domaine artistique, en finance, en science politique, en économie ou en tourisme puisque personne n'en aura l'utilité ? Faut-il simplement étudier pour compléter sa culture générale et passer le temps mais sans espoir de mettre son savoir en pratique ? Aura-t-on besoin de centaines d'ingénieurs, de médecins, d'informaticiens, de mécanos ou d'agents de sécurité ? Que faire lorsqu'on a réussi un examen ou qu'on a atteint ses objectifs ? Peut-on tirer avantage de cette réussite ? Peut-on être promu ? Peut-on changer d'emploi ? Aborder la question sous cet angle n'est peut-être la meilleure façon d'envisager la vie à bord d'un vaisseau interstellaire.

S'il est évident que certaines disciplines et métiers seront délaissés car inutiles, dans un vaissseau interstellaire il sera toujours nécessaire d'avoir à bord des spécialistes comme des pilotes, des ingénieurs, des physiciens, des astronomes, des agronomes, des médecins, des chirurgiens, des dentistes, des psychologues, des nurses, des électriciens, des plombiers, des mécanos, du personnel de sécurité (contrôle des personnes et enquêtes), des experts en cybersécurité (contrôle des accès aux systèmes), des analystes et des développeurs d'applications, des chefs de projets, du support informatique, des cuisiniers, des ouvriers, des manutentionnaires, etc. Il faut également des enseignants et des chercheurs pour enseigner comment cultiver des plantes, élever des animaux, comment fonctionne le système de propulsion, pour maintenir les systèmes de support vitaux en bon état (eau, oxygène, électricité, etc) et résoudre les problèmes qui peuvent se présenter et se présenteront inévitablement à mesure que les appareils vieilliront et approcheront de la fin de leur cycle de vie. De plus, il sera toujours utile de se perfectionner pour mieux comprendre la nature des choses. Le reste s'apprendra sur le tas auprès des collègues, quitte à adapter le cursus académique et les formations continues en fonction des besoins.

Le vaisseau spatial "The Crucible" extrait du jeu vidéo "Mass Effect 3" développé par BioWare pour Electronic Arts.

Côté recherche et développement, c'est-à-dire en sciences appliquées la situation est plus délicate car les progrès et les découvertes dépendront autant des compétences du personnel que des ressources disponibles à savoir les matières premières et les moyens techniques, y compris les infrastructures. Si les conditions sont réunies, les agronomes pourront par exemple créer de nouvelles variétés de plantes ou des animaux plus adaptés au milieu, les biochimistes et les pharmacologues auront le temps d'inventer de nouveaux médicaments tandis que les ingénieurs pourront mettre au point de nouveaux outils ou éventuellement de nouvelles technologies.

Quant à suivre l'actualité scientifique ou des formations continues en différé depuis la Terre, le personnel pourra vite l'oublier. En effet, comme le réseau DSN perdra tout contact avec la sonde spatiale Voyager 1 à quelque 22 milliards de kilomètres ou 148 UA de distance, même équipé sur Terre comme à bord du vaisseau d'une puissante antenne émettrice et réceptrice, à mesure que la distance entre le vaisseau et la Terre augmentera, il y aura un décalage temporel de plus en plus important qui se chiffrera d'abord en jours puis en semaines et finalement en années.

A moins d'exploiter de nouvelles technologies adaptées aux communications galactiques, au-delà de quelques centaines de milliards de kilomètres de la Terre le signal ne sera probablement plus discernable dans le bruit de fond galactique et passera sous le seuil de détection. Le vaisseau spatial ne pourra plus capter les émissions terrestres ni communiquer avec la Terre et le personnel sera vite confronté à une documentation et des actualités périmées dont la dernière mise à jour remonte à quelques années ou décennies après le début de la mission (tout dépend de la vitesse du vaisseau). Incidieusement cela va accentuer le fossé culturel qui sépare dorénavant les Colons des Terriens.

En prévision de cette coupure définitive du cordon ombilical qui relie les Colons à la Terre, il faudra donc qu'avant le début de la mission, le vaisseau ait embarqué toutes les encyclopédies et si possible toute la mémoire de l'humanité stockées sous format numérique et que des ordinateurs puissent la redistribuer à tout le personnel de la manière la plus simple. L'intelligence artificielle sera également la bienvenue pour aider le personnel à établir des diagnostics.

Extrait du jeu vidéo "Mass Effect: Andromeda" développé par BioWare pour Electronic Arts.

Autre sujet de préoccupation, que fera le personnel durant son temps libre puisqu'il est confiné à bord ? Qui ne s'est jamais ennuyé lorsqu'il était en visite dans sa famille ou chez des amis, voire même en vacances ? Dans ce cas, l'ennui dure peu de temps et on garde le moral car on sait soit qu'on retournera finalement chez soi et qu'on retrouvera les siens ou ses objets familiers soit qu'il est prévu des activités dans les heures où les jours qui suivent. Si l'ennui devient trop pesant, on peut aussi sortir et prendre l'air. En revanche, dans un vaisseau interstellaire, la situation est toute différente et les contraintes très nombreuses.

Déjà sur Terre, les marins au long cours qui restent six mois en mer à bord de paquebots, de cargos ou de sous-marins finissent par s'ennuyer pendant leurs quartiers libres, ils souffrent de solitude, leur famille restée à terre leur manque ainsi que le contact avec la vie urbaine et la pratique d'autres loisirs, même si après avoir mis pied-à-terre ils souhaitent rapidement retourner en mer.

A bord d'un vaisseau interstellaire, il ne sera même pas question de se dépayser en allant voir ailleurs ce qui se passe car les rares écoutilles donnant sur l'extérieur sont verrouillées. La question des voyages étant résolue, il reste la solution de la réalité virtuelle mais qui ne sera jamais qu'un erzat du monde concret. Dans un vaisseau spatial la pratique des sports est limitée par la disposition des lieux. Si on prend des grands bâtiments comme les portes-avions, généralement la "salle de sport" se résume à un hangard temporairement aménagé et au mieux à la superficie d'une salle de sport. S'il y peut-être une piscine à bord du vaisseau, pas question pour autant de pratiquer la plongée sous-marine et d'explorer des récifs coralliens comme sur Terre. Pas question de faire du surf, de la planche à voile, du parachutisme, juste peut-être de l'escalade en salle, de la musculation et du jogging dans un espace confiné ou sur un tapis de course. Oubliez le bruit des vagues déferlant sur la plage car vous n'en verrez plus jamais, oubliez l'idée de chercher des coquillages, des fossiles, des minéraux ou votre passion pour la botanique car rien de tout cela n'existe à bord. Il y a juste du sable artificiel et des plantes de culture qui sont avec un peu de chance cultivées en plein terre mais probablement réduites à des cultures hydroponiques. Oubliez aussi l'idée de bronzer au Soleil sous une douce brise car à bord cela se fera dans un coin amenagé ressemblant à un studio sous les UV d'une lampe artificielle et un décor holographique ou de carton-pâte.

Le vaisseau interstellaire "ISV Venture Star" de 1.5 km de ongueur imaginé par la fondation Tau Zero qu'on retrouve dans le film "Avatar" (cf. cet article sur la plausibilité de ce projet). Propulsé par de l'hydrogène et de l'antihydrogène, il permet d'atteindre Alpha du Centaure en 1 an, soit 30000 fois plus vite qu'une sonde spatiale de la classe Voyager.

Arrivés en fin de carrière, comment occuper les seniors de la première et deuxième générations, les suivantes ayant la chance de débarquer dans le nouveau monde ? Déjà de nos jours, certaines personnes pensionnées et isolées, n'ayant pas de hobby et ne pratiquant aucun sport se plaignent d'avoir perdu tout contact avec la vie active, de ne plus parler à personne, de rester oisive et de s'ennuyer quand la maladie n'envenime pas le quotidien. Rétrospectivement, sans même parler de l'aspect financier, certains pensionnés auraient préféré continuer à travailler tant que leur santé le permet - donc bien au-delà des 58 ou 65 ans - afin de se sentir utile à la société et garder le contact avec la population active. 

Que ce soit sur Terre ou dans un vaisseau spatial, si on peut gérer les problèmes de santé, l'ennui et l'oisiveté peuvent vite se transformer en problèmes. La variété des hobbies est limitée par l'environnement et on peut imaginer que les lieux de rencontre et de détente comme les salles de sport, les bars, les clubs de loisirs et les bibliothèques voire même les classes de formations seront assez fréquentées par toutes les personnes qui veulent passer agréablement le temps, cherchent le contact ou souhaitent s'instruire. Mais les passions vont et viennent et peuvent finir par lasser les plus motivés.

Enfin, il est naturel qu'un jour ou l'autre la maladie survienne ou que la mort entraîne vos meilleurs amis. Quand votre mémoire ne défaille pas, ce sont vos dernières références au temps passé qui disparaissent et avec elles vos souvenirs. Vient alors le jour où on se demande si cela vaut encore la peine de vivre.

Bref, au bout de quelques années ou lors d'une longue période d'inactivité, le manque de motivation et la déprime voire la dépression et ses conséquences guêtent tout le personnel et certainement les plus âgés. Un moment ou un autre la nouvelle génération qui aura perdu tout contact avec les Terriens et n'aura jamais fait l'expérience de leur mode de vie, se demandera peut-être si le voyage en vaut la peine, si cela vaut le coup de passer sa vie isolé dans un vaisseau spatial à s'occuper des machines et du bien-être du personnel ? Ne sont-ils pas passés à côté de l'essentiel, à savoir vivre pleinement sur une planète, faire des projets familiaux, voyager et apprécier ses amis et la nature ?

L'évolution du langage

Dans le film "Premier Contact" ("Arrival") de Dennis Villeuve sorti en 2016 dont une image est présentée ci-dessous, des experts sous la direction de la linguiste Louise Banks (Mary Adams) essayent de communiquer avec des extraterrestres physiquement très différents des humains et dont la culture est a priori incompréhensible. Effectivement, seuls des linguistes et des experts en communication peuvent éventuellement résoudre ce problème et tenter d'établir un contact.

Document extrait du film "Arrival" (Premier Contact) de Denis Villeneuve (2016).

Dans le cas d'un vaisseau interstellaire générationnel abritant des centaines de personnes, étant donné que le voyage s'étendra sur plusieurs générations, inévitablement la langue de l'équipage va évoluer. En effet, déjà de notre vivant les enfants utilisent des expressions que ne connaissent pas leurs parents et des néologismes inventés au fil de l'évolution culturelle, des influences étrangères et des innovations technologiques notamment. Certains mots sont finalement reconnus comme faisant partie de l'évolution linguistique et sont ajoutés au dictionnaire tandis que les plus anciens et les moins usités sont retirés. Répétez ce phénomène à chaque génération, on constate finalement que le français du XXIe siècle n'est pas celui parlé au Moyen-Âge par exemple. Nous avons même du mal à relire les anciens textes en "françoys" (prononcer franswè) du XIIe siècle (cf. l'ancien français) car le vocabulaire, l'écriture et les règles de grammaire ont évolué.

Imaginons à présent un ou plusieurs vaisseaux générationnels explorant la Galaxie durant des siècles. Si au départ le personnel resté sur la Terre et les équipages parlaient la même langue aux accents et intonations près, à l'arrivée il est probable que les équipages parleront une langue sensiblement différente. En effet, au fil des générations, les équipages ont fini par utiliser un vocabulaire propre à la population de leur vaisseau. La différence n'est pas sensible d'un vaisseau spatial à l'autre tant que les équipages discutent entre eux ou se rendent visite. Mais leur langue a fini par se différencier de celle des Terrriens restés sur Terre. Ils se comprennent encore mais la différence sera de plus en plus marquée à mesure que les siècles s'écoulent. Finalement, dans le cas de l'anglais qui est déjà considéré comme la langue universelle, "l'anglais des vaisseaux" (Vessel English) sera distinct de l'anglais parlé sur Terre.

Dans une étude publiée dans les "Acta Futura" en 2020, Andrew McKenzie et Jeffrey Punske, linguistes de l'Université du Kansas et de l'Université du sud de l'Illinois ont décrit ce problème ainsi que dans un exposé intitulé "Language development during interstellar travel". En résumé, les chercheurs estiment qu'"Un voyage durant plusieurs générations, la langue peut différer considérablement à l'arrivée de celle des passagers de départ." Le problème serait aggravé par le fait que "l'anglais des vaisseaux" serait unique à chaque vaisseau, de sorte que les équipages de deux vaisseaux arrivant sur la même planète parleraient un dialecte différent, voire une langue complètement différente.

La question éthique du vaisseau générationnel

Compte tenu des problèmes qui malheureusement ne manqueront pas de se poser à l'équipage contraint de vivre en vase clos peut-être toute sa vie s'il s'agit d'un vaisseau générationnel, sachant les conséquences psychologiques de ce confinement, sans même parler du coût et des risques d'une telle mission, les autorités responsables peuvent-elle accepter de s'engager dans un tel projet au nom de l'humanité ?

Document Archillect.

Dès lors qu'on sait que l'équipage va se sacrifier pour mener à bien cette mission, n'y a-t-il pas une éthique à respecter, des valeurs morales et des choix de condition humaine, de vie qu'on ne peut pas accepter en vertu du fait que chacun a le droit de vivre librement dans les meilleures conditions ? Peut-on demander à un équipage de se sacrifier pour un projet scientifique aussi ambitieux soit-il ou même accepter que des volontaires s'engagent dans cette mission ? Peut-on imposer un contrôle des naissances à l'équipage ? Si un équipage composé d'adultes volontaires peut faire ce choix délibérément et accepter ces contraintes, peut-on l'accepter au nom des générations futures qui vivront à bord d'un tel vaisseau et qui n'ont pas eu l'opportunité de choisir leur vie ? Certes, même ici bas, personne ne peut "choisir" sa vie, mais selon sa condition, il peut en principe choisir son avenir. Ce choix arbitraire qu'auraient les adultes de la première génération d'imposer l'avenir de leurs enfants, fait-il aussi partie de la "condition humaine" ?

Si on accepte sur terre qu'il y ait des pauvres et des riches par la force des choses, des personnes sans éducation et d'autres universitaires, des ouvriers sous-payés, des fonctionnaires internationaux et de hauts managers gagnant dix fois plus que des employés et des politiciens ou des sportifs milliardaires, peut-il en être de même quand il s'agit de préparer un équipage et donc sa descendance pour une mission interstellaire sans retour ? Qui pourrait interdire aux génération futures de choisir leur vie et en particulier d'exercer le métier qu'ils veulent, de gagner ou non beaucoup d'argent, d'avoir des enfants, de faire des voyages d'agrément ou de ne pas vouloir passer leur vie dans un vaisseau spatial ? Qui prétendrait savoir ce que les générations futures accepteront et à quel avenir elles aspirent ? Qui pourrait parler en leur nom ? À toutes ces questions, les réponses sont un silence lourd de sens. C'est bien la preuve que cela pose un sérieux problème moral.

Ce sont des questions éthiques auxquelles même les philosophes comme Neil Levy de l'Université d'Oxford ni personne n'ont vraiment de réponse définitive. On peut imaginer que ce problème va sérieusement contrecarrer la réalisation du projet avant même qu'il soit validé.

En revanche, pour tous les autres sujets (techniques, administratifs, organisationnels, etc), si nos descendants envisagent un jour de conquérir les terres du ciel, ils devront y répondre, non pas dans l'abstrait ni même sur base de résultats de simulations au risque de prendre des décisions peu réalistes en situations réelles mais sur base de retours d'expériences vécues ou très proches de la situation réelle que l'équipage vivra.

Si le vaisseau générationnel pose des problèmes autant techniques qu'éthiques, comme alternative peut-on envisager un voyage interstellaire à vitesse relativiste dont la durée serait compatible avec les activités humaines ?

Les effets du vol relativiste

Pour des voyages interstellaires, si le vol relativiste est une solution envisageable réaliste, comme nous l'avons expliqué, vu la vitesse du vaisseau il offre de sérieux défis sur le plan technique et met en exergue un problème psychologique inévitable et insurmontable. En effet, si les futures générations d'ingénieurs parviennent à mettre au point un système de propulsion relativiste, malgré toute leur science, leurs formules et leurs robots, ils seront toujours incapables de gérer l'émotion humaine liée aux effets de la dilatation du temps. Non pas celle qu'on ressent en s'émerveillant devant la nature qui est facile à gérer mais le choc émotionnel qui vous envahit lorsqu'on prend conscience de son impuissance à gérer le temps qui passe et du temps perdu quand on est isolé dans un vaisseau spatial ou sur une autre planète et loin de ceux qu'on aime.

Le temps qui passe. Voici la version animée (fichier .MP4 de 7.5 MB). Document 100 Year Starship.

Les agences spatiales surveillent de près l'état psychologique des astronautes et ont déjà noté des sauts d'humeur, des refus d'ordre, des abandons et des idées étranges suite à une surcharge de travail et la promiscuité. 

Si tous les astronautes ont fait l'expérience des inconvénients du confinement et des contraintes propres à un séjour prolongé dans un vaisseau spatial, aucun astronaute n'a fait l'expérience du choc psychologique du retour d'un vol relativiste et de retrouver la Terre plus âgée de quelques décennies ou quelques siècles. Le risque de ne plus se sentir à sa place dans ce monde devenu étranger et bien relatif et de sombrer dans la dépression est réel.

Si certains lecteurs rêvent de voir la Terre et comment nos descendants vivront dans le futur, personne n'est préparé au choc culturel et il n'est pas certain que nous apprécierons tout ce que nous découvrirons comme H.G. Wells nous l'expliqua dans "La machine à explorer le temps" (1895). Car imaginer le futur en étant confortablement assis dans un environnement familier et entouré des siens est une chose, le vivre dans sa chair en ayant perdu tous ses repères est une autre expérience. C'est en cela que le retour d'un vol relativiste risque d'être traumatisant pour son voyageur.

Le personnel embarqué dans cette aventure doit non seulement tenir compte mais également vivre avec les effets de la relativité (restreinte aux mouvements uniformes mais aussi générale sous l'infuence de champs gravitationnels intenses). En effet, si nous connaissons en théorie ses effets les plus spectaculaires comme le ralentissement du temps qui touche les communications avec tout interlocuteur vivant dans un autre référentiel comme par exemple sur la Terre, la contraction des distances et l'effet Doppler sur le rayonnement (cf. l'aspect du disque d'accrétion d'un trou noir) y compris sur le délai de latence des communications, personne n'en a jamais fait l'expérience réelle. Aucun astronaute n'a jamais patienté des années pour recevoir la réponse à un question ou fait l'expérience de rester seul pendant des décennies dans un vaisseau spatial à la dérive ou coincé sur un astre perdu dans le ciel et attendant des secours qui tardèrent à venir. Personne n'a connu la solitude de l'attente d'une personne chère partie faire un "bref" voyage dans les étoiles qui dura toute une vie. A part quelques familles séparées pendant des années ou des décennies ou quelques soldats qui se sont crus en guerre et se sont isolés du monde pendant 40 ans, personne n'a été confronté pendant son absence au vieillissement des personnes qu'il aimait. Ce type d'expérience risque aussi d'être traumatisante, même pour les plus endurcis.

Le film "Interstellar" de Christopher Nolan (2014) qui dure près de 3 heures nous a donné un avant-goût a priori réaliste des effets d'un vol relativiste grâce aux conseils scientifiques du professeur Kip Thorne, notamment des effets de la relativité sur les distances parcourues, sur le rayonnement, sur le temps relatif écoulé et des émotions ressenties par les différents personnages selon qu'ils subissent ou non les effets relativistes. Même si le scénario nous donne un aperçu très hollywoodien d'un vol près d'un trou noir dans la droite ligne des films de Steven Spielberg (qui est l'auteur du scénario original), c'est le premier film de divertissement qui décrit avec autant de précision ces phénomènes très éloignés de notre quotidien.

Celui qui redoute les effets de la distorsion spatio-temporelle a le choix de ne pas embarquer dans cette aventure soit de ne pas faire demi-tour pour ne pas être confronté au vieilissement de ceux qu'il laissa derrière lui. Comme nous l'explique "Interstellar", il ne faut pas aller très loin pour en faire l'expérience car il suffit de partir en mission près d'un trou noir pour que le temps nous joue un mauvais tour. Dans ce cas, le voyageur intrépide n'aura pas d'autre choix que de vivre avec ses souvenirs ou d'essayer d'oublier son passé et de vivre le temps présent qui sera de toute façon sa seule référence stable durant la durée de son voyage.

A voir : Interstellar – Building A Black Hole – Official Warner Bros.

A lire : Visualisation d'un trou noir en rotation et dans le film Interstellar, K.Thorne et al., 2016

Gravitational lensing by spinning black holes in astrophysics, and in the movie Interstellar

A gauche, aspect général du trou noir Gargantua et de son disque d'accrétion dans le film "Interstellar" de Christopher Nolan sorti en 2014 basé sur les conseils scientiques de Kip Thorne. A droite, gros-plan sur le vaisseau interstellaire "Endurance" dont voici deux autres images vues de face et de l'arrière. Documents Paramount Pictures/Warner Bros Pictures.

Bref, en s'embarquant dans un vol interstellaire relativiste, à moins de rester à quelques années-lumière du système solaire ou de ne jamais s'approcher de champs gravitationnels ou magnétiques très intenses (tous deux contiennent de l'énergie), on se condamne à ne pas regarder en arrière et à faire un trait sur le passé pour vivre une expérience unique à travers le temps et l'espace. Dans ces conditions, il risque de ne pas y avoir beaucoup de volontaires.

La dernière solution et la plus pratique reste donc le Warp drive qui permet de "recourber" l'espace-temps ou alternativement de tirer profit d'un trou de ver qui produit un effet analogue. Autant dire qu'en l'état actuel de nos connaissances et sans doute pour longtemps, ce sont des inventions utopiques.

Si l'équipage d'un vaisseau interstellaire doit vivre avec des risques, est-il possible de les réduire ?

Réduire les risques

Existe-il un moyen de réduire les risques décrits ci-dessus ou de ne pas exposer l'équipage à ces risques et ces problèmes potentiels ? Nous avons expliqué que certains risques liés au profil même de la technologie utilisée comme le vol relativiste doivent être acceptés et donc gérés, tandis que les risques résiduels ne peuvent pas être éliminés par définition comme tous les risques non cartographiés et inconnus, d'autres pouvant effectivement être calculés, prédits, réduits ou contournés selon les circonstances.

Pour un vol interstellaire, l'une des solutions est de mettre le personnel en état d'hibernation pour la durée du voyage, le vol étant assuré par un pilote automatique. Encore faut-il que cette technologie existe, soit fiable et fonctionne sans discontinuer durant au moins un siècle. Mais l'état d'hibernation a des conséquences sur l'entourage, notamment le vieillissement de ceux qui n'ont pas bénéficié du système cryogénique. Au réveil, le choc risque d'être traumatisant.

Si le processus d'hibernation est maîtrisé et sans risque, ce serait une solution intéressante. Mais comme il existe des risques en anesthésie, on peut se douter que le processus d'hibernation ne sera pas 100% fiable ou, s'il l'est, qu'il présente des effets indésirables qui  vont conduire les responsables à décliner toute responsabilité en cas d'accident. On connaît ce problème en médecine, il n'y a donc aucune raison que leurs émules du futur agissent autrement.

Aussi infime que soit le risque, il sera exclu de cryogéniser qui que ce soit si on ne peut pas garantir qu'il se réveillera sain de corps et d'esprit. Dans ce cas, il faut envisager soit le vol relativiste avec ses effets temporels et psychologiques soit le Warp drive qui n'entraîne aucune séquelle chez les personnes subissant cette distorsion spatio-temporelle. Espérons que nos descendants parviendront à mettre au point l'une ou l'autre technologie sinon l'exploration des étoiles sera vraisemblablement retardée d'autant.

Ainsi qu'on le constate, si on exclut l'hibernation en raison des risques potentiels de cette technologie, un vol interstellaire habité non-relativiste ou sans possibilité de "recourber" l'espace-temps est irréaliste pour de nombreuses raisons pratiques. Si le défi n'est pas insurmontable dès lors qu'il y aurait des volontaires prêts à sacrifier leur vie pour vivre à bord d'un vaisseau interstellaire, des principes éthiques viennent également s'opposer à sa réalisation compte tenu de la durée et de la fragilité de la vie humaine. Enfin, économiquement et politiquement il faudrait une bonne raison pour accepter de développer un tel projet sans retour sur investissement.

Embarquement retardé

Ayant pris connaissance des aspects négatifs d'un vol interstellaire habité "centenaire", nous savons à présent quels sont les choix à ne pas faire et les moyens à mettre en oeuvre pour réduire les risques d'une telle aventure. Ne pas les respecter signifie que l'équipage, le personnel et les éventuels touristes seront confrontés à long terme à des problèmes graves pouvant mettre leur vie en danger. Que peut-on déduire de cette analyse ?

Il serait très sage que nos descendants ne se risquent pas dans un voyage interstellaire relativiste sans avoir mis tous les atouts de leur côté et donc sans s'être assurés que la durée de vie à bord ne dépasse pas une fraction de la durée de vie humaine, disons 10 ans ce qui est déjà une durée excessivement longue pour vivre dans un environnement confiné. 

Quel intérêt auraient les passagers à vivre durant des générations en vase clos à entretenir des machines et à s'atrister sur leur sort, sans connaître la douceur de vivre sur une planète et sans profiter des plaisirs de la vie ? De plus le facteur γ entrevu précédemment, c'est-à-dire le facteur de contraction de FitzGerald-Lorentz (cf. le voyageur de Langevin) doit rester faible si à son retour de voyage le personnel ne veut pas être confronté au vieillissement "accéléré" de la population restée sur Terre. Bien entendu, s'il ne compte pas revenir, le problème ne se pose pas mais le temps écoulé ailleurs que dans le vaisseau sera dans tous les cas accéléré.

A n'en pas douter, si la colonisation de l'espace devient un jour une réalité, nos descendants devront maîtriser le vol relativiste et ses conséquences ou être capables de "recourber" l'espace-temps et avoir solutionné ses contraintes.

Des femmes astronautes explorant de nouveaux mondes. Documents T.Lombry.

On peut donc en conclure que faute de moyens et d'un cahier des charges suffisamment élaboré, bref de maturité en la matière, l'embarquement à destination du premier système extrasolaire abritant une exoplanète jumelle de la Terre est retardé. Seule alternative, on peut envoyer des sondes robotiques visiter ces nouveaux mondes, ce qui sera vraisemblablement la première solution que choisiront les agences spatiales voire même les entreprises spatiales privées.

Mais un jour, un vaisseau interstellaire embarquant des milliers de personnes traversera la Voie Lactée en l'espace de quelques semaines (Warp drive) ou quelques années (vol relativiste) et accostera en douceur dans les parages d'un îlot de verdure à des milliers d'années-lumière de la Terre. Ces colons bien décidés à conquérir leur Terre promise coloniseront un nouveau monde et fonderont là-bas une nouvelle civilisation en espérant qu'ils tireront les leçons du passé. C'est en tous cas tout le bonheur qu'on peut leur souhaiter, même si cela reste comme on dit, de la science-fiction.

Enfin, de manière plus générale on peut analyser le problème de la croissance de la population et son impact sur le développement d'une civilisation parvenue à l'âge spatial. Parmi les questions ouvertes, le développement d'une civilisation a-t-il une limite et quelle est-elle ? La colonisation de l'espace résout-elle le problème démographique ? Essayons humblement de répondre brièvement à ces questions.

Equilibre ou expansion ?

Nous savons que la conquête de nouveaux territoires n'est pas une fin en soi car à terme on rencontre toujours des problèmes d'ordre démographique et socio-économique avec leurs conséquences parfois dramatiques. Par conséquent, dans une vision à très long terme - on parle de milliers ou de centaines de milliers d'années dans le futur - que l'on découvre ou pas un moyen de propulsion performant qui nous permettrait d'explorer rapidement la Galaxie, sa colonisation ne sera pas non plus une fin en soi.

Une sonde de Von Neumann de la taille d'un vaisseau spatial. Document Charles Ofria.

Bien que seuls nos lointains descendants pourront confirmer cette thèse, si nous nous basons sur notre propre expérience de la conquête du monde, on peut extrapoler que nos problèmes démographiques se retrouveront sur d'autres planètes à une échelle décuplée. A terme, nous ne pourrons jamais conserver notre espace vital si la population s'accroît ne fut-ce que linéairement. Nous devrons toujours trouver de nouvelles planètes à coloniser.

Pour commencer, nous devons trouver des planètes habitables dans la Galaxie (on peut aller plus loin mais inutile de gaspiller des ressources sachant qu'il existe des milliards d'exoplanètes dans la Voie Lactée).

Avant qu'on ne découvre des exoplanètes dans la région habitable de beaucoup d'étoiles, certains auteurs imaginaient que la solution la plus efficace consistait à envoyer dans toute la Voie Lactée des sondes dites de "Von Neumann". Ce sont des vaisseaux spatiaux intelligents, moitié sondes d'exploration moitié robots conçus pour explorer les système stellaires et capables de fabriquer des usines qui reproduiraient des copies d'eux-elles par milliers. Chaque sonde repartirait ensuite explorer d'autres systèmes stellaires et chacune nous signalerait tous les mondes propices à la vie. Cette technologie peut être plus ou moins sophistiquée, utilisant soit des sondes spatiales similaires à nos sondes d'exploration actuelles soit des nanosondes ou des hybrides biomécaniques équipés d'intelligence artificielle.

A condition que notre civilisation survive au risque d'extinction, pendant que ce catalogue serait en cours d'élaboration, les premiers vaisseaux interstellaires habités pourraient s'envoler à la conquête des exoplanètes habitables les plus proches. En quelques centaines de milliers d'années ce sont des trillions de sondes de Von Neumann qui exploreraient ainsi toute la Voie Lactée à une vitesse qui atteindra finalement celle de la lumière.

Avec le recul, on peut se dire que cette méthode représente beaucoup de gaspillage quand on peut être plus efficace en ciblant nos objectifs et en envoyant directement ces sondes vers les exoplanètes identifiées depuis la Terre et a priori propices au développement de la vie. Ceci dit, rien n'empêche une civilisation avancée de compléter son catalogue galactique en lançant tout azimut des sondes de Von Neumann.

Concernant la démographie humaine, comme toutes les populations d'êtres vivants, l'humanité ne peut survivre que si elle se multiplie. Chez les animaux, on estime qu'une population s'effondre en dessous de 5000 individus. Mais déjà à partir de 100000 ou 50000 individus, l'espèce est vulnérable et est d'ailleurs reprise sur la liste rouge de l'IUCN. Même avec toute sa science et sa technologie, l'être humain n'échappe pas à cette règle naturelle.

Si des colons explorent un jour une autre planète, si on veut éviter l'extinction de la colonie, on estime qu'il faut rassembler 10000 personnes, idéalement choisies aléatoirement, pour avoir quelques chances que l'humanité survive sur cette planète. Cela fait beaucoup de personnes à transporter et d'immenses vaisseaux spatiaux.

En revanche, il en va tout autrement si on envisage une colonisation spatiale constante. Dans ce cas, on a calculé qu'en l'espace d'un demi-million d'années à quelques dizaines de millions d'années, nous aurons atteint l'extrémité de la Voie Lactée et la population ne fera que croître. Nous pourrons faire le saut vers la galaxie d'Andromède ou M33 et nous disséminer à travers tout l'Univers. Mais un jour ou l'autre le taux de croissance de la population devra être réduit d'un facteur 10 ou 100. Cette stagnation de la population est inévitable, quelle que soit l'extension des colonies. C'est une question de temps bien sûr, mais aussi socio-économique.

Les limites de l’expansion spatiale

Distance atteinte (a.l.)

Taux de croissance (%)

490

2

978

1

9780

0.1

97800

0.01

Pour éviter les conflits socio-économiques dans les colonies spatiales, chacun devra préserver son espace vital comme nous le faisons sur Terre. Les économistes considèrent qu’une population de 200000 habitants lancée chaque jour dans l’espace pourrait coloniser la Voie Lactée sans entraîner de problèmes démographiques. Si la population s’accroît plus rapidement, l’espace vital individuel commencera à diminuer. Pour éviter d’en arriver là, afin d’assurer le bien être du plus grand nombre, le taux de croissance devra être réduit d’un facteur 100.

Extrait de E.Davoust, “Silence au point d’eau”, Teknea, 1988, p71.

De nos jours sur Terre, en fonction de l’importance que l’on accorde à l’alimentation du bétail, les économistes et les démographes ont calculé que notre planète pouvait alimenter entre 3 et 40 milliards d’individus, sachant que 90% des ressources que l’on donne à un maillon de la chaîne alimentaire, au bétail en l’occurrence, est à jamais perdu.

Pour vivre, nous devons cultiver, exploiter le sol, nourrir le bétail, faire des réserves. Si notre consommation s'accélère, au bout d'un certain temps les stocks se réduiront à une peau de chagrin. A ce moment là de deux choses l'une : soit la prospection de nouvelles ressources sera encouragée soit ce sera le scénario catastrophe[16]. Mais la recherche d'une ressource est liée au développement des sciences et des techniques.

Si les problèmes démographiques, politiques ou écologiques s'emballent, nos descendants feront comme les sociétés polynésiennes : ils seront condamnés à vivre sur leur îlot galactique alors que le monde regorge d'archipels luxuriants. Cela n'intéressera plus personne d'aller voir là haut ce qui se passe. On critiquera les dépenses énergétiques, le peu de scrupules des gouvernements et on posera la question de la croissance démographique.

Il est donc impératif de discuter des ressources d'énergie et de la politique scientifique pour toutes ces raisons. Si la croissance des populations est contrôlée ou si notre technologie le permet, la curiosité incitera nos descendants à explorer les galaxies.

En conclusion, la colonisation de l'univers comme finalité perd son sens. Doublement quand on sait que le milieu galactique est très hostile et qu'il est hasardeux de s'y aventurer. On ne peut pas non plus toujours vivre en autarcie, isolé dans un vaisseau spatial. Quelques hommes s'y risqueront malgré tout, tout comme il y a trois millions d'années, Lucy explora la vallée voisine de son berceau. Jetant un oeil au ciel, elle n'imaginait pas qu'un jour ses petits enfants lui feraient un signe d'entre les nuages.

Rendez-vous sur Bespin, la Cité des Nuages. Document Star Wars (Episode V).

Faites de beaux rêves...

Pour plus d'informations

ESA

Horizons Newsletter, AIAA

Académie Internationale d'Astronautique (IAA)

100-Year spaceship

Space Studies Institute

National Space Society

The Future of Human Evolution

Tau Zero Foundation (et le groupe Facebook)

SpinCalc (calcul de vitesse angulaire)

Physics Calculators : Radiation Pressure, Space Travel, E=MC2, Omni Calculator

Breakthrough Starshot (nanosondes à voile photonique)

Interstellar travels aboard radiation-powered rockets, André Füzfa, Phys. Rev. D 99, 104081, 31 May 2019

What Will It Take for Humans to Colonize the Milky Way?, Scientific American, 2016

The colonization of space (en format HML sur NSS) Gerard K. O'Neill, Physics Today, Vol.27, 9, pp32-40, September 1974

Space Settlements. A Design Study, NASA, 1977 (PDF couleurs. La plupart des livres vendus sous ce titre sont des réimpressions N/B)

Measurement of Impulsive Thrust from a Closed Radio-Frequency Cavity in Vacuum (EM Drive), NASA/ARC, 2016

Interstellar Transport (PDF), Freeman J. Dyson. Physics Today, 1968, pp.41–45 (vaisseau Super Orion)

Evaluating NASA’s Futuristic EM Drive, NASA Spaceflight, 2015

2001: l'odyssée de l'espace, Allociné

2001: l'odyssée de l'espace (explication du film)

A Realistic Look At The Gateway Foundation & Von Braun Station, Scott Manley, YouTube

The Future of Space Tech, Mark Garlick, 2022,YouTube

Roger Shawyer Explaining The Basic Science behind #EmDrive, YouTube

The Roundtable TV Interview (I.Asimov et G.K.O'Neill, 1975), YouTube

Von Braun Space Station 1956, YouTube

Propulsion Warp drive

Richard Obousy Consulting

How NASA might build its very first warp drive, Gizmodo, 2011

Warp Field Mechanics 101 (PDF), Harold White, NASA/JSC, 2011

Warp Drive, Dark Energy, and the Manipulation of Extra Dimensions (PDF), 2010

Putting the Warp into Warp Drive, Richard K. Obousy et Gerald Cleaver, arXiv, 2008

The warp drive: hyper-fast travel within general relativity (en PDF sur arXiv), Miguel Alcubierre, Classical and Quantum Gravity, 2000

Warp Drive With Zero Expansion, Jose Natario, arXiv, 2002

Quelques livres (cf. détails dans ma bibliothèque dont la rubrique Instruments)

En français

L'Humain dans l'espace. Entre réel et fiction, Roland Lehoucq et Florence Porcel, La Martinière, 2021

La conquête de l'espace, Giles Sparrow/Collectif, Flammarion, 2008

Le spatiopithèque, Christian Alexandre et al., Le Mail, 1987/1994

Silence au point d’eau, Emmanuel Davoust, Teknea, 1988

Rendez-vous avec Rama, Arthur C.Clarke, Harcourt, 1973 (uk); Robert Laffont, 1975; J'ai lu, 1980/2002/2011/2014

En anglais

Interplanetary Travel: An Astronomer's Guide, Sten Odenwald, CreateSpace Independent Publ. Platform, 2015

The Art of Space, Ron Miller, Zenith Press, 2014 (en français)

The Science of Interstellar, Kip Thorne et Christopher Nolan, W.W.Norton and co., 2014

The Visioneers, Patrick McCray, Princeton University Press, 2012

Making Starships and Stargates, James F. Woodward, Springer-Verlag, 2012

International Space Station. Owners' Workshop Manual, David Baker, Haynes Publishing, 2012

The Generation Starship in Science Fiction, Simone Caroti, McFarland & Co Inc., 2011

Theater of Memory against a Background of Stars: A Generation Starship Concept between Fiction and Reality, Simone Caroti (PDF), 2009

Lunar Settlements, Haym Benaroya, CRC Press, 2010

Lunar Outpost, Erik Seedhouse, Springer-Verlag NY, 2008

Space Enterprise, Philip Robert Harris, Springer-Verlag NY, 2008

Interstellar Travel and Multi-Generational Space Ship, Yoji Kondo et al., Collector's Guide Publishing, 2003

Project Orion: The True Story of the Atomic Spaceship, George Dyson, Henry Holt & Company, 2002

The Art of Chesley Bonestell, Ron Miller et Fred Durant, Paper Tiger, 2001

Pale Blue Dot, Carl Sagan, Random House, 1994; Headline Book Publ., 1996; Ballantine Books, 1997

The Starflight Handbook. A Pioneer’s Guide to Interstellar Travel, E.Mallore/G.Matloff, John Wiley & Sons, 1989 (print on demand)

The High Frontier, G.O'Neill, William Morrow & Co, 1976; Jonathan Cape Ltd, 1977; Space Studies Inst. Press, 1989; Apogee Books, 2000

Colonies in Space, T.A.Heppenheimer, Stackpole Books, 1977; Warner Books, 1980

Space Resources and Space Settlements (PDF), s/dir. Gerard K. O'Neill, SP-428, NASA/ARC, 1977

History of rocketery and space travel, Wernher von Braun et al., Ed. Thomas Y.Crowell, 1966/1969/1975

Constantin-E. Tsiolkovski précurseurs des vaisseaux interplanétaires, P.Bailhache, Ed.du Pont Royal, 1961

The Exploration of Mars, Wernher von Braun et Willy Ley, illustr. C.Bonestell, Viking Press, 1956

Conquest Of the Moon, Wernher von Braun, illustr. C.Bonestell, Viking Press, 1953

The Conquest of Space, Chesley Bonestell et Willy Ley, Viking Press, 1950; Guilde du Livre (vf), 1952

Across The Space Frontier, Wernher von Braun et al., illustr. C.Bonestell, Viking Press, 1952.

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[16] Lire à ce sujet les oeuvres des économistes Malthus, S.Cole, G.O'Neill ou les rapports du Cercle de Rome.


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