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Pathologies des patients Covid

Les symptômes d'une nouvelle maladie (I)

Sommaire

Comme les autres virus de la famille des Coronaviridae, le SARS-CoV-2 contamine généralement l'organisme humain en pénétrant par les voies respiratoires supérieures puis descend souvent dans les poumons. Selon l'état de santé du porteur et la virulence du virus, les effets peuvent être très différents d'une personne à l'autre, allant du cas asymptomatique à la forme grave de la maladie.

Le coronavirus tire à son profit les faiblesses immunitaires et certaines réponses immunitaires comme les interférons. On y reviendra. Dans les formes aiguës de la Covid-19, lorsque l'infection devient multi-organique, la réaction inflammatoire s'emballe et peut devenir critique pour le patient. Dans de telles conditions, les symptômes peuvent apparaître en cascade dans de nombreux organes et sont donc potentiellement très nombreux.

Les conditions cliniques étant variées et complexes, par clarté nous avons regroupé les symptômes de la Covid-19 en plusieurs catégories distribuées sur les cinq pages suivantes :

I. Introduction

incubation du virus, les cas asymptomatiques, premiers symptômes, examens médicaux.

II. Premiers dommages cellulaires, la trachéite virale, la pneumonie virale,

le choc cytokinique, analyse des poumons.

III. Les troubles et atteintes cardiaques, thrombophilie et maladie auto-immune, troubles de la thyroïde, infections rénales, troubles gastro-intestinaux, le combat des interférons, taux de cholestérol et diabète, insuffisance de spermatozoïdes, perturbation temporaire du cycle menstruel.

IV. Impacts neuropsychologiques, impacts neuropathologiques, impacts des troubles bénins sur le cerveau, prévalence des atteintes neurologiques, syndrome MIS-C (PIMS) chez l'enfant, guérison.

V. Taux de létalité (CFR, IFR)

selon l'âge, le genre et chez le personnel de santé.

Nous discuterons séparément des Covid longs à propos des séquelles de la Covid-19.

Introduction

Incubation du virus

Après avoir été contaminé par le SARS-CoV-2, il y a une période d'incubation du virus durant laquelle le porteur est sain, il ne présente pas de symptômes. Généralement, il n'est pas contagieux car le virus n'est pas encore transmissible. Toutefois, les experts de l'OMS confirment que certains porteurs peuvent déjà produire des virus 1 ou 2 jours seulement avant l'apparition des symptômes. Des études ultérieures ont montré que certains porteurs sont déjà contagieux 5 jours avant l'apparition des premiers symptômes, ce qui pourrait expliquer la propagation très rapide du virus, non obstant le fait que certains variants sont plus transmissibles que d'autres.

Les cas asymptomatiques

Dans une lettre ouverture publiée dans "The Lancet" le 3 juillet 2020, des chercheurs belges ont publié les résultats d'une analyse réalisée entre le 8 avril et le 18 mai 2020 auprès de 280427 personnes dont 8343 résidents de maisons de retraite. Il s'avère que 75% des personnes vivant en maison de retraite étaient asymptomatiques. Cette proportion très élevée explique en partie la propagation rapide du virus dans ces établissements ainsi qu'au sein des instituts communautaires où les résidents cotoyent régulièrement du personnel extérieur.

Document Harvard Health Publishing adapté par l'auteur.

Pour éviter que ces personnes vulnérables ou à risque développent une forme grave de la maladie, les infectiologues ont recommandé de revoir le protocole de test, comme par exemple réaliser des tests PCR ou TRA plus fréquemment dans ces établissements ainsi que dans les instituts pour handicapés mentaux (les tests PCR ou TRA sont effectués tous les quinze jours ou après chaque sortie d'au moins deux jours) et de surtout bien respecter les mesures de protection sanitaire, tant du côté des résidents et du personnel que des visiteurs. En effet, le virus est importé par des porteurs qui s'ignorent du fait qu'ils n'ont pas été dépistés récemment (par exemple une famille dont l'enfant et le mari sont déclarés positifs et en quarantaine risquent de transmettre le virus à la maman qui sans le savoir risque de contaminer les personnes qu'elles rencontrent, en particulier sur son lieu de travail).

Dans une étude publiée dans la revue "Nature Medicine" le 18 juin 2020, Ai-Long Huang de l'Université Médicale de Chongqing et ses collègues ont étudié 37 personnes asymptomatiques dans le district de Wanzhou qui furent testées positives au Covid-19 par PCR mais sans aucun symptôme clinique pertinent dans les 14 jours précédents ni pendant leur hospitalisation à l'hôpital populaire de Wanzhou.

La durée moyenne de l'excrétion virale dans ce groupe était de 19 jours (entre 15 et 26 jours), ce qui est plus long que pour le groupe symptomatique. Parmi les personnes asymptomatiques, plus de 81% des cas avaient une réduction des taux d'immunoglobulines antivirales G (IgG) et d'anticorps neutralisants au début de la phase de convalescence, contre plus de 62.1% des patients symptomatiques. 40% des personnes asymptomatiques sont devenues séronégatives et 12.9% du groupe symptomatique sont devenus négatifs pour les IgG au début de la phase de convalescence. En outre, les personnes asymptomatiques présentaient des niveaux inférieurs de 18 cytokines pro- et anti-inflammatoires.

Selon les chercheurs, "Ces données suggèrent que les personnes asymptomatiques avaient une réponse immunitaire plus faible à l'infection par le Covid-19. Cette réduction des IgG et des niveaux d'anticorps neutralisants au début de la phase de convalescence est un indice qui pourrait être exploité dans le cadre d'une stratégie immunitaire et des enquêtes sérologiques".

Selon une étude publiée dans la revue "Nature" le 30 juin 2020, 42.5% des contaminés détectés au cours de deux dépistages successifs réalisés près de Padoue en Italie étaient asymptomatiques; ils ne présentaient aucun symptôme au moment du test sur écouvillon et n'ont pas développé de symptômes par la suite. Dans les autres cas, selon les chercheurs, la période d'incubation médiane, c'est-à-dire touchant 50% des patients, était de 7.2 jours.

Le risque de contamination

Comme nous l'avons évoqué, une personne dépistée positive au Covid-19 mais asymptomatique peut transmettre le virus. En effet, tant que la charge virale est détectable dans un test PCR ou TRA, la personne est théoriquement contagieuse (voir la période infectieuse plus bas). Chez les personnes asymptomatiques, la période infectieuse ne dure pas plus de 10 jours (cf. J.C. Butler et al., 2021). Ensuite, soit elle s'est débarrassée du virus et reste saine soit elle présente les premiers symptômes de la maladie (voir plus bas). Jusqu'à 15% et localement 30% de la population en contact avec le virus s'est auto-immunisée. Dans certaines conditions, au plus fort de certaines vagues épidémiques on observa plus de 50% d'auto-immunisés chez les enfants. Mais nous verrons que cette immunité contre le Covid-19 dure entre 3 et 9 mois.

Transmission de la Covid-19 de personne à personne. Document Y.Xin et al. (2020) adapté par l'auteur.

Le 22 juin 2020, Maria van Kerkhove de l'équipe technique de l'OMS déclara que "Certaines estimations montrent qu'environ 40% des transmissions peuvent être dues à des cas asymptomatiques, mais ces données proviennent de modèles".

Dans une étude publiée dans le journal "JAMA" le 7 janvier 2021, Jay C. Butler du CDC de Géorgie et ses collègues estiment que le nombre de nouveaux cas transmis par des personnes asymptomatiques est "d'au moins 50%".

En 2022, ces chiffres furent confirmés avec la propagation du variant Omicron qui vit le nombre de contaminations exploser (cf. le taux d'incidence) avec énormément de personnes en quarantaine tout en ayant proportionnellement peu de cas d'hospitalisation (même si leur nombre était élevé dans l'absolu).

Une personne déclarée asymptomatique doit être placée en quarantaine pendant 10 jours (ou 4 voire 5 jours si elle est vaccinée) et faire un test PCR ou TRA le premier et le dernier jour de la quarantaine. En théorie, la 3e semaine il faut qu'elle fasse un nouveau test PCR ou TRA pour confirmer qu'elle ne porte plus aucune trace génétique du Covid-19. Si ce test n'est pas réalisable, en cas de doute mieux vaut qu'elle porte un masque ainsi que ses proches durant une semaine supplémentaire pour écarter tout risque. On reviendra sur les mesures sanitaires.

Selon plusieurs études, jusqu'environ deux-tiers des cas asymptomatiques peuvent finir par présenter les symptômes de la Covid-19. Selon une étude chinoise publiée dans le "Journal of Infectious Diseases" en juin 2020, sur 55 cas asymptomatiques d'un âge médian de 49 ans, 70.9% d'entre eux ont fini par tomber malade.

Dans une autre étude chinoise publiée dans la revue "Future Medecine" en juin 2020, sur 262 patients Covid, seuls 13 étaient asymptomatiques soit 5%. En revanche, dans un autre groupe de 24 porteurs asymptomatiques, seuls 5 ont développé la maladie, les 19 autres restant asymptomatiques. Les chercheurs concluent : "Dans la communauté, il peut y avoir un grand nombre de personnes asymptomatiques non identifiées ayant des infections contagieuses".

Ces études confirment que des personnes asymptomatiques n'ayant pas conscience de porter le virus risquent de contaminer la population à leur insu. C'est la même chose avec les enfants non vaccinés d'où la nécessité qu'ils portent un masque dans les lieux fréquentés et au contact des adultes. Le dépistage est donc toujours utile pour isoler ces porteurs sains. Ce constat renforce aussi la règle qu'on ne répétera jamais assez et recommandée par l'OMS, que tant que la majorité de la population n'est pas vaccinée, les mesures de protection sanitaire dont le port du masque de protection, doivent être maintenues dans les lieux publics fréquentés ainsi qu'en présence de personnes vulnérables ou à risque. Nous verrons à propos de la propagation de la pandémie que ce sont malheureusement des règles élémentaires de précaution que les jeunes (surtout les 16-24 ans puis les 25-35 ans) ont eu tendance à ne pas respecter avec les effets négatifs qu'on a observé.

Période infectieuse

Selon l'OMS, la période d'incubation du Covid-19 varie entre 1 et 14 jours (et entre 0 et 24 jours maximum) avec une valeur médiane de 5 à 6 jours. Dans le cas du variant Alpha (B.1.1.7), la période d'incubation est de 10 jours. Ensuite apparaissent éventuellement les premiers symptômes de la maladie. Il va de soi que le porteur est contagieux. S'il est asymptomatique, il doit rester en quarantaine.

Dans une étude publiée le 23 mai 2020, les chercheurs du CDC de Singapour ont déterminé que la période infectieuse du Covid-19 chez les personnes symptomatiques peut commencer environ 2 jours avant le début des symptômes et persiste environ 7 à 10 jours après le début des symptômes. D'autres études étendent cette période infectieuse après l'apparition des symptômes jusqu'à 15 jours chez 55% des patients et jusqu'à 20 jours chez 10% des patients, la durée dépendant notamment des facteurs de risque de l'individu.

Document Bionext.

Chez la majorité des patients Covid (55%), la réplication virale active chute rapidement après la première semaine de maladie (soit J+10) et on ne retrouve plus la charge virale après la deuxième semaine malgré la persistance de la détection d'ARN par PCR. En revanche, chez 15% des patients, la charge virale reste active pendant 3 à 4 semaines, le patient doit être hospitalisé et un tiers d'entre eux doit être pris en charge en soins intensifs. Ces résultats sont étayés par des données épidémiologiques, microbiologiques et cliniques.

Bien que ces résultats ne furent connus qu'en mai 2020, soit près de deux mois après le début de la pandémie, le personnel en charge des patients Covid a pu revoir les critères de diagnostic sur la base des données sur l'évolution temporelle de l'infectiosité plutôt que sur l'absence de détection d'ARN par PCR, en tenant compte à la fois des perspectives cliniques et de la santé publique, y compris le bien-être physique et mental du patient. En outre, la connaissance de cette timeline a permis de concentrer les efforts sur le dépistage précoce des personnes symptomatiques et de renforcer les contrôles du respect de la quarantaine, ce qui permit d'intervenir plus rapidement sur les cas déclarés tout en assurant une meilleure gestion du risque sanitaire.

Première réaction immunitaire

Concernant la réponse immunitaire, selon une étude conduite sur 285 patients Covid, l'apparition des anticorps (séroconversion) serait détectable 6 à 12 jours après l'apparition des symptômes sans pour autant observer un déclin rapide de la charge virale. Cette dernière pourrait être détectée jusqu'à 20 jours (entre 17 et 24 jours pour 50% des patients) après l'apparition des symptômes avec un seul cas signalé de 37 jours.

Dans les 19 jours suivant l'apparition des symptômes, tous les patients furent testés positifs pour l'IgG. La séroconversion pour l'IgG et l'IgM s'est produite simultanément ou séquentiellement. Les titres d'IgG et d'IgM ont atteint un plateau dans les 6 jours suivant la séroconversion.

Sachant cela, nous verrons que les tests sérologiques peuvent être utiles pour le diagnostic de patients suspects avec des résultats PCR négatifs et pour l'identification des infections asymptomatiques (cf. A-L. Huang et al., 2020).

Tous inégaux face au Covid-19

Pour comprendre la Covid-19 et mieux la combattre, il faut compendre que le virus déclenche des réactions différentes sur différentes personnes. Pourquoi ne réagissons-nous pas tous de la même façon ?

Deux principaux facteurs déterminent si la contamination sera ou non accompagnée de symptômes et s'ils vont s'aggraver : d'abord la durée d'exposition et ensuite l'état de santé général de la personne.

La durée d'exposition

Une chose semble acquise. L'enchainement des symptômes et leur aggravation éventuelle ne répondent a priori à aucun schéma prévisible et donc défient toute modélisation.

Si le Covid-19 cache encore de nombreux mystères et continue à muter, les chercheurs reconnaissent tous l'importance de la charge virale. Comme c'est le cas avec tous les pathogènes, il faut une certaine dose de charge virale pour développer une réaction et éventuellement contracter une infection. Ainsi, on sait que le fait d'être exposé longtemps à ces particules virales renforce le risque qu'elles infectent les cellules.

Le niveau d'infection dépendrait de la quantité totale des charges virales sur un laps de temps donné. Il est donc importance de diminuer ce risque en réduisant la durée des contacts entre personnes, en particulier dans les endroits fermés fréquentés. A défaut, il faut appliquer des mesures de protection sanitaire.

A tester : Calculer votre probabilité de survie si vous êtes contaminé par le Covid-19

Contamination par le Covid-19.

L'état de santé

Comme d'autres pathogènes, la sensibilité à l'infection par le Covid-19 peut être influencée par le génotype de la personne (cf. F.Williams et al., 2020). Mais d'autres facteurs vont influencer la réponse immunitaire. Autrement dit, le génotype seul ne permet pas de déterminer l'évolution de l'infection.

La quantité de virus nécessaire pour déclencher une infection diffère d'une personne à l'autre. Comme c'est généralement le cas, une personne épuisée, stressée ou immunodéficiente sera probalement plus vite infectée qu'une personne en parfaite santé.

Les personnes vulnérables, âgées ou présentant des facteurs de comorbidité (par exemple de l'obésité, des problèmes cardiaques, du diabète, ...) sont plus enclines à développer une forme grave de la maladie et à être prises en charge aux soins intensifs.

So on comprend que des personnes présentant des facteurs de risques soient plus sensibles à la maladie, que risquent les jeunes en bonne santé ? Personne n'échappe aux virus. Le Covid-19 peut aussi bien se révéler asymptomatique qu'entraîner de graves complications à tout âge, même chez des personnes en excellente santé. Pour rappel, une jeune fille est décédée en moins d'une semaine du Covid-19 et le Dr. Li Wenliang qui fut en première ligne au début de l'épidémie à Wuhan, est décédé quelques semaines après avoir contracté le virus, à 33 ans. Mais il est aussi vrai que très peu de jeunes contaminés meurent de la Covid. Selon Siensano, en Belgique entre mars et novembre 2020, seuls 4 jeunes de moins de 25 ans sont décédés de la Covid contre plus de 10000 personnes âgées de 65 ans et plus.

Infection par le SARS-CoV-2

Symptômes

Atteinte modérée

Signes cliniques légers sans signes radiologiques. Traitement à domicile.

Atteinte moyenne (commune)

Température (fièvre), dyspnée et pneumonie à l'imagerie. Exige une hospitalisation d'urgence.

Ateinte sévère (grave)

Atteinte moyenne + soit une détresse respiratoire soit polypnée > 30 inspirations par minute ou une saturation en oxygène < 93%. Exige une hospitalisation d'urgence.

Atteinte critique

Défaillance respiratoire ou shock ou décompensation multi-systémique. Exige une hospitalisation en unité de soins intensifs.

Dans ces conditions, il apparaît plus que difficile de définir la charge virale plus ou moins dangereuse pour l'être humain. Même si on pouvait la définir sur des animaux de laboratoire ou des modèles, on ne peut pas compter sur des essais cliniques puisque l'éthique interdit de réaliser volontairement des tests sur les être humains - même volontaires - qui seraient préjudiciables à leur santé (raison pour laquelle les volontaires testant des médicaments signent une décharge de responsabilité, renonçant à toute poursuite en cas d'effet indésirable. Ceci dit, les armées américaines testèrent des médicaments à l'insu des soldats et toutes les puissances nucléaires n'eurent aucun scrupule à contaminer des civils et des soldats pour la "raison d'État").

Premiers symptômes

Quels sont les symptômes associés à la Covid-19 ? Dans une étude publiée dans la revue "Frontiers in Public Health" en août 2020 par Joseph R. Larsen de l'UCLA et ses collègues, les chercheurs sont parvenus à décrire l'ordre des symptômes généralement ressentis par les personnes infectées par le Covid-19. Selon les auteurs, "Cet ordre est particulièrement important à connaître lorsque nous avons des cycles de maladies comme la grippe qui se chevauchent et qui coïncident avec des contaminations par le Covid-19".

Les chercheurs ont examiné les rapports de l'OMS concernant 55924 patients Covid hospitalisés en Chine entre le 16 et le 24 février 2020, complétés par 1099 autres rapports de patients Covid obtenus d'un groupe d'expert chinois et ceux de 2470 patients internationaux ayant contracté la grippe (influenza). Ils ont également examiné les rapports médicaux de patients infectés par le SARS et le MERS pour déceler les symptômes spécifiques à chaque maladie. Les chercheurs ont ensuite appliqué un processus de Markov - un processus aléatoire de diagnostic qui ne dépend que des états présents et non passés - à cet ensemble de données cliniques afin de déterminer l'ordre le plus probable d'apparition des symptômes chez les patients.

En résumé, les premiers symptômes d'une infection par le Covid-19 sont dans l'ordre d'apparition :

- de la fièvre (> 38.1°C dans 87.9% des cas)

- une toux sèche (67.7%)

- une forte fatigue (38.1%)

- des difficultés respiratoires (18.6%)

- des céphalées (13.6%).

C'est l'inverse pour la grippe : la personne contaminée commence par tousser puis a de la fièvre.

Notons qu'en Belgique, on a constaté en octobre 2020 que le premier symptôme le plus fréquent (20-40% des cas) était la perte d'odorat et/ou du goût avant la fièvre et la toux.

Grâce à cette étude, les médecins peuvent désormais identifier plus tôt les patients Covid, leur proposer de meilleures options de traitement et réduire le temps d'hospitalisation.

 

Covid-19

Grippe

Angine

Rhume

Gastro-

entérique 

Rougeole

Pneumonie

bactérienne

Allergie

(pollens)

Fièvre

a a a Rare a a a a

Toux sèche

a a a a   a a a

Fatigue

a a a a a      

Difficulté respiratoire

a   Rare Rare        

Maux de tête

a a a Rare a   a a

Mal de gorge

a a a a        

Congestion nasale

a a a a   a   a

Courbatures

a a Rare a        

Perte de l'odorat/goût

a a   a        

Diarrhée

a       a      

Vomissements

a       a a    

Nausées

a       a      

Acouphènes

a              

Rougeurs cutanées

a         a   (a)

Conjonctivite

a         a   a

Notons qu'en juin 2020, jusqu'à 10% des patients et généralement des femmes jeunes sans antécédent médicaux pouvaient présenter des symptômes proches de la grippe d'intensité variable que certains médecins interprétaient comme des problèmes somatiques qu'ils traitaient séparément sans vision globale et donc sans les attribuer à une infection par le Covid-19 (cf. ce témoignage sur RTL-TVI).

Cette confusion peut devenir plus critique en automne et en hiver lorsque la grippe saisonnière resurgit et où il est très difficile de distinguer les symptômes de la grippe de ceux d'une éventuelle contamination par le Covid-19. Pour éviter de s'alarmer et prévenir cette éventuelle confusion, les infectiologues recommandent donc aux personnes sensibles dont les plus de 65 ans de se faire vacciner contre la grippe. Heureusement, grâce au port du masque et des gestes barrières, en 2020-2021 l'épidémie de grippe affecta un peu moins de personnes que les années précédentes comme le montrent ces graphiques de l'OMS.

En général, 85% des personnes contaminées par le Covid-19 présentent des symptômes bénins. Si la personne est en bonne santé générale, elle peut éprouver un peu de fièvre ou un mal de tête accompagné d'une toux. Ces symptômes peuvent disparaître en quelques jours si la personne s'auto-immunise en développant des anticorps spécifiques qui lui permettront de résister à une nouvelle attaque virale durant probablement un an (en théorie car on connaîtra la durée exacte plus tard).

Si vous pensez avoir les symptômes de cette infection, suivez cette procédure (fichier PDF ou en format JPG ci-dessous à gauche).

A consulter : Nouveau coronavirus (COVID-19): conseils au grand public, OMS

A gauche, la procédure à suivre publiée le 16 mars 2020 par le Ministère de la Santé luxembourgeois pour éviter de contracter le virus Covid-19 et surveiller son état de santé. Au centre, les principaux symptômes d'une infection au Covid-19. A droite, en France le Collège de la médecine générale a proposé un guide de prise en charge du Covid-19 en médecine générale et un algorithme d'aide à la décision par téléphone. Il fait référence aux procédures publiées par l'institut belge Sciensano.

Des études indiquent que 30% des patients guéris ne présentent pas un nombre élevé d'anticorps neutralisants (les NAb qui ont permis au patient de neutraliser les virus), ce qui suggère que d'autres types d'anticorps et de facteurs immunitaires ont sans doute contribué à leur guérison. Cela pose un problème scientifique car aujourd'hui les virologues ignorent quels sont-ils. On y reviendra.

Perte de l'odorat et du goût

On a également observé une perte du sens de l'odorat chez certains patients (cf. ENTUK, 2020), un symptôme jusqu'alors souvent ignoré par les médecins mais que des spécialistes avaient déjà observé dans d'autres infections virales (cf. K.Bohmwald et al., 2018). En effet, comme le rappellent les auteurs de l'étude anglaise, ce n'est pas un symptôme rare car tous les virus à l'origine du rhume par exemple sont bien connus pour provoquer une perte de l'odorat, et plus de 200 virus différents sont connus pour provoquer des infections des voies respiratoires. Selon les chercheurs, les coronavirus représenteraient 10 à 15% des cas.

L'anosmie

Selon une étude réalisée en 2020 à l'échelle européenne et coordonnée par l'Université de Mons, les symptômes d'anosmie (perte partielle ou totale de l'odorat) et de dysgueusie (perte partielle ou totale du goût) ont été constatés chez un grand nombre de patients infectés en Allemagne, France, Belgique, Italie, Espagne, Angleterre et aux États-Unis. Sur les 417 patients infectés étudiés, 86% présentaient des troubles de l'odorat (la plupart ne sentent plus rien) et 88% des troubles du goût au point qu'ils n'éprouvaient plus aucun plaisir à manger.

En février 2021, les études montraient que 15 à 85% de tous les patients Covid seraient victimes de troubles de l'olfaction, ainsi que la gustation (l'agueusie). En 2023, un tiers des patients Covid souffraient encore d'anosmie deux ans après avoir contraté le virus.

Le virus attaque les terminaisons nerveuses situées dans la voûte des fosses nasales. La perte temporaire de l'odorat et parfois du goût (mais chronique au bout de plusieurs mois) peuvent se manifester à n'importe quel stade de la maladie. Il n'y a pas de congestion nasale (comme dans beaucoup d'autre affections des voies supérieures) mais on observe une obstruction des fentes olfactives qui conduisent au bulbe olfactif.

A gauche, localisation du bulbe olfactif (en jaune). Dessin& de Patrick J. Lynch, légendes T.Lombry. A droite, ces deux images IRM montrent un patient Covid-19 victime d'anosmie. Au centre, on observe une obstruction des fentes olfactives. A droite, après avoir appliqué la technique RPR d'injection de plasma, ses fentes olfactives sont claires et le patient est guéri. Documents J.R. Lechien & T.Radulesco (2020).

Quelle est l'origine de l'anosmie ? Si au début les chercheurs pensaient que les neurones olfactifs exprimaient le récepteur ACE2, cette piste fut abandonnée (cf. D.H. Brann et al., 2020).

Le récepteur ACE2 a été identifié dans l'épithélium olfactif, à la surface des cellules de soutien ou cellules sustentaculaires des neurones. L'infection des cellules de soutien provoque une inflammation dans la fente olfactive, déjà connue pour être une zone de faiblesse. Cela provoque un gonflement des tissus et un épanchement de mucus (cf. M.Eliezer et al., 2020; Y-C. Li et al., 2020). Lorsque l'inflammation est importante, des cellules adjacentes comme les neurones olfactifs, peuvent être aussi endommagés.

Si plus de 70% des malades récupèrent leur odorat (et leur sens du goût) dans les huit jours, l'anosmie peut être observée jusqu'à 12 mois.

Les résultats d'une étude européenne coordonnée par l'Université de Mons en Belgique furent publiés en avril et mai 2020 (cf. UMONS). Elles portent au total sur 3850 patients divisés en trois groupes, essentiellement victime d'anosmie (perte totale de l'odorat), d'hyposmie (perte partielle de l'odorat), d'agueusie (perte totale du goût), voire de parosmie ou dysgueusie (l'odeur ne correspond pas à l'objet). Les patients victimes de parosmie identifient à nouveau relativement vite certaines odeurs, mais ils mettront quelques mois pour distinguer des nuances subtiles comme celles des différents fruits, des fleurs, des vins ou des cafés parmi d'autres arômes. Ils peuvent par exemple voir une pomme et sentir une odeur de poubelle ou se mettre du sel sur la langue et ressentir du sucré ! Pendant cette période de récupération, il y a des activités liées au sens du goût ou de l'odorat qu'ils ne pourront donc plus pratiquées. Soulignons que cette première étude fut réouverte en octobre 2020 suite à la deuxième vague épidémique (cf. UMONS).

Notons que plusieurs aires cérébrales bien distinctes traitent les signaux liés à la perception olfactive : le cortex piriforme, le gyrus entorhinal et parahippocampique, l'amygdale, l'hippocampe, le cortex orbitofrontal, le gyrus cingulaire et le cervelet (cf. ce schéma et B.Cerf-Ducastel et C.Murphy, 2001).

Dans une étude publiée dans la revue "Science Translational Medicine" le 3 mai 2021, des chercheurs de l'Institut Pasteur et du CNRS expliquent pourquoi beaucoup de patients Covid perdent leur sens de l'odorat ou du goût, démontrant que le Covid-19 peut persister et promouvoir l'inflammation dans le système olfactif. Mais ils s'étendent pas sur les origines de l'anosmie.

A gauche et au centre, des images 18FDG-PET/CT scans (un scanner qui mesure le métabolisme du glucose) du cerveau d'une femme de 27 ans atteinte d'une anosmie persistante (gauche) et d'une femme de 28 ans atteinte d'une parosmie, toutes deux dues au SARS-CoV-2. A gauche, (A, B, D) plans axiaux, (C) plan coronal. Il y a une diminution de l'absorption dans le cortex orbitofrontal gauche (flèches). La fixation des lobes temporaux est symétrique et normale (flèches, D). A droite, (A, B) plans axiaux, (C, D) plans coronaux. Sur la TEP et l'IRM combinées (A), la valeur d'absorption standardisée maximale est inférieure dans le cortex insulaire gauche (flèche blanche) par rapport au côté droit (flèche bleue). Il y a une diminution de l'absorption de 18FDG du côté gauche (flèches blanches) par rapport au côté droit (flèches bleues) dans l'hippocampe (B), l'amygdale (D) et le gyrus frontal inférieur (D). A droite, microphotographies des effets de l'anosmie induite par le SARS-CoV-2 chez un hamster. On constate une perte de ciliation dans l'épithélium olfactif. (A-A') : La tête et la mâchoire inférieure coupées en deux dans le sens sagittal. Le gros-plan en (A') montre la relation étroite entre l'épithélium olfactif (OE), le bulbe olfactif (OB) et le cortex cérébral (CTX). Le carré discontinu indique la zone collectée pour l'imagerie SEM. (B à E) : L'épithélium olfactif de hamsters infectés par un modèle infecté (B et B') et inoculés par le SARS-CoV-2 (C-E et prime) à différents grossissements. Une perte de cils est observée à 2 et 4 dpi pour les hamsters infectés. On voit émerger des particules virales (vp) des cellules déciliées (D' et D", flèches blanches). La barres d'échelle = 1 micron (B à E) et 100 microns (D' et D"). Documents M.Karimi-Galougahi et al. (2021), M.Karimi-Galougahi et al. (2021) et G.Dias De Melo (2021).

Deux ans après le début de la pandémie, l'équipe de Benjamin R. tenOever du Département de Microbiologie, de l'Ecole de médecine Icahn de Mt. Sinai, à New York a justement comblé cette lacune et publia un article dans la revue "Cell" le 17 mars 2022 décrivant l'origine de l'anosmie.

Les chercheurs rappellent que si le SARS-CoV-2 infecte moins de 1% des cellules humaines, il touche une grande variété d'organes. A présent, les chercheurs confirment que dans le cadre de l'expression génétique, le coronavirus induit des régulations à la baisse ou downregulation (un processus qui réduit la quantité d'ARN et de protéines produits suite à un stimulus externe) des récepteurs olfactifs et de leurs composants de signalisation. Selon les chercheurs, "Cet effet non-cellulaire autonome est précédé d'une réorganisation spectaculaire de l'architecture nucléaire neuronale qui se traduit par la dissipation des compartiments génomiques hébergeant les gènes des récepteurs olfactifs". Autrement dit, le Covid-19 modifie la morphologie cellulaire et le transcriptome (l'ensemble des ARN issus de la transcription) des cellules qu'elle ne peut pas infecter, induisant des effets systémiques dans l'olfaction et au-delà.

Ci-dessus, l'analyse des processus biologiques pour les gènes régulés à la baisse (downregulation), en réponse à une contamination par le SARS-CoV-2 révèle un enrichissement (upregulation) pour les gènes impliqués dans la perception sensorielle de l'odorat. Cette perturbation touchant le transcriptome explique les effets systémiques de l'anosmie. A comparer ci-dessous avec l'effet pour les gènes régulés à la hausse (upregulation) illustrant un enrichissement significatif pour les gènes impliqués dans les réponses immunitaires/antivirales. Documents B.R. tenOever et al. (2022).

Les chercheurs concluent que si les effets de l'anosmie peuvent perdurer quelques temps, ils considèrent que de façon générale la perte d'odorat peut aussi être le signe précurseur d'une maladie : "si les récepteurs olfactifs (RO) des patients Covid peuvent être restaurés après l'élimination du coronavirus, leurs schémas pré et post-infection peuvent être différents, en raison du caractère alétaoire inhérent aux interactions transOR. Ainsi, les neurones sensoriels olfactif (NSO) qui innervaient déjà un glomérule peuvent activer un RO différent de celui choisi à l'origine, entraînant une fausse rperception des odeurs dans le bulbe olfactif et une altération de la perception des odeurs. Cette confusion sensorielle peut aussi être exacerbée par la régulation négative du gène Adcy3 alors que cette molécule joue des rôles importants dans le guidage axonal des NSO et la stabilisation de la RO. Les déficits à long terme de l'architecture nucléaire pourraient s'appliquer à d'autres populations neuronales puisque les neurones adultes du système nerveux central assemblent également les compartiments génomiques cis et trans à longue portée entre les gènes OR et d'autres familles de gènes neuronaux. Des mécanismes supplémentaires, tels que l'expression soutenue de programmes antiviraux, des dommages au système vasculaire tissulaire et l'hypoxie pourraient également contribuer à des déficits neurologiques durables, y compris la perte d'odorat. Dans les deux cas, la prise de conscience que l'odorat repose sur des interactions génomiques extrêmement « fragiles » entre les chromosomes a des implications importantes : si l'expression des RO cesse à chaque fois que des réponses physiologiques inadaptées perturbent les contacts des RO interchromosomiques, alors l'olfaction peut agir comme un signal d'alarme pour une variété de maladies humaines, des infections virales à la neurodégénérescence".

Selon les études réalisées à ce jour, 90 à 92% des patients récupèrent le sens de l'odorat en 6 mois. Mais certains patients mettront jusqu'à 2 ans pour récupérer à 100%, ce qui peut être très handicapant dans certains professions (par ex. cuisinier, parfumeur, sommelier, torréfacteur, saucier, etc).

Ce long délai est lié au fait que la récupération nerveuse est un processus lent car les neurones olfactifs endommagés doivent se régénérer (cf. Brann & Firestein, 2014). Avec un peu d'entraînement, comme une thérapie basée sur la reconnaissance des odeurs, le patient finit par retrouver le sens de l'odorat (cf. T.Hummel et al., 2020; Abscent Smell Training Kit).

Bonne nouvelle, après plus de deux ans de recherches et d'études cliniques, fin 2022 des chercheurs de l'Université de Mons ont trouvé une méthode - ce n'est pas un médicament - basée sur les plaquettes sanguines pour soigner les patients souffrant d'anosmie. Il s'agit de la technique du PRP (Platelet-Rich Plasma) développée à l'origine à l'Université de Stanford. Pour rappel, les plaquettes sont des structures riches en facteur de régénération (elles interviennent par exemple lors d'une coupure de la peau par accélérer la coagulation).

La technique PRP consiste à récupérer le plasma du patient lors d'une prise de sang puis à l'injecter via une seringue dans la partie haute de son nez, où se trouvent les récepteurs qui ont du mal à se régénérer. Grâce à cette technique, les patients ont 12 fois plus de chance de guérir que sans intervention. Selon une étude américaine, 80% des patients concernés récupèrent l'odorat entre trois semaines et 6 mois (cf. RTBF).

La parosmie

Depuis 2021, on constate que le Covid-19 altère également l'odorat et le goût, ce qu'on appelle la parosmie. Il s'agit d'une "perversion de l'odorat caractérisée par une perception sensorielle ne correspondant pas à la stimulation. Par exemple, un parfum est perçu comme une odeur fétide" (Larousse).

Ce symptôme est différent des odeurs fantômes (les "hallucinations olfactives") car ce n'est pas une sensation fantôme mais bien une déformation réelle de la perception olfactive.

Les personnes présentant une parosmie ressentent des odeurs d'ail, de gaz, de métal, de rouille ou de déchets. Les aliments ont un goût chimique et une odeur désagréable de produit ménager ou de fumée de cigarette qui peut donner un haut-le-cœur.

Ce symptôme peut durer plusieurs jours et, selon certaines études, il effecte environ 10% des patients Covid. Comme dans le cas de l'anosmie, une rééducation olfactive permet de restaurer l'odorat.

Perte de chéméthèse

Selon le neurologue Theodore Price spécialiste de la douleur à l'Université du Texas à Dallas, dans de rares cas, des patients rapportent une perte d'une sensation particulière appelée chéméthèse, qui les rend incapables de détecter les piments chauds ou les menthe poivrée fraîche - des perceptions véhiculées par des nocicepteurs et non par des cellules gustatives.

Comme l'anosmie, on sait que ces symptômes sont typiques des infections virales. Mais leur fréquence et leur persistance dans des cas bénins de Covid-19 suggèrent que les neurones sensoriels pourraient être affectés au-delà des réponses inflammatoires normales à l'infection et donc qu'il s'agirait d'une réaction directement liée à la présence du virus. Selon Price, les patients affectés "ont tous des maux de tête, et certains d'entre eux semblent avoir des problèmes de douleur qui ressemblent à des neuropathies", une douleur chronique qui résulte de lésions nerveuses.

A gauche, anatomie de la moelle épinière. A droite, localisation des ganglions de la racine dorsale (DRG) en périphérie et à l'extérieur de la moelle épinière. Documents Centre de référence Syringomyélie et adapté de Larousse.

Le Covid-19 peut-il infecter les nocicepteurs ? Price et ses collègues ont voulu répondre à cette question. Les nocicepteurs et autres neurones sensoriels se regroupent à l'extérieur de la moelle épinière, dans les ganglions de la racine dorsale (DRG). Price et ses collègues ont analysé l'ADN des DRG et en particulier l'effet des anticorps ciblant la protéine de surface ACE2 (cf. T.Price et al., 2020). Ils ont découvert qu'un sous-ensemble de neurones DRG contenait des ACE2, offrant au virus un point d'entrée dans les cellules. Les neurones DRG qui contenaient l'ACE2 possédaient également de l'ARNm, le messager des instructions génétiques pour fabriquer une protéine sensorielle appelée MRGPRD. Cette protéine peut réguler la fonction des nocicepteurs y compris la sensation de la douleur. Elle marque les cellules comme un sous-ensemble de neurones dont les terminaisons sont concentrées à la surface de la peau et des organes internes, y compris les poumons – où elles seraient sur le point de capter le virus.

Selon Price, une infection nerveuse par le Covid-19 pourrait induire des symptômes aigus et durables : "Le scénario le plus probable serait que les nerfs autonomes et sensoriels soient affectés par le virus. Nous savons que si les neurones sensoriels sont infectés par un virus, cela peut avoir des conséquences à long terme" (même si le virus n'est pls actif dans les cellules). Mais selon Price, "il n'est pas nécessaire que les neurones soient infectés." En effet, dans une autre étude (cf. T.Price et al., 2020), avec ses collègues ils ont comparé les données génétiques des cellules pulmonaires de patients Covid et de témoins sains et ont recherché des interactions avec des neurones DRG sains. Ils ont trouvé de nombreuses cytokines, des molécules de signalisation du système immunitaire, chez les patients infectés qui pourraient interagir avec les récepteurs neuronaux. Cette observation suggère que les nerfs pourraient subir des dommages durables par les cytokines sans être directement infectés par le virus. On reviendra plus bas sur l'origine et les conséquences du choc cytokinique.

Les démangeaisons

Selon une étude publiée sur "medRxiv" en juillet 2020, Mario Falchi du King's College de Londres et ses collègues signalent que des démangeaisons ont été identifiées chez 17% des 336000 patients Covid suivis dans leur étude. Ce symptôme est un signe avant-coureur de la maladie car il s'est manifesté avant les autres symptômes. Chez 20% des patients Covid, des plaques rouges, souvent localisées sur les orteils ou les doigts, étaient le seul signe clinique observé. Ces démangeaisons représentent donc un signal d'alerte.

A ne pas confondre avec des boutons rouges provoqués par des piqûres de tiques ou d'araignés (notamment sur les pieds durant la nuit) ou par une maladie virale autre que la Covid-19. Si l'épiderme gonfle fort avec des démangeaisons qui deviennent insupportables, il faut consulter rapidement un dermatologue (ou un pédiatre pour les enfants).

Les rougeurs et les pseudo-engelures

Des médecins italiens ont observé des pathologies dermatologiques, des lésions sur la peau sous forme de rougeur (rash érythémateux), d'urticaire diffuse, de plaques, de boutons, de vésicules et de petites nécroses, principalement sur le tronc, parfois sur les doigts ou sur les membres inférieurs, y compris les orteils qui gonflent et deviennent rouges ou violacés, provoquant des démangeaisons, des hypersensibilités ou, dans certains cas, une douleur, un symptôme qu'on a surnommé les "orteils Covid".

Document D.R.

Comme évoqué précédemment, en Italie des médecins ont traité un jeune enfant de 4 ans présentant des éruptions cutanées et des symptômes comme la toux et un rhume évoquant une rougeole. Il fut soigné et guérit mais on découvrit un an plus tard en réanalysant son échantillon pharyngé qu'il avait en fait contracté la Covid-19.

Les réactions cutanées résultent d'une inflammation majeure qui nécessite des soins d'urgence. Sur les 88 patients Covid étudiés en Italie, 18 soit 20% présentaient des manifestations cutanées : 8 au début de la maladie et 10 en cours d’hospitalisation (cf. S.Recalcati, 2020) et principalement des rougeurs. Le traitement est analogue à celui traitant une infection proche comme le lupus et cela cicatrise en quelques jours.

Pendant le premier confinement, au printemps 2020, des dermatologues belges ont constaté que des patients jeunes dont l'âge moyen est de 30 ans présentaient fréquemment des pseudo-engelures douloureuses alors qu'ils n'avaient pas été exposés à un froid intense, n'avaient pas d'antécédents de maladies circulatoires, rénales ou auto-immunes.

En France, dès mi-mars 2020, 40 cas furent signalés à Nice chez de jeunes patients Covid. Plus de 400 cas similaires furent également observés en avril 2020 dont une cinquantaine de cas furent signalés en un seul weekend, selon la Dr Tu-Anh Duong, dermatologue à l'hôpital Henri Mondor de Créteil. Quasiment tous les patients avaient été en contact avec des personnes contaminées par le Covid-19 (ou présumées l'être), certaines présentant les symptômes de la maladie.

Pas de lien avec la Covid-19 ?

Dans une étude publiée dans la revue "JAMA Dermatology" le 25 novembre 2020, Thomas Hubiche de l'Université de Côte d'Azur et ses collègues ont étudié 40 patients présentant des pseudo-engelures. Ils présentaient un test PCR négatif mais 12 patients soit 30% présentaient un test sérologiques positif au Covid-19. Les biopsies cutanées ont montré que les patients présentaient une augmentation des D-dimères, une inflammation lymphocytaire, des lésions vasculaires et une réponse significative à l'interféron alpha par rapport aux patients atteints d'une infection aiguë au Covid-19.

Les auteurs estiment que les "orteils Covid" sont déclenchés par le virus en raison de la forte réponse immunitaire innée. Ils postulent que de nombreuses personnes atteintes d'engelures pandémiques éliminent le virus de cette manière et donc que très peu développent des anticorps. Les chercheurs concluent que les pseudo-engelures sont provoquées par des interféronopathies de type 1. Il s'agit d'une maladie auto-immune inflammatoire caractérisée par des défenses immunitaires innées suractives et auxquelles le virus ne résiste généralement pas.

Coupes microscopiques de cellules colorées à l'hématoxyline-éosine de patients souffrant "d'orteils Covid". A gauche, inflammation lymphocytaire dense superficielle et profonde à disposition périvasculaire et péri-eccrine. A droite, dermatite d'interface s'étendant à la partie intra-épidermique de l'acrosyringium (coloration hématoxyline-éosine). Documents T.Hubiche et al. (2020)

Toutefois, les chercheurs estiment que le Covid-19 ne serait que la cause indirecte de ces symptômes et qu'il s'agit plutôt d'un effet du confinement, à savoir la sédentarisation. En effet, on sait d'expérience que le manque d'activité diminue la perfusion sanguine aux extrémités. Dans ce cas-ci, cela ne manifeste par des sortes d'engelures. Mais il ne s'agit que d'une hypothèse qu'il faut encore démontrer sur base de beaucoup plus d'autres cas cliniques.

Dans une nouvelle étude publiée dans les "PNAS" le 25 février 2022, Akiko Iwasaki de l'Université de Yale et ses collègues ont réalisé une étude immunologique approfondie de 21 personnes du Connecticut ayant développé des engelures au début de la pandémie. Bien que les résultats n'excluent pas un lien direct entre la Covid-19 et les engelures, les auteurs n'ont trouvé "aucune preuve immunologique d'une infection passée par le SARS-CoV-2" chez 19 de ces personnes. Ce rapport appuye l'argument précédent concernant l'effet de la sédentarisation.

La façon dont les engelures et les "orteils Covid" surviennent n'est pas encore tout à fait claire. Cela ressemble à des symptôles liés au froid, mais ils sont apparus au printemps (pour l'étude d'Iwasaski, entre avril et mai 2020). Environ un tiers des patients ont déclaré avoir des symptômes de la Covid-19 et un tiers ont déclaré avoir été en contact avec une personne confirmée ou suspectée d'avoir été infectée par le SARS-CoV-2. Les chercheurs ont utilisé diverses méthodes pour rechercher des anticorps et des lymphocytes T spécifiques au virus mais ils n'ont détecté des signes d'une infection passée que chez deux personnes, dont l'une avait initialement été testée positive.

En revanche, des études épidémiologiques beaucoup plus importantes (cf. H.Mascitti et al., 2021 et A.Visconti et al., 2021) ont montré un lien entre les engelures et le SARS-CoV-2.

Des études antérieures (cf. C.J. Ko et al., 2021 et I.Colmenero et al., 2021) ont examiné si les personnes atteintes d'engelures avaient été contaminées par le SARS-CoV-2 en prélevant des biopsies tissulaires et en colorant les échantillons pour identifier certains régions du virus. Toutefois leur résultats ne permettent de trancher la question car, selon les auteurs, "il peut y avoir un manque de spécificité dans cette coloration".

La question du lien entre le Covid-19 et les engelures étant toujours d'actualité, certains chercheurs reviennent sur la théorie de la sédentarisation : les personnes confinées ont passé plus de temps à la maison pieds nus au début de la pandémie et ont eu froid aux pieds. Ou peut-être que toute la couverture médiatique des "orteils Covid" a conduit plus de personnes que d'habitude à consulter un médecin pour ce problème.

Actuellement, les hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives et il est possible que tout le monde ait raison. Il est également possible que le problème s'estompe et revienne à la normale. Selon le dermatologue William Damsky de l'Université de Yale et coauteur de l'article avec Ko et ses collègues, "Nous voyons toujours des patients avec de nouvelles engelures, mais cela semble revenir à l'ancien taux de fond".

La bonne nouvelle est que la réponse scientifique éventuelle ne modifiera probablement pas la façon dont les dermatologues traitent les patients. Que la personne ait ou non la Covid-19, les engelures disparaissent généralement d'elles-mêmes en deux ou trois semaines.

Soulignons que les symptômes d'une infection bactérienne, d'un herpès labial voire même d'une simple ampoule (phlyctène) ou la piqûre d'un insecte peut provoquer une rougeur accompagnée d'une douleur ou d'une démangeaison locale suggérant que la personne a été contaminée par le Covid-19. En principe, la Covid-19 provoque plusieurs symptômes et les rougeurs ne sont pas limitées à un seul endroit mais s'étendent sur les membres. Dans le doute, la personne doit consulter un dermatologue (depuis 2020 ils ont l'expérience des patients Covid) afin qu'il réalise éventuellement une biopsie et peut demander en même temps un test sérologique pour avoir un diagnostic précis et être rassurée sur sa santé.

La conjonctivite

Un autre symptôme de la Covid-19 est la conjonctivite, une inflammation de la conjonctive de l'oeil qui devient rouge, larmoyante et démange, d'où son surnom de "l'œil rose". L'origine peut être allergique (due aux pollens) mais dans ce cas ci il s'agit d'une infection virale.

Document D.R.

Selon une étude publiée dans le "Journal of medical virology" le 26 février 2020 portant sur 30 patients chinois hospitalisés pour la Covid-19, l'un des patients souffrait de conjonctivite et présentait des traces du virus dans le liquide lacrymal et le liquide conjonctival. Cela suggère que le virus peut donc se transmettre par contact avec des aérosols avec la conjonctive.

Ce n'est donc pas sans raison que dans les hôpitaux notamment, le personnel en contact avec les patients contagieux protège ses muqueuses, y compris ses yeux en portant des lunettes de protection. Le même protocole est d'usage dans les cabinets dentaires. Nous avons expliqué qu'une étude réalisée en Chine montra que les personnes portant des lunettes étaient relativement plus épargnées de la contamination par le Covid-19 que les personnes n'en portant pas.

Si la conjonctivite apparaît chez un enfant et est combinée à de la fièvre, un écoulement nasal et des éruptions cutanées, on peut la confondre avec une rougeole. Dans ce cas, seule une analyse de sang confirmera le diagnostic. De même, on peut confondre les symptômes d'une allergie aux pollens avec la Covid-19. Soit le patient sait à quelle substance il est allergique et il suffit qu'il prenne son antihistaminique pour supprimer les symptômes dans la demi-heure soit il doit consulter un allergologue ou pneumo-allergologue pour établir le diagnostic.

Notons qu'en septembre 2020, dans le "Journal Français d'Ophtalmologie", le Dr Antoine Rousseau du CHU de Bicêtre, en France, et ses collègues faisaient également état des signes cliniques et les enjeux des atteintes oculaires par le Covid-19 telles la conjonctivite mais concluaient que les cas étaient "finalement rares et semblent peu sévères sur le plan fonctionnel". Par précaution, bien que sachant que les ophtalmologistes sont sensibilisés aux conjonctivites virales à caractère épidémique, ils recommandaient à leurs confrères de prendre des mesures préventives comme le port additionnel de lunettes de protection pour éviter les contaminations lors des consultations.

Hoquet, perte de cheveux et troubles de l'audition

Plusieurs symptômes désagréables qui furent longtemps attribués à d'autres infections, sont aujourd'hui formellement attribués au Covid-19. Il s'agit du hoquet, de la perte de cheveux, de la toux sèche, des vertiges et des troubles de l'audition. Non pas le symptôme en soi qui peut se déclencher pour différentes causes mais lorsqu'il est associé à une contamination par le Covid-19.

Ainsi, dans une étude publiée par Prince ert Sergel dans la revue "The American Journal of Emergency Medicine" juillet 2020, on apprend que le hoquet (singultus) peut affecter les patients Covid durant toute la durée de leur maladie. Ce hoquet peut-être peristant et se manifester jour et nuit suite à une atteinte de la zone pulmonaire.

Aux Etats-Unis, des médecins de la clinique de Cleveland ont découvert que les patients Covid de longue durée perdaient leurs cheveux, un symptôme qui apparaît chez 65% des patients. Mais il apparaît aussi chez des individus asymptomatiques comme on le constata sur les réseaux sociaux (cf. le tweet d'Alyssa Milano et le reportage sur YouTube. L'actrice fut atteinte par le virus en mars 2020 et présentait toujours des symptômes au mois d'août). En fait, ce symptôme appelé l'effluvium de télogène serait temporaire. Mais il démontre les effets du stress et de la fatigue que subissent les patients Covid, en particulier lorsque les rechutes s'enchaînent, sans perspective de guérison.

Enfin, la Covid-19 déclenche ou accentue les troubles auditifs. Les spécialistes ORL britanniques observent fréquemment une perte auditive soudaine chez des patients. Cela représente entre ~5 et 160 cas pour 100000 personnes chaque année. On ignore les causes exactes de ce trouble qui peut être lié à un vaisseau obstrué ou apparaître suite à une infection virale comme l'Influenzavirus (la grippe), les virus de l'herpès ou le cytomégalovirus, bref chez des patients dont les défenses immunitaires sont affaiblies.

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Dans un article publié dans les "Case Reports" des "BMJ Journals" le 13 octobre 2020, les auteurs décrivent un cas de surdité irréversible apparu chez un patient Covid de 45 ans. Une semaine après sa sortie de réanimation et alors que ce patient semblait se rétablir, il commença à percevoir des acouphènes, une affection courante qui provoque la perception de bruits dans l'oreille.

En moyenne, les acouphènes affectent environ un adulte sur huit au Royaume-Uni et sont associés à une réduction du bien-être émotionnel, à la dépression et à l'anxiété.

Un examen médical de ce patient montra que ses conduits auditifs n'étaient ni obstrués, ni enflammés et ses tympans étaient intacts. Un test auditif confirma une perte d'audition de l'oreille gauche. Il fut traité à base de corticoïdes mais il n'a que partiellement retrouvé l'ouïe.

Selon les médecins, après avoir écarté les autres causes possibles comme le VIH ou la polyarthrite rhumatoïde, ils conclurent que sa déficience auditive était associée au Covid-19. Notons qu'un premier cas de perte auditive mentionnant le Covid-19 fut signalé en avril 2020 en Thaïlande (cf. Sriwijitalai & Wiwanitkit, 2020).

En fait, selon le Dr Kevin Muro, professeur d'audiologie à l'Université de Manchester, "en théorie il est possible que le Covid-19 puisse affecter certaines parties du système auditif, y compris l'oreille moyenne ou la cochlée. Mais il est possible que des facteurs autres que le Covid-19 puissent avoir un impact sur la perte auditive préexistante et les acouphènes. Ceux-ci peuvent inclure le stress et l'anxiété, y compris l'utilisation de masques faciaux qui rendent la communication plus difficile, les médicaments utilisés pour traiter la Covid-19 qui pourraient endommager l'oreille ou d'autres facteurs liés à une maladie grave".

Une autre étude publiée le 5 novembre 2020 confirma le lien entre les acouphènes et la Covid-19 et son impact psychologique (cf. E.Beukes et al., 2020). L'étude porte sur 3103 personnes de 48 pays souffrant d'acouphènes, la grande majorité venant du Royaume-Uni et des États-Unis.

Selon les chercheurs, 40% des sujets étudiés contaminés par le Covid-19 présentaient simultanément une aggravation de leurs acouphènes. Un petit nombre de participants ont également signalé que leur état avait été initialement déclenché suite à leur contamination par le Covid-19, ce qui suggère que dans certains cas, les acouphènes pourraient être un symptôme prolongé de la maladie.

Une grande proportion de personnes pense que leurs acouphènes sont aggravés par les mesures de distanciation sociale car ces mesures ont conduit à des changements importants dans les habitudes de travail et de style de vie. Les répondants britanniques sont les plus affectés, avec 46% des répondants affirmant que les changements de mode de vie avaient eu un impact négatif sur leurs acouphènes, contre 29% en Amérique du Nord.

Les chercheurs ont également constaté qu'en plus d'augmenter la gravité des symptômes des acouphènes, la pandémie a également rendu plus difficile l'accès aux centres de santé. Cela pourrait encore augmenter la détresse émotionnelle et aggraver les symptômes d'acouphènes, créant un cercle vicieux.

Nous verrons plus loin que d'autres symptômes apparaissent dans les formes modérées et sévères de la maladie.

En résumé, selon les études cliniques sur les patients Covid, dans 44 à 88% des cas, durant les deux premières semaines les symptômes sont bénins à modérés avec de la toux, des migraines passagères et de la fièvre, le virus n'infectant que les voies supérieures, le nez et la gorge et parfois les bronches.

Pour rassurer le lecteur, s'il n'y avait qu'un nombre à retenir, globalement dans le monde plus de 95% des personnes contaminées guérissent de la Covid-19, les décès survenant principalement parmi les personnes vulnérables et à risque, en particulier chez les personnes âgées. On y reviendra.

Courbatures, migraines et fatigue

Au stade suivant, des symptômes grippaux apparaissent, des douleurs musculaires, des maux de tête et souvent mais pas toujours par une forte fatigue, un symptôme typique de la pneumonie mais pas uniquement.

Si la fièvre passe de 38 à plus de 40°C en une nuit ou si les symptômes persistent ou s'accompagnent d'un essoufflement ou une détresse respiratoire aiguë (SDRA) ou d'autres symptômes aussi graves, il faut d'urgence appeler le médecin traitant mais ne pas se rendre à son cabinet. Généralement le traitement est similaire à celui de la grippe à la différence qu'en 2020 il n'existait pas de vaccin et qu'on ne pouvait traiter que les symptômes.

Si les symptômes s'aggravent ou se multiplient et si le médecin juge que le patient a probablement contracté la Covid-19, une prise de sang sera réalisée pour confirmer le diagnostic. Si les symptômes n'exigent pas une hospitalisation d'urgence, il peut arriver qu'on demande au patient de rester chez lui en quarantaine et de suivre la prescription du médecin tout en restant en contact avec l'équipe soignante via une application accessible par Internet. Si ce n'est pas possible, l'hôpital à l'obligation de trouver le moyen de prendre le patient en charge.

En cas d'aggravation, le patient est hospitalisé et subira des examens médicaux qui permettront d'évaluer l'importance de la maladie et d'établir un diagnostic précis.

Examens médicaux

Après un test sérologique positif au Covid-19 et si la personne présente toujours des symptômes de la maladie après la période de quarantaine, elle doit consulter son médecin généraliste. Pour vérifier l'état de la progression de la maladie, il lui demandera de passer un examen radiologique - une échographique ou un scanner des poumons ou d'autres organes (tomodensitométrie ou TDM qui utilise les rayons X ou une IRM qui exploite les propriétés magnétiques de l'atome d'hydrogène) -, des appareils qui d'ailleurs vont fonctionner à temps plein durant la pandémie.

A gauche, une installation IRM du groupe IRIS en France. A droite, examen sonographique réalisé à Hangzhou, en Chine, au moyen d'un système à ultrason robotisé MGIUS-R3 pour détrerminer si le SARS-CoV-2 a entraîné des changements pathologiques dans les poumons du patient. Document K.D. Evans et al. (2020).

Selon les cardiologues du CHU de Besançon en France, "on peut aussi utiliser un angioscanner, un examen d'imagerie médicale avec injection de produit de contraste pour explorer les veines et les artères. Parmi les patients explorés par angioscanner pulmonaire dans leur étude, 23% avaient une embolie pulmonaire. Notre recommandation est donc claire : il faut dorénavant proposer la réalisation d'un angioscanner pulmonaire au lieu du scanner thoracique sans injection aux patients Covid-19 ayant des signes de gravité. Une technique qui a sauvé des patients à Besançon et qui en sauvera d’autres" (cf. La Presse du Doubs).

Grâce aux examens radiologiques, on peut visualiser les effets modérés et sévères de la Covid-19 sur le squelette et les organes, tels que les douleurs musculaires et articulaires ainsi que les anomalies du globe oculaire parmi d'autres conditions que nous allons examiner.

Douleurs musculaires et articulations douloureuses

Les douleurs musculaires et les articulations douloureuses sont des symptômes courants chez les patients Covid. Mais chez certaines personnes, les symptômes sont plus graves, durables et même inattendus, avec des poussées de polyarthrite rhumatoïde, une myosite auto-immune ou les "orteils Covid".

Dans une étude publiée dans le journal "Skeletal Radiology" le 18 février 2021, le Dr Swati Deshmukh de l'Université Northwestern en Illinois et ses collègues ont pour la première fois confirmé et illustré les causes de ces symptômes par imagerie radiologique. Après avoir établi les diagnostics de nombreux patients qui se sont présentés au Northwestern Memorial Hospital entre mai et décembre 2020, Deshmukh confirme que "le Covid-19 peut déclencher l'attaque du corps de différentes manières, ce qui peut entraîner des problèmes rhumatologiques qui nécessitent une prise en charge à vie". Il précise toutefois que "de nombreux patients atteints de troubles musculo-squelettiques liés au Covid guérissent".

Lorsque les symptômes s'aggravent, l'imagerie radiologique permet de vérifier si les douleurs musculaires et articulaires sont liées au Covid ou à quelque chose de plus insidieux comme un diabète ou sont seulement des courbatures similaires à ce qu'on observe avec la grippe par exemple.

Lorsque l'imagerie permet d'expliquer pourquoi une personne présente des symptômes musculo-squelettiques et que le diagnostic est établi, on peut alors diriger le patient vers le bon spécialiste pour le traitement, comme un rhumatologue ou un dermatologue. Dans certains cas, les radiologues peuvent même suggérer un diagnostic Covid basé sur l'imagerie musculo-squelettique chez des patients qui ne savaient pas qu'ils avaient contracté le virus.

A gauche, image IRM de l'épaule droite d'une patiente Covid de 72 ans ayant des symptômes modérés avec une polyarthrite rhumatoïde dormante depuis 2 ans. Les flèches indiquent une synovite rehaussée de nombreux débris, bref une inflammation de l'articulation. Le virus a déclenché la polyarthrite rhumatoïde chez cette patient avec une douleur prolongée à l'épaule après la résolution des autres symptômes liés au Covid. Ses symptômes se sont améliorés après l'injection intra-articulaire de stéroïdes. Au centre, image IRM du pied d'un patient Covid sévère de 57 ans. La flèche pleine indique un tissu dévitalisé, compatible avec une gangrène. L'œdème multifocal de la moelle osseuse (tête de flèche) est compatible avec l'ostéonécrose associée. A droite, image IRM du pelvis d'une patiente Covid de 30 ans environ 2 semaines après les premiers symptômes. L'image montre une légère synovite bilatérale de la hanche (têtes de flèches) et une bursite iliopsoas (flèches). Elle fut traitée avec des anti-inflammatoires non stéroïdiens et des corticostéroïdes. Documents S.Deshmukh et al. (2021).

Que voit-on sur les images IRM telles celles présentées ci-dessus ? Selon Deshmukh, "Nous pourrions voir des œdèmes et des changements inflammatoires des tissus (fluide, gonflement), des hématomes (collections de sang) ou des tissus dévitalisés (gangréneux). Chez certains patients, les nerfs sont blessés (brillants, hypertrophiés) et chez d'autres, le problème est une altération du flux sanguin (caillots)".

Le problème avec le Covid est qu'il faut différencier les effets directs du virus sur le corps et les réactions du corps. Le Dr Deshmukh prend le cas d'une douleur persistante à l'épaule qui s'est déclenchée suite à une contamination par le Covid-19. "Si le radiologue sait que le Covid-19 peut déclencher une arthrite inflammatoire et que l'imagerie montre une inflammation des articulations, il peut envoyer le patient chez un rhumatologue pour une évaluation". Même procédure pour les patients atteints par les "orteils Covid" (voir plus haut).

Mais jusqu'à présent les médecins demandant une imagerie ne pouvaient consulter aucune littérature décrivant les complications du pied et des tissus mous contaminés par le Covid. C'est la raison pour laquelle pendant des mois, les médecins au chevet des patients ne savaient pas quoi rechercher pour établir correctement leur diagnostic. Grâce à ces nouvelles images IRM, Deshmukh et ses collègues proposent aux spécialistes des exemples d'images IRM de différents types d'anomalies musculo-squelettiques liées au Covid-19 que les radiologues devraient rechercher.

Anomalies du globe oculaire

Après la conjonctivite (voir plus haut) et des lésions de la rétine (la rétinopathie) liées à une contamination par le Covid-19, une nouvelle étude a signalé des anomalies oculaires liées au virus.

Dans une étude publiée dans la revue "Radiology" le 16 février 2021, Augustin Lecler du départment de Neuroradiologie du CHU de Lyon, en France, et ses collègues ont montré que les patients Covid sévèrement affectés par la maladie risquent de développer de graves problèmes oculaires.

Sous l'égide du groupe d'étude Covid de la Société Française de Neuroradiologie (SFNR), les chercheurs ont analysé les données cliniques de 129 patients Covid hospitalisés en France ayant subi des scintigraphies cérébrales avec imagerie IRM entre le 4 mars et le 1er mai 2020. C'est une étude rétrospective basée sur l'analyse des dossiers cliniques et non pas un suivi direct des patients. On y reviendra.

Images IRM cérébrales d'un patient Covid de 56 ans pris en charge aux soins intentifs pour une forme sévère de la Covid-19 montrant des "nodules" au pôle postérieur du globe oculaire (les têtes fléchées) et un décollement localisé de la rétine de l'oeil gauche (la flèche). A droite, la flèche indique un nodule au pôle postérieur du globe oculaire, dans la région de la macula. Il s'agit des signes d'inflammation ou de lésions oculaires directes. Documents A.Lecler et al. (2021).

Parmi ces patients Covid, neuf d'entre eux soit 7%, présentaient des signes d'anomalies dans le pôle postérieur visible au fond de l'oeil. Comme on le voit sur les images ci-dessus, les IRM montrent des anomalies sous forme de "nodules" à l'arrière de leurs yeux compatibles avec des signes d'inflammation ou de lésions oculaires directes. Les neuf patients présentaient des nodules dans la macula, la zone sombre au centre de laquelle se trouve la fovéa utilisée dans la vision directe (cf. la vision). Huit des patients avaient des nodules "bilatéraux", c'est-à-dire présents dans les deux yeux.

En revanche, trois patients ne présentaient pas d'anomalies oculaires. Du moins, les nodules n'étaient pas visibles à l'examen ophtalmologique, probablement du fait de son manque de sensibilité dans un tel contexte clinique (un fond d'oeil est en effet difficile à réaliser chez des patients présentant une forme sévère de Covid-19).

Image IRM cérébrale d'une personne ne présentant pas d'anomalie ni de traumatisme. Document Deccan Herald.

Selon le Dr Lecler, "les problèmes oculaires que nous avons trouvés peuvent être potentiellement très graves car ils surviennent dans la région maculaire, qui est la région responsable de nous donner une vision claire et la capacité de voir les petits détails. Si elle persiste, cela pourrait conduire à une perte de vision sévère ou même à la cécité."

La cause exacte de ces nodules n'est pas encore clairement établie, mais ils pourraient être des signes de dommages dus à des vaisseaux sanguins obstrués ou à des saignements dans le globe oculaire.

La manière dont le virus inflige des lésions oculaires est également inconnue. Il est probable que le Covid-19 infecte directement l'oeil étant donné que les cellules de la rétine expriment le récepteur ACE2 qui permet au virus de pénétrer dans les cellules (cf. Y.Yan et al., 2020; F.Colavita et al., 2020; X.Zhang et al., 2020).

Les dommages pourraient également être dus à la réponse inflammatoire du corps suite à l'attaque virale. On reviendra en détails sur ce mécanisme (voir page suivante).

Les chercheurs n'excluent pas non plus la possibilité que les nodules résultent de la forme sévère de la Covid-19 et des conséquences de l'hospitalisation. En particulier, ils notent que les patients qui restent longtemps aux soins intensifs en position couchée (sur le ventre) ou qui sont intubés risquent de développer des anomalies oculaires en raison de la pressionsanguine accrue dans leurs yeux. En effet, la plupart des patients faisant l'objet de l'étude et présentant ces anomalies oculaires sont restés en position couchée dans l'unité de soins intensifs pendant un certain temps.

Ces patients pourraient donc présenter des séquelles oculaires mais ce n'est pas encore démontré. En effet, les chercheurs n'ont pas suivi ces patients pour déterminer si les anomalies étaient temporaires ou si elles entraînaient des changements de vision permanents. Mais les chercheurs ont poursuivi leur étude sur ces patients Covid et étudient également d'autres patients présentant une forme sévère de la Covid-19 en s'appuyant sur des images IRM ainsi que des tests oculaires complets. Ils ont également mené des études similaires sur des patients présentant une forme bénigne de la maladie pour déterminer si ces problèmes sont spécifiques ou non aux formes graves.

Les auteurs confirment qu'une IRM des globes oculaires, un fond d'oeil et une tomographie par cohérence optique (OCT) devraient être envisagés systématiquement pour tous les patients présentant une forme sévère de Covid-19 afin de détecter des nodules du pôle postérieur. Ils déclarent que "des problèmes oculaires graves peuvent passer largement inaperçus car ces patients sont souvent traités en unité de soins intensifs pour des pathologies beaucoup plus sévères mettant en jeu le pronostic vital. Nos données confirment la nécessité d’un dépistage et d’un suivi de ces patients afin de proposer un traitement approprié et d’améliorer la prise en charge de ces manifestations ophtalmologiques potentiellement graves". Cet avis est partagé par la Dr Claudia Kirsch, cheffe de division de neuroradiologie à l'École de Médecine Northwell Health Zucker Hofstra de Manhasset, dans l'État de New York, dans un commentaire accompagnant l'article publié dans la revue "Radiology".

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