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Le Soleil

"Un peu de pluie sur le Soleil" comme fut intitulée cette image enregistrée par le satellite SDO le 19 juillet 2012 à 12h30. Cette protubérances en boucle fut filmée dans la raie He II à 304 Å. Son évolution photographiée durant plus de 9 heures est présentée en accéléré (time-lapse) sur YouTube.

Le transport de l'énergie (IV)

Comment le Soleil dissipe-t-il son énergie ? Son atmosphère est-elle homogène ou y a-t-il des zones de gradients ? Ces questions ont soulevé bien des controverses depuis le développement de l'astrophysique solaire. Les astronomes ne savent pas encore précisément comment le Soleil transporte son énergie vers la surface. On sait toutefois que sa structure répond à l'état de la matière et aux processus qui se développent dans son noyau.

Pour assurer son équilibre, à l'image d’une bouilloire, le Soleil est obligé de libérer l'énergie qu'il produit dans son noyau. Ce rayonnement se propage jusqu'à la surface et se dissipe dans l'espace. Cette fonction de "ventilation" est très importante car si son énergie interne ne pouvait s'échapper, la pression interne augmenterait et le Soleil exploserait rapidement. Cette énergie doit donc être dissipée et si possible sans faire obstacle au développement du Soleil, c'est-à-dire sans contraindre les réactions thermonucléaires. Cette énergie est transportée selon deux modes :

- Le transport par rayonnement, qui est un processus par lequel l'énergie centrale est transformée par les successions d'émissions et d'absorptions atomiques à mesure qu'elle monte vers la surface. L'énergie est ainsi diffusée sur tout le spectre. Ce mode de transport se développe dans la zone radiative qui s'étend entre la limite du noyau et la couche interface située à la base de la zone convective, soit entre 25 et 74% de la distance du centre à la surface solaire. Dans cette zone de radiation règne un calme plat fort différent de l'activité convective qui règne au-dessus.

En théorie le libre parcours moyen d’un photon dans le noyau est de quelques millimètres. C’est ce qui explique pourquoi le rayonnement émis par la surface solaire s'est formé il y a environ 170000 ans (il y a quelques décennies encore on estimait le délai à 2 millions d'années) au centre de l'étoile dans les mécanismes de fusion précités et ne s’échappe qu'aujourd'hui de son atmosphère à travers de multiples processus de transferts d'électrons à électrons. Seul le neutrino ne subit pas l'influence des forces électromagnétiques et gravitationnelles et parvient à la surface du Soleil à la vitesse de la lumière, environ deux secondes après son émission. Ensuite, il faut 8.3 minutes aux neutrinos et autres photons pour arriver sur Terre.

Modèle solaire Standard de la température, pression, densité et de la production d'énergie. Documents J.N. Bahcall et M.H.Pinsonneault (BP2004) adaptés par l'auteur.

- Le transport par convection, qui assure également le transfert de l'énergie du noyau vers la surface. L’équipe de Fowler de Caltech calcula dans son modèle solaire que la distance à partir de laquelle le transfert d’énergie par convection dépassait le transfert par rayonnement se situait à 0.741 R soit 74% du rayon solaire (à un niveau de température encore proche de 2 millions de degrés[15]. Toutefois, nous verrons plus loin à propos des cellules convectives géantes et des oscillations que la zone de convection commence en réalité bien plus profondément, en dessous de 0.43 R soit à moins de 300000 km du centre du Soleil.

Pourquoi cette zone convective présente-t-elle des mouvements convectifs et semble bouillonner en surface ? A partir de 0.86 R et dans une zone large de 100000 km environ la température est suffisamment "froide" pour que les ions lourds (tels le carbone, azote, oxygène, calcium et fer) retiennent quelques-uns de leurs électrons. Ce phénomène rend la matière solaire plus opaque ce qui a pour conséquence de piéger la chaleur et de ralentir la progression du flux d'énergie ascendant. Le milieu devient moins dense et ne produit plus d'énergie. Ici le plasma est déjà 10 fois plus froid qu'au niveau de la tachocline et sa température varie entre 1 million et 500000 K.

Dans cette zone convective, le parcours de l'énergie est semé d'embûches. Si des courants transportent rapidement la chaleur vers la surface, à mesure qu'ils montent les fluides s'étendent et se refroidissent, si bien que les mouvements convectifs sont progressivement interrompus et le rayonnement ne peut plus atteindre la surface et se dissiper. Le plasma a donc tendance à s'enfoncer dans la zone convective.

A gauche, variation des principaux paramètres internes du Soleil en fonction de la distance au centre. Au centre et à droite, simulation 3D de l'activité interne du Soleil. Au centre, quand les flots convectifs descendants (bleus) arrivent à l’interface avec la zone radiative (localisée à 70% du rayon de l'étoile), ils excitent des ondes de gravité qui se propagent dans la zone radiative en spiralant vers le centre. A droite, une coupe du plan méridien montrant la vitesse de rotation dans les zones internes de l’étoile. Dans la zone convective, le taux de rotation dépend de la latitude. Le profil obtenu dans la simulation est très proche de celui déduit des mesures héliosismiques. La zone radiative, elle, tourne comme un solide, à un taux de rotation constant. Comprendre la dynamique de ces deux zones et de leur interface, la tachocline, est l'une des clés de la physique solaire. Documents Jean-Marie Malherbe/CNRS adapté par l'auteur et CEA/SAp.

Plus haut, près de la surface, lorsque la température est suffisamment basse pour que l'hydrogène et l'hélium se recombinent avec les électrons libres, l'énergie est piégée dans les atomes. Le gaz n'absorbe pas le rayonnement mais au contraire il ralentit le refroidissement ce qui provoque une amplification des mouvements convectifs. C'est dans ces conditions que se forment la granulation et les taches sombres dont le développement va dépendre de l'activité du champ magnétique généré en profondeur. On y reviendra.

La dynamique du Soleil calme

L'atmosphère du Soleil se caractérise par la combinaison complexe de processus physiques concurrents : convection, rayonnement, conduction et champs magnétiques. L'empreinte la plus évidente de la convection solaire est son débordement dans la photosphère qui se manifeste par la granulation. À côté de cette structure à petite échelle mais dominante, il existe une répartition plus ou moins régulière des structures entre celles à plus petites et à plus grandes échelles, ce qui fait du Soleil un astre dont l'activité se manifeste à plusieurs échelles. La convection et le débordement des tubes convectifs donnent à la photosphère son aspect granulaire bien connu mais ils jouent également un rôle directeur pour les couches supérieures, à savoir la chromosphère et la couronne.

Les deux schémas présentés ci-dessous tentent de décrire les différentes structures et phénomènes se développant à la surface du Soleil, un exercice difficile car l'astrophysique solaire est un sujet complexe comme nous allons le découvrir.

Schémas des interactions complexes qui se déroulent dans la basse atmosphère du Soleil calme (hors régions actives et hors filaments). Consultez le texte pour les explications. Notons que la supergranulation est placée en dessous de la photosphère pour plus de clarté mais en réalité elle se situe au niveau de la photosphère. A gauche, un document de Wedemeyer-Böhm et al./UiO (2008) adapté par l'auteur. A droite, un schéma en perspective proposé par Shahin Jafarzadeh de l'UiO adapté par l'auteur.

Ces schémas représentent une coupe verticale de l'atmosphère solaire entre le sommet de la zone convective et la basse couronne sur une échelle qui s'étend verticalement sur plus de 2000 km à gauche et 800 km à droite et horizontalement très variable mais qui occupe au moins deux supergranules soit plus de 50000 km. Pratiquement toutes les structures et phénomènes indiqués sont contrôlés par les effets combinés de la convection et du champ magnétique sur lequel nous reviendrons. Notons qu'habituellement les astrophysiciens solaires expriment les longueurs en mégamètres (Mm) ou en seconde d'arc (pour rappel, à la distance du Soleil, 1"= 725 km).

Photosphère

Sur ces schémas figure notamment une ligne pointillée au niveau de la photosphère où τ5000 = 1. Que représente-t-elle ? La valeur de τ caractérise la profondeur optique à la longueur d'onde de 5000 Å et délimite la surface visible du Soleil (ou d'une étoile) en lumière blanche sur base de son assombrissement centre-bord. Si τ > 1 le milieu est opaque et si τ < 1, il est transparent. Autrement dit, ce niveau détermine l'altitude 0 du Soleil.

La température effective au niveau de la photosphère (niveau τ5000 = 1) est d'environ 5773 K et descend à 4100 K quelque 500 km plus haut, au sommet de la photosphère; c'est la température minimale. En théorie (modélisation) la température minimale dite classique est de 4700 K. La température réelle est inférieure en raison du refroidissement provoqué par le rayonnement dissipé dans les raies spectrales. Notons que la température peut descendre à 3710 K dans les taches solaires, ce qui explique leur aspect plus sombre que la surface de la photosphère.

Le réseau de la granulation et de la supergranulation

Comme nous l'avons expliqué, le transfert d'énergie de la zone radiative vers la surface du Soleil est assuré par la convection qui s'auto-entretien tant que le gaz est plus chaud que le milieu ambiant et la densité suffisante pour absorber l'énergie. Ces mouvements convectifs s'étendent jusqu'à la photosphère. Dans un processus similaire au développement des cellules de Bénard dans l'atmosphère terrestre, des nuages cumuliformes ou de l'huile que l'on chauffe sur une plaque, ces mouvements convectifs se rassemblent pour former des cellules que l'on peut décrire comme une juxtaposition de tubes convectifs.

Notons que les taches rouges représentées sur le schéma dans le réseau inter-supergranulaire à la base de chaque arche magnétique sont des régions où la température est plus élevée (il ne s'agit pas d'éruptions ni de fibrilles).

Modèle de l'atmosphère solaire décrivant les différentes régions d'émissions et d'absorptions des principales raies spectrales en fonction de la température et de l'altitude au-dessus de la photosphère. Document T.Lombry basé sur le modèle VAL IIIC de J.E.Vernazza et al. (1981).

La zone convective est bornée en dessous et au-dessus par deux couches où la variation de densité (le gradient) suit le modèle adiabatique, c'est-à-dire sans transfert thermique. L'énergie est donc conservée dans ces zones (et son rendement maximum). Dans la partie supérieure de l'atmosphère solaire il existe néanmoins une "convection pénétrante" et donc une zone de transition entre la photosphère et la couronne où les mouvements initiés dans les couches inférieures et matérialisés par les cellules convectives de la photosphère ne sont pas immédiatement interrompus lorsque le plasma et le gaz rencontrent une couche plus stable, ce qui complique la modélisation de l'activité solaire.

Il existe différents types de cellules convectives qui traduisent des évènements à différentes échelles. Ainsi, en profondeur ces cellules sont très vastes alors qu'au niveau de la photosphère elles sont cent fois plus petites et se retrouvent pratiquement sous forme de thermiques pour finir par se disloquer dans la chromosphère.

Comme on le voit dans le schéma présenté à gauche, c'est justement dans la chromosphère que les atomes s'ionisent et qu'on observe des raies spectrales en émission et en absorption que l'on peut exploiter pour étudier les différents niveaux de l'atmosphère solaire et des états d'excitations de la matière, notamment dans les raies de l'hydrogène α, H et K du calcium Ca-II, de l'hélium He-II et D3, du sodium et Lyman α. On y reviendra en détail dans un autre article.

Les cellules convectives de la photosphère que l'on voit sur la photo présentée ci-dessous à gauche, sont appelées les granules ou plus communément les "grains de riz" et forment la "granulation" solaire. Chaque polygone mesure environ 1000 km (entre 600-1300 km) soit autant que la superficie de la France et représente un tube de convection. Ces structures survivent entre 6 et 20 minutes. C'est au sein de ces granules et sous l'effet d'une variation locale du champ magnétique qu'apparaissent les taches sombres dont les dimensions sont typiquement de l'ordre de 4-5 fois le diamètre de la Terre pour une tache simple.

Les images en haute résolution de la photosphère comme les simulations (cf. celle présentée ci-dessous à droite) montrent clairement ce réseau réticulé à petite échelle sombre et plus froid et les régions brillantes au centre des tubes de convection. Notons qu'on observe la formation d'un motif similaire avec de l'eau ou de l'huile chauffée sur un feu qui révèle une structure turbulente et un comportement chaotique.

Ce réseau est enveloppé dans une structure à plus grande échelle appelée la supergranulation découverte en 1956 par A.B. Hart. Elle est surtout visible quelques milliers de kilomètres au-dessus de la photosphère, au niveau de la chromosphère qu'on voit très bien sur l'image présentée ci-dessous au centre prise dans la raie du K du Ca-II. Il s'agit de cellules de formes polygonales dont chaque élément mesure en moyenne 30000 km (entre 12000 et 50000 km). La durée de vie d'une supergranule est voisine d'une vingtaine d'heures. Cette supergranulation est visible en émission en particulier dans la raie de l'hydrogène alpha que celles du calcium ionisé. La vitesse d'expansion des cellules du réseau chromosphérique est voisine de 0.5 km/s prouvant une fois de plus que la surface du Soleil n'est en fait qu'une énorme boule de convection.

Les modèles indiquent que l'extension en profondeur des granules et des supergranules est du même ordre de grandeur que leur largeur en surface.

Les frontières des granules et des supergranules forment le réseau chromosphérique (les trois rectangles rouges sur le schéma) qui a l'aspect d'un réticule (semblable à des bulles de savon en deux dimensions). Il représente une région peu magnétisée. Des tubes de flux magnétiques émergent en permanence au centre des polygones et migrent rapidement vers les bords, où ces éléments magnétiques se concentrent, laissant une signature observable sous la forme d'un réseau. Dans le réseau, c'est-à-dire en bordure de la supergranulation, les tubes de flux magnétiques sont très étroits et apparaissent comme des points brillants dans les interstices intergranulaires. Leur diamètre est inférieur à 1/10e d'une granule soit une centaine de kilomètres.

A gauche et au centre, les deux principaux aspects des cellules convectives solaires. A gauche, la granulation représentée par les granules ou "grains de riz" photographiés en lumière blanche par Luc Rouppe grâce au SST de 0.98 m et colorisées. Ces polygones ont la taille de la France. Au centre, le réseau chromosphérique photographié dans la raie du Ca-II K par Pedro Re. Cette structure constitue la supergranulation de la chromosphère, prolongeant les granules de la photosphère. L'ombre de la petite tache solaire est aussi grande que la Terre. A droite, simulation de la granulation solaire à 500 nm dans un modèle solaire MHD. Document Wedemeyer-Böhm/Rouppe van der Voort (2009).

La granulation est constituée de mouvements de matière essentiellement verticaux avec un contraste de température centre-bord qui la rend bien visible dans les images, alors que la supergranulation consiste uniquement en un champ de vitesse horizontal et divergent, sans contraste de température. Cette dernière n'est donc pas apparente au niveau de la photosphère (à part en "motion tracking" des éléments magnétiques, cf. l'article de M.Rieutord et al., 2007). En revanche, suite à la concentration des éléments de flux en bordure des cellules, la supergranulation se traduit par un réseau brillant très marqué au niveau de la chromosphère qui s'explique du fait que l'énergie est transportée par les zones magnétisées qui sont plus denses et chaudes, donnant notamment naissance aux spicules.

Les spicules

Les spicules furent découvertes en 1877 par le jésuite Angelo Secchi de l'Observatoire du Vatican qui observa en détail le limbe du Soleil (c'est également Secchi qui utilisa pour la première fois un prisme pour analyser la lumière des étoiles et les classifia en fonction de leur couleur).

Les spicules (en rouge sur le schéma de Wedemeyer) sont bien visibles en lumière monochromatique (Hα) et UVE sur le limbe du Soleil. Il s'agit de jets de plasma provoqués par l'injection impulsive d'énergie s'écoulant le long des lignes du champ magnétique essentiellement verticales.

Grâce aux simulations de l'évolution des spicules, les chercheurs[16] ont montré que ces jets de plasma résultent de l'interaction entre les particules chargées et neutres avec le champ magnétique qui permet à ce dernier d'expulser la matière à des vitesses similaires à celle d'un coup de fouet. Ce processus génère de puissantes ondes magnétiques dont des ondes d'Alfvén qui participent au réchauffement de la couronne solaire. Les spicules assurent donc le transfert de l'énergie entre la chromosphère et la couronne du Soleil mais jusqu'en 2019 on n'en savait pas plus. On reviendra sur leur origine dans l'article consacré au champ magnétique du Soleil.

A voir : Spicules, SDO - SOT Ca-H, Hinode

A gauche, profil de l'atmosphère solaire à l'échelle. La photosphère présente une épaisseur de ~500 km, la chromosphère de ~2000 km et une spicule entre 3000-13000 km. A droite, gros-plan sur les spicules observées dans la raie H du calcium à 396 nm. Documents T.Lombry et JAXA/NASA/Hinode.

Les spicules peuvent s'élever jusqu'à ~13000 km au-dessus de la chromosphère et sont animées d'une vitesse comprise entre 1.5 et 40 km/s (54000 à 144000 km/h). Elles ne survivent pas plus de 12 minutes. 99% de la matière de ces jets retombent balistiquement. On estime qu'à tout instant la surface du Soleil contient un million de spicules, y compris durant les phases calmes du cycle solaire.

Les fibrilles

Les fibrilles (en bleu sur le schéma de Wedemeyer) sont des structures radiales et légèrement curvilignes de plasma présentes dans les régions actives et bien visibles dans la pénombre des taches ou entre des groupes bipolaires où elles forment de petites structures filiformes ou en rosette. Les fibrilles sont très nombreuses vis-à-vis du nombre de champs magnétiques distincts. Les fibrilles peuvent naître d'un champ de transition formé de petites arches de plasma, se combiner pour former des chaînes géantes de fibrilles aussi longues que des filaments ou même former une superpénombre chromosphérique. Leur étude en Hα ou dans la raie K du Ca-II indique que ces structures reproduisent, au niveau de la chromosphère, les lignes de force sous-jacentes qui existent parallèlement à la surface du Soleil. On y reviendra.

Structures magnétiques

Dans le schéma de Wedemeyer, à hauteur de la chromosphère se trouve une ligne pointillée rouge ondulante qui divise l'atmosphère solaire en deux régions, où CS est la vitesse du son et CA la vitesse d'Alfvén (et en pointillés verts dans le schéma de Jafarzadeh). De quoi s'agit-il ? La vitesse d'Alfvén est l'équivalent de la vitesse du son pour les champs magnétiques : il s'agit d'ondes dont la force de rappel est la tension magnétique plutôt que la pression du gaz. Le rapport de ces deux vitesses donne le Bêta du plasma qui caractérise le rapport entre la pression magnétique et la pression du gaz. On a donc tracé une ligne pointillée rouge où le rapport β = 1; il marque le basculement entre le régime dominé par la pression du gaz (à la base de l'atmosphère) et celui où la pression magnétique domine (dans la couronne solaire).

Simulation de la convection dans les couches supérieures de l'atmosphère solaire dans un modèle MHD. On distingue au niveau de la photosphère les structures à petite échelle formant la granulation (les cellules bleues). Document Oskar Steiner.

La voûte ("canopy" en anglais) est une structure magnétique fermée en arcade qui surplombe les structures plus basses (granulation, petits dipôles des taches sombres). Ces arcades ont souvent la dimension de la supergranulation et sont ancrées dans le réseau qui sépare les supergranules. Cette voûte est liée à la divergence des champs magnétiques émergeant du réseau et remplissant tout le volume supérieur, dans la couronne. Ce phénomène s'explique par un changement complet de régime entre la surface et la couronne : en bas, la pression du gaz domine et confine les champs magnétiques en tube étroits, tandis que plus haut la pression magnétique domine, ce qui permet au champ magnétique de se déployer et de contrôler entièrement la topologie et les mouvements du plasma. Ce changement de régime est lié à la chute brutale (6 ordres de grandeur) de la densité et de la pression du plasma entre la photosphère et la couronne.

La sous-voûte ("sub-canopy" en anglais) est un néologisme proposé par Wedemeyer qui décrit le volume confiné sous la voûte magnétique, qui est peu magnétisé et dont la dynamique est dominée par les répercussions de la convection photosphérique aléatoire à la base : écoulements turbulents et propagation d'ondes de choc (voir plus bas) excitées par les mouvements mécaniques convectifs (granulation) et les ondes acoustiques (oscillations en mode p) qui agitent la photosphère sous-jacente. On y trouve donc des fronts (de choc) chauds et des régions post-chocs plus froides en expansion à l'origine de la supergranulation.

Notons que la sous-voûte réagit par intermittence en générant des fluctuations lumineuses d'origine MHD. Wedemeyer appelle cette région la "fluctosphère" (cf. Sven Wedemeyer-Böhm, 2008) qu'on appelait précédemment "clapotisphère" (cf. Robert J. Rutten et Hans Uitenbroek, 1991) en raison des pics de fluctuations générés par les interférences des ondes de choc. Ces ondes de choc sont ensuite excitées au sommet de la zone de convection et dans la photosphère.

Le schéma comprend également de petites structures locales situées près de la surface comme les feuilles de courant, les guides d'ondes et les ondes de choc. Leur existence s'explique une nouvelle fois par la présence d'un flux magnétique (pour rappel le schéma de Wedemeyer décrit une région calme du Soleil et non pas une région active ou un filament). L'énergie convective de la photosphère est transférée aux couches ou régions supérieures de trois manières : par les ondes de choc, des ondes magnéto-acoustiques se propageant principalement le long des lignes du champ magnétique émergeant du réseau ou encore par le biais des reconnexions magnétiques se produisant généralement au-dessus des voûtes, là où les polarités opposées entrent en contact et forment des nappes de courant à l'interface. Ces processus consistent en une myriade de micro-évènements qui assurent l'échauffement de fond de la couronne solaire et son expansion (vent solaire). Notons que les évènements majeurs comme les éruptions et les CME se produisent au sein de structures magnétiques beaucoup plus vastes, souvent liées aux régions actives. On y reviendra.

Enfin, l'indication conversion d'onde marque l'endroit où les ondes magnéto-acoustiques deviennent supersoniques et donc dissipatives (ondes de choc) : l'énergie mécanique issue de la convection photosphérique et transportée par les ondes vers la haute atmosphère est dissipée sous forme de chaleur par les ondes d'Alfvén ou sous forme d'énergie cinétique (accélération verticale).

Notons que la conduction joue aussi un rôle mais elle est très anisotrope : elle se manifeste essentiellement le long du champ magnétique vertical, donc là où se trouve le réseau chromosphérique.

Les cellules convectives géantes

Outre la granulation et la supergranulation, la surface solaire comprend également des cellules convectives géantes dont l'existence fut proposée en 1968 par George Simon et Nigel Weiss du centre Marshall de la NASA pour expliquer des phénomènes que les modèles d'alors ne pouvaient pas prédire sur la seule base de l'activité des champs magnétiques et des mouvements convectifs connus. Mais à l'époque, les astronomes manquaient de données pour confirmer leur théorie. Ce n'est qu'avec le lancement du satellite SOHO (fin 1995) équipé de l'Interféromètre Doppler Michelson (MDI) que l'équipe d'Hathaway put étudier les vitesses radiales et transverses des différentes cellules solaires et se rendit compte qu'il existait des cellules convectives géantes dont le sujet fit l'objet d'une publication en 1998 et peu après par J.G.Beck et ses collègues. Comme le disait Hathaway à l'époque, découvrir ces cellules géantes était comme "trouver les systèmes de hautes et basses pressions qui gouvernent le temps sur Terre."

Parvenus à confirmer leur hypothèse, David Hathaway et son équipe ont décrit la nature et les propriétés de ces cellules convectives géantes en 2013 dans la revue "Science".

Aujourd'hui, nous savons que ces cellules géantes forment le sommet de grands tubes convectifs mesurant entre 200000 et 500000 km de longueur et se déplaçant à environ 40 m/s (~144 km/h). Elles peuvent s'étendre sur 40 à 50° en longitude mais sur moins de 10° en latitude. Leur profondeur peut atteindre la moitié du rayon du Soleil soit plus de 350000 km, confirmant les mesures d'oscillations faites par l'instrument MDI de SOHO (voir page suivante).

A gauche, un dopplergramme obtenu par l'instrument MDI de SOHO mettant en évidence les mouvements individuels de la supergranulation surtout visible dans la chromosphère. Ces cellules mesurent environ 35000 km de diamètre. En bleu figurent les cellules se rapprochant de l'observateur, en rouge celles s'éloignant. A droite, une image similaire mais à une autre échelle montrant une projection des relevés de vitesse et direction des courants dans les cellules situées près de la surface du Soleil (mais s'étendant en profondeur comme les masses d'air sur Terre) par l'imageur héliosismique et magnétique HMI du satellite SDO. Elles révèlent l'existence de cellules convectives géantes de 200000 à 500000 km de longueur découvertes en 1998 par David Hathaway et ses collègues de la NASA/MSFC.

Comme on le voit sur la mappemonde présentée ci-dessus établie à partir des données HMI du satellite SDO de la NASA, ces cellules géantes sont plus étendues et plus nombreuses près des pôles que dans la région équatoriale. Leur existence est l'une des principales composantes de la turbulence de la surface du Soleil ainsi que du cycle solaire et explique la vitesse plus élevée des taches sombres à l'équateur par rapport aux pôles.

Les ondes de Rossby

Grâce aux données enregistrées par les satellites SDO et STEREO entre 2011 et 2014, une équipe d'astronomes dirigée par Scott McIntosh du NCAR découvrit des ondes de Rossby dans l'atmosphère du Soleil. Cette découverte fit l'objet d'un article publié dans la revue "Nature Astronomy" en 2017. Elle fut confirmée par un second article publié par Laurent Gizon de l'Université de Göttingen et ses collègues dans la même revue en 2018.

Ces ondes apparaissent sur les enregistrements sous forme de petites structures brillantes d'environ 1500 km de diamètre qui sont des traceurs des mouvements convectifs à grande échelle. Comme on le voit ci-dessous à gauche, ces points s'alignent pour former des bandes magnétiques persistantes qui dérivent lentement vers les longitudes ouest au cours de la rotation solaire en affichant un comportement semblable à celui des ondes de Rossby. Ces vortex se déplacent dans le sens opposé à la rotation solaire. Certaines ondes de Rossby présentent une longueur d'onde équivalente au rayon du Soleil soit ~700000 km !

Les mesures héliosismiques ont montré que les ondes de Rossby solaires s'étendent jusqu'à 20000 km de profondeur dans la zone convective. Elles reproduisent la dynamique interne du Soleil et contribuent à la moitié de son énergie cinétique à grand échelle.

A l'image des ondes de Rossby de la Terre qui délimitent le front polaire et affectent l'évolution du temps (ondes qu'on retrouve également dans les océans), les ondes de Rossby du Soleil influenceraient la météorologie solaire, en particulier la fréquence des éruptions et des taches sombres. Selon McIntosh, tout serait lié mais il faut plus d'observations et analyser ces phénomènes de manière globale.

A voir : Scientists Discover Rossby Waves on the Sun (2018)

Rossby Waves on the Sun (2013), NASA

A gauche, ondes de Rossby vu du pôle Nord du Soleil. Le Soleil tourne dans le sens anti-horloger. A droite, schéma de la vorticité des ondes de Rossby dont l'amplitude est maximale dans la région équatoriale. Sur ce schéma, la rotation du Soleil s'effectue vers la droite tandis que les vortex se déplacent en sens opposé. Voir également les vidéos ci-dessus. Documents NCAR et MPI.

Selon un rapport de l'UCAR, les effets du Soleil produisent pour 10 milliards de dollars de dégâts chaque année (en défaillance des satellites, pannes des systèmes de communicaton et de navigation, pannes électriques, etc.). Grâce à ces découvertes, les astronomes espèrent mieux prédire l'emplacement des taches sombres, des éruptions et autre CME et améliorer les préditions du temps spatial et ses conséquences dans l'environnement terrestre afin de réduire ces risques.

Voilà en quelques mots ce qu'on peut observer dans l'atmosphère solaire. Nous reviendrons sur la structure de la surface solaire lorsque nous décrirons plus en détails la photosphère visible en lumière blanche, la chromosphère visible notamment en hydrogène alpha et siège des éruptions solaires, ainsi que sur la couronne source de ses émissions de rayons X.

En résumé, la configuration du champ magnétique solaire couple efficacement les couches atmosphériques sur une multitude d'échelles spatiales, notamment sous la forme de boucles ancrées dans la zone de convection qui se prolongent de manière continue dans la photosphère jusque dans la chromosphère et la couronne. Le champ magnétique est également un vecteur structurant important pour la granulation, bien que les ondes de choc hydrodynamiques jouent également un rôle important (en particulier au niveau du réseau chromosphérique où règne principalement des champs faibles).

Ainsi qu'on le constate, sur base des données recueilles par les télescopes solaires en orbite, les observatoires terrestres et les radiotélescopes interférométriques dont ceux d'ALMA et le Karl Jansky (ex-VLA), les astrophysiciens solaires parviennent aujourd'hui à simuler l'activité solaire et peuvent construire une image complète de l'atmosphère du Soleil calme représentée comme un système magnétohydrodynamique hautement fluctuant. Nous verrons dans d'autres articles qu'on peut également simuler la formation des éruptions solaires et des CME grâce à une meilleure compréhension du fonctionnement de son champ magnétique.

L’évolution du Soleil

Si nous connaissons de mieux en mieux la physique du Soleil, que pouvons-nous présager de son avenir ? Ainsi que nous en avons largement discuté dans l'introduction, la durée de vie du Soleil est estimée à quelque 10 milliards d’années, comptées entre le moment de sa formation au sein du nuage protosolaire et sa disparition comme étoile naine. Il a donc déjà parcouru la moitié de sa vie.

Évolution schématique du Soleil. Documents T.Lombry.

Durant 90% de sa vie, le Soleil va brûler son hydrogène qu'il transforme en noyaux d'hélium. Actuellement, la température de son noyau (~15 millions de degrés) est insuffisante pour déclencher la fusion de l'hélium si bien qu'on les qualifie de "cendres d'hélium" car elles ne sont temporairment plus utilisées dans les processus de nucléosynthèse.

Depuis sa naissance, la température régnant dans le noyau du Soleil augmente lentement, passant d'environ 14 millions de degrés lorsqu'il atteignit la Séquence principale (ZAMS) pour atteindre environ 18 millions de degrés dans 3 milliards d'années. Durant cette période, sa température effective atteindra 5810 K, accroissant son rayon de 6 à 13% et sa luminosité de 15 à 33%. Mais bien avant d’arriver à ce stade, sa luminosité alliée à sa chaleur deviendront intolérables et préjudiciables à toute forme de vie. On peut en effet considérer que durant les 600 millions d’années qui vont suivre sa luminosité augmentera de 10%, provoquant l’évaporation de la surface des mers. Les océans disparaîtront lorsque sa luminosité aura atteint 40% de plus, ce qui devrait se produire d’ici 3.5 milliards d’années.

Sur l’échelle des temps cosmiques cette catastrophe n’est pas très éloignée de nous. Entre-temps, d'ici un milliard d'années la Terre sera devenue une serre dont la température s'emballera au point de ressembler à Vénus. Si nous vivons encore sur Terre à cette époque et si ce n'est déjà fait, il sera grand temps d'envisager de coloniser Mars, quelques astéroïdes de la Ceinture principale ou les Lunes des planètes géantes.

Phase Post-Séquence principale

Le véritable cataclysme solaire surviendra beaucoup plus tard. Dans environ 4 milliards d’années, c'est-à-dire lorsque le Soleil sera âgé d'un peu plus de 8 milliards d'années, ses réserves centrales d'hydrogène seront épuisées; son coeur alors stabilisé contiendra de l’hélium et des éléments plus lourds. Incapable de produire des réactions de fusions nucléaires, le Soleil ne produira plus d'énergie. Parvenu à ce stade, il quittera définitivement la Séquence principale et commencera son ascension d'abord vers la région des sous-géantes du diagramme H-R (voir schéma plus bas) pratiquement sans perdre de température.

Pour conserver son équilibre hydrostatique, le coeur du Soleil va spontanément se contracter. Durant 1 milliard d’années sa structure interne s’épaissira, son diamètre va devenir 1.7 fois supérieur à son diamètre actuel et sa luminosité sera 2.2 fois plus brillante qu'aujourd’hui. Sa température retombera à 5300 K.

Phase géante rouge

Quelques centaines de millions d’années plus tard, ce qui nous porte dans 5.5 à 6.5 milliards d'années selon les modèles soit entre 10 at 11 milliards d'années après sa naissance, le Soleil aura une réaction surprenante : en accord avec la loi des gaz parfaits, la contraction du coeur provoquera une élévation substantielle de la température et de la pression qui déclenchera la fusion de l’hydrogène dans la couche entourant le coeur jusque là épargnée. Cette chaleur provoquera une dilatation démesurée de son enveloppe et sa luminosité augmentera rapidement. Ce processus transformera physiquement le Soleil . Sa surface gonflera rapidement sur une période de 700 à 900 millions d’années. Le Soleil entamera son ascension vers la branche des géantes. Au début, il sera 5 fois plus grand et 11 fois plus lumineux qu'aujourd'hui.

Evolution de l'abondance des éléments légers( gauche) ainsi que de la température et de la densité au cours de l'évolution du Soleil. Documents T.Lombry.

Au bout d’un milliard d’années, lorsque le Soleil sera âgé d'environ 11 milliards d'années, les effondrements successifs auront provoqué une augmentation de la pression et de la température dans son coeur. La température centrale atteindra 100 millions de degrés et là où l’Univers primordial n’avait pu franchir la fusion de l’hélium, l'étoile a réussi. Il est vrai que cet astre dispose de millions d’années pour réunir par hasard les hélions alors que l’on n’accorda pas plus de trois minutes à l’Univers primordial, l’expansion de l’Univers ayant éparpillé tous ses enfants endéans ce temps.

Flash de l'hélium

Dans environ 7.4 milliards d'années soit 12 milliards d'années après sa naissance, le Soleil commencera lentement à brûler l’hélium contenu dans son coeur qu'il transformera en carbone et oxygène. L’énergie libérée va transformer les atomes d'hydrogène non encore employés dans une nouvelle couche d'hydrogène entourant le coeur d'hélium, provoquant une réinitialisation du Soleil. Toutefois, le coeur du Soleil ne peut pas s'étendre suffisamment vite pour compenser cette augmentation soudaine d'énergie. Par conséquent, en raison de ce déséquilibre entre la pression de radiation et la force gravitationnelle, sans "valve de sécurité" la fusion de l'hélium devient incontrôlable et dégage brutalement énormément d'énergie. Cette production d'énergie se déclenche à peine quelques heures après le début de la fusion du coeur d'hélium. Elle est tellement rapide qu'elle a été surnommée le "flash de l'hélium".

Cette réaction est instable et il faudra 160 millions d’années pour que le Soleil retrouve son calme. En effet, durant la fusion de l'hélium, le coeur explose mais l'énergie de la réaction reste confinée dans le plasma stellaire et ne remonte pas vers la surface. Toutefois la température chute, provoquant une nouvelle contraction du noyau qui va de nouveau se réchauffer. Pendant la fusion de l'hélium, les réactions restent sous contrôle car chaque explosion nucléaire diminue la densité du coeur. Le Soleil devrait connaître 5 flashes de l’hélium successifs après lesquels il tentera de se stabiliser, provoquant une nouvelle contraction du coeur pour éviter d'exploser, son coeur finissant par ne contenir que des cendres de carbone-oxygène. Dans le diagramme H-R, au cours des différents flashes de l'hélium le Soleil va se déplacer horizontalement sur la branche des géantes vers la gauche puis la droite et ainsi de suite jusqu'à la fin de la fusion de l'hélium dans son coeur.

Notons que le flash de l'hélium ne se produit pas dans les étoiles dont la masse est supérieure à 2.5 M car elles sont suffisamment massives pour atteindre les niveaux de densité et de température nécessaires à la fusion de l'hélium.

Évolution schématique du Soleil. Document Oliver Beatson adapté et corrigé par l'auteur.

Le Soleil étant une étoile de faible masse qui ne risque pas d'exploser en supernova, après être passé par le stade de géante rouge et connu les flashes de l’hélium, il retrouvera une certaine jeunesse. Après s'être dilaté jusqu'à l'orbite terrestre sa taille diminuera à nouveau, il deviendra moins chaud et retrouvera un léger hâle jaune-orangé.

A ce stade le Soleil aura perdu quelque 28% de sa masse et va entamer la fusion de l'hélium dans une couche périphérique du noyau. Puis, lorsqu'il atteindra une certaine luminosité, il va déclencher la fusion de l’hydrogène dans une couche périphérique du noyau. Mais cette réaction en double couche est instable. La production d'hélium va déclencher des pulses thermiques avec pour conséquence de gonfler démesurément son enveloppe. Le Soleil sera alors sur la Branche Asymptotique des Géantes (AGB) en phase TP-AGB (Thermally Pulsing AGB) comme le fait actuellement l'étoile Mira Ceti parmi d'autres étoiles géantes.

Notons que ce phénomène de pulsations thermiques est associé à la formation de métaux et d'éléments plus lourds que le fer grâce au "processus s" qui permet de produire des noyaux lourds par capture de neutrons. Il s'ensuit un brassage (dragage superficiel) de l'atmosphère solaire par des mécanismes convectifs qui finissent par expulser une bonne partie de l'atmosphère solaire dans l'espace. On y reviendra.

Concrètement, dans environ 7.6 milliards d'années soit 12.2 milliards d'années après sa naissance, sous l'effet de la chaleur dégagée par la fusion de l'hélium et de l'hydrogène entourant son noyau, en l'espace de 200000 ans, le rayon du Soleil va devenir 100 à 175 fois plus grand et il sera 2350 à 2750 fois brillant qu'aujourd'hui. Devenu une géante rouge, sa température effective ne sera plus que d'environ 3500 K. A cette époque le Soleil sous-tendra un angle de 69° à la surface de la Terre ! Certains scénarii prédisent que durant cette phase, l'enveloppe extérieure du Soleil atteindra l'orbite de Jupiter, grillant la Terre sur son passage. Notre planète sera engloutie dans l’atmosphère solaire et finira dans son noyau dans un long mouvement spiralé.

A lire : Une façon de vivre propre aux étoiles

A gauche, la séquence évolutive du Soleil (en bleu ciel et bleu foncé) dans le diagramme H-R : la phase protostellaire (YSO et PMS qui en théorie ne font pas partie du diagramme H-R), l'entrée sur la Séquence principale (ZAMS), le flash de l'hélium, la phase géante rouge puis la dégénérescence du coeur du Soleil sous forme de naine blanche. Il se sera écoulé plus de 12.3 milliards d'années dont une dizaine sur la Séquence principale. A droite, constitution et processus se déroulant dans le coeur et l'enveloppe du Soleil pendant la phase géante rouge et les flashes de l'hélium qui se produiront dans quelque 6 milliards d'années. Documents T.Lombry.

Lorsque l'hélium du coeur sera entièrement converti en carbone, oxygène et éléments plus lourds, à court de combustible, le coeur va de nouveau se contracter et se réchauffer. Mais étant donné la faible masse du Soleil, la température de son noyau n'atteindra jamais les 600 millions de degrés nécessaires pour déclencher la fusion du carbone. A la place, les couches externes vont devenir si froides que les noyaux vont capturer des électrons libres et former des atomes neutres en absorbant des photons. Durant ce processus, pour se stabiliser les atomes vont émettre des photons qui seront réabsorbés par d'autres atomes proches. Cette cascade de réactions va réchauffer l'enveloppe extérieure du Soleil qui va s'étendre de plus en plus et se refroidir.

Durant cette phase instable l'atmosphère supérieure étant très éloignée de l'influence des forces gravitationnelles, le milieu va se raréfier et se dissiper dans l'espace. Le Soleil s'entourera alors d'un halo riche en métaux issus de sa nucléosynthèse. Parvenu à ce stade, dans le diagramme H-R le Soleil se déplacera vers la droite parmi la population des étoile géantes de type II ou III selon sa brillance.

Phase naine blanche

Le Soleil terminera sa vie environ 50 millions d'années plus tard, c'est-à-dire environ 12.3 milliards d'années après sa naissance. Son enveloppe extérieure sera si éloignée du coeur dense et subira une telle pression de radiation que 50% de la masse du Soleil sera soufllée dans l'espace en même temps qu'une grande quantité de poussière, exposant son coeur brûlant constitué de cendres nucléaires. Une nébuleuse planétaire brillante et richement colorée est née qui accrochera le regard d’éventuels observateurs.

Du fait de cette importante perte de masse, les planètes géantes dériveront vers l'extérieur du système solaire, augmentant leur demi-grand axe et alongeant leur période de révolution.

Finalement, dans un dernier sursaut d'énergie le noyau du Soleil se contractera, portant son diamètre à 1500 km et sa température superficielle pourrait atteindre 10000 à 18000 K en début de cycle; il se transforma en naine blanche encore enveloppée d'une petite atmosphère d'hydrogène pur et toute auréolée de gaz. L'étoile se refroidira graduellement à diamètre constant sur un lapse de temps de plusieurs dizaines de milliards d'années pour finalement disparaître et devenir un corps sombre et inerte. Fin de l'histoire.

On reviendra sur les conséquences de ce cataclysme cosmique sur la vie sur Terre dans ce lointain futur quand nous discuterons de l'évolution stellaire et du crépuscule de la vie des étoiles.

Prochain chapitre

Les vibrations du Soleil

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[15] Dans une étoile géante bleue, telle Rigel, c'est le phénomène inverse qui se produit. En profondeur c'est la convection qui transporte l'énergie et c'est le rayonnement qui la transfert vers la surface.

[16] Consulter Sterling, 2000; Murawski et Zaqarashvili, 2010; Kuzma et al., 2017; De Pontieu et al., 2017; J.M.Beckers, "Solar spicules" in "Solar Physics", Springer, March 1968,3,3, pp367-433.


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